mercredi 15 octobre 2008

Tokyo !


Contrairement au gentil Paris je t’aime, ce film collectif de trois cinéastes aussi différents les uns que les autres n’est pas un ode à Tokyo. D’où sans doute le point d’exclamation dans le titre. Réunir deux cinéastes d’aujourd’hui (Gondry et Bong), deux cinéastes plutôt bons et relativement aimés et tendance avec un troisième tricard, qui a eu son heure de gloire mais qui n’a rien fait depuis dix ans, est un choix étonnant. Comme surprend l’absence de cinéaste japonais, tout simplement.


Trois histoires, donc, qui ne sont reliées entre elles que par la ville, Tokyo. Gondry commence, Carax poursuit et Bong termine. Tokyo ! est plutôt correct, sans non plus soulever un enthousiasme. Gondry et Bong sont en dessous du niveau de leur deux derniers films, les formidables, Soyez sympas rembobinez et The Host. Carax, lui est forcément meilleur que Pola X, que de toute façon, tout le monde a eu le temps d’oublier, sauf peut-être deux ou trois rédacteurs des Cahiers du cinéma.


Le premier bon point de Tokyo ! est de voir, contrairement à Paris je t’aime, nos trois réalisateurs ne font pas du tourisme. Gondry enferme ses personnages dans un minuscule appartement, Carax met Denis Lavant dans les égouts et le personnage de Bong reste enfermé chez lui. Pas de promenade romantique, ni même de restaurant japonais, pas plus de saké et de kimono. En revanche, ils montrent tous une certaine étrangeté des Japonais, et parfois, chez Carax, une vraie cruauté.


Les trois courts-métrages ont essentiellement en commun, une inquiétante étrangeté, un fantastique domestique. La fille de Interior design (Gondry), ne trouve pas sa place en tant qu’humain, elle va se transformer en chaise. Lavant dans Merde (Carax) est un monstre des égouts qui tue tout le monde et qui ne s’exprime que dans une langue inconnue. Sa physionomie inquiète. Le héros de Shaking Tokyo (Bong) n’arrive, physiquement, pas à sortir de chez elle. Il va contaminer la ville qui se transforme en no man’s land.


Michel Gondry a un peu du mal à poursuivre au Japon l’unité de son univers foutraque. Il aurait du s’attarder sur son personnage masculin, qui fait des films bizarres. Bong Joon-ho se fait formaliste, cadre à l’extrême ses plans, mais son histoire évoque plus les derniers Kim Ki-duk que ses propres films. Dommage. C’est Leos Carax qui s’en tire avec bonheur. Il filme un Japon à la fois humain et animal, une pure opposition entre le haut et le bas. C’est le bas qui gagne.


Si une grande part d’humour n’était présente, Tokyo ! pourrait apparaître comme un film particulièrement déprimant. Mais son esprit bancal l’empêche d’être autre chose qu’une bizarrerie.


Tokyo ! (Japon – Corée – France – Allemagne, 2008) Un film de Michel Gondry, Léos Carax et Bong Joon-ho avec Yû Aoi, YosiYosi Arakawa, Jean-François Balmer, Julie Dreyfus, Ayako Fujitani, Ayumi Ito, Teruyuki Kagawa, Ryo Kase, Denis Lavant, Yutaka Matsushige, Nao Omori, Naoto Takenaka, Satoshi Tsumabuki, Hiroshi Yamamoto.

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