lundi 30 juin 2008

18 jeunes gens en quête d’orage

Les 18 jeunes gens dont il est question dans ce cinquième film de Yoshida sont des loubards. Des jeunes adultes en marge de la société et qui vont se retrouver ensemble dans une ancienne caserne de l’armée américaine. C’est Shimazaki qui va s’en occuper. Seulement voilà, Shimazaki est lui-même en marge. Il dit d’ailleurs de sa propre personne qu’il est un vagabond.
C’est le comptable de l’entreprise du chantier naval dans lequel il travaille qui lui propose cet emploi. Car Shimazaki boit tout l’argent de sa paie dans les bars. Il a demandé de l’avance sur son salaire et risque de se retrouver le bec dans l’eau très vite. Après un vague refus, il accepte ce poste où il sera nourri et logé. Il quitte donc la chambre qu’il louait chez la mère de Nobu qui en pince pour lui.
Shimazaki est maintenant avec ces 18 garçons qui refusent toute discipline, qui veulent boire, jouer, voir des filles et ne pas travailler. Il les traite comme des merdes, leur parlent mal, les humilie. Il est tout prêt d’abandonner sa mission mais décide finalement de les civiliser, comme il dit. Ce qui ne va pas être une simple histoire. Ils ont remarqué que Nobu aimerait bien une aventure amoureuse et se moquent de lui.
La jeune femme va se faire violer par un des loubards. Un des jeunes va blesser un homme dans un bus. Ils vont se saouler et se battre comme des chiffonniers avec d’autres jeunes. Tout va mal. 18 jeunes gens en quête d’orage peut être vu comme un film moral, car il l’est d’une certaine manière. Mais il y a autre chose.
Yoshida oppose le groupe aux individualités. On ne connaîtra jamais tous les prénoms de ces jeunes. Car le groupe est vu comme un élément à part entière, un élément indivisible qui va s’affronter aux différentes individualités et en premier lieu Shimazaki et Nobu. Ordre contre désordre, le groupe se déplace sur des chemins sinueux pour descendre de la caserne à la ville de province. Et les jeunes qui forment un attroupement désordonné rencontre régulièrement dans les rues rectilignes des troupes de soldats bien rangés ou des lycéens qui font du footing en rang.
18 jeunes gens en quête d’orage est une critique sociale où Yoshida montre le monde du travail. Et ça n’est pas très beau. On y voit une société d’ouvriers qui fonctionne en différentes classes, des contremaîtres, des ouvriers qualifiés, des intérimaires et le lumpen prolétariat. Chaque classe méprisant la classe qui est en dessous de lui et celle au dessus. Bref, rien n’a changé semble-t-il.
18 jeunes gens en quête d’orage (嵐を呼ぶ十八人, Japon, 1963) Un film de Yoshishige Yoshida avec Tamotsu Hayakama, Yoshiko Kayama, Yôko Mihara, Gannosuke Ashiya.

mercredi 25 juin 2008

Soif de justice


En 1984, les Espagnols savaient tous parler cantonais. C’est ce que nous dit ce film assez moyen de Sammo Hung, bien en deçà de ce qu’il a pu tourner dans cette période phare de la Golden Harvest. Soif de justice se passe en Espagne pour des raisons aussi incompréhensibles que La Fureur du dragon de Bruce Lee se passait en Italie. A moins qu’en Espagne et à Barcelone en particulier, à cette époque, il se soit trouvé un très large public pour le trio d’acteurs.

L’intrigue se déroule donc dans une petite ville de la péninsule. Moby (Sammo Hung) est détective privé. Plus exactement, il est le larbin de Matt. Mais les affaires ne marchent pas. L’électricité a été coupée, le téléphone aussi. Les créanciers recherche le patron de Moby et il s’enfuit laissant Moby seul. Il devient, non sans fierté, son propre patron. Un homme vient alors l’engager pour rechercher une jeune femme dont il n’a aucune photo. Moby va mener l’enquête.

David (Yuen Biao) et Thomas (Jackie Chan) sont deux amis qui vivent et travaillent ensemble. Ils font leur gym d’un même mouvement et partagent tout. Ils sont d’honnêtes commerçants et tiennent un restaurant ambulant qui fait le bonheur des Espagnols. Lors d’une visite à l’asile de fous où habite le père de David, ils font la connaissance de Sylvia. On va vite comprendre que c’est la fille qui est au cœur des investigations de Moby. Pour l’anecdote, dans cet asile on aperçoit Wu Ma qui fait l’horloge, John Sham et Richard Ng.

Je reviens à Sylvia (Lola Forner) qui est au centre d’un héritage. Sa mère avait eu un enfant avec un comte espagnol et elle serait en droit de réclamer l’héritage. Là, des méchants à la solde d’un homme qui veut s’accaparer l’argent du comte vont entrer en scène. Sylvia pour se débrouiller dans la vie est devenue pickpocket. Pour attirer les hommes, elle fait croire qu’elle se prostitue. David et Thomas vont aller plus d’une fois à sa rescousse même si elle leur en fait baver.

Le scénario de Soif de justice est constamment poussif et manque de bout en bout de souffle. Et je ne parle même pas de crédibilité. Ici, c’est plutôt la débilité des gags qui resurgit, tous plus indigents les uns que les autres bien moins élaborés que dans la « trilogie » du Flic de Hong Kong. Les trois acteurs sont allés passer des vacances en Espagne. Pourquoi pas ?

Ce qui est drôle c’est de voir tous les acteurs parler cantonais à nos trois héros. On ne sait pas tout de suite que ça se passe en Espagne, et on se demande pourquoi ils ne parlent pas espagnol. Mais non. Ensuite, ce sont les fringues qu’ils portent. Une horreur de ringardise. Mais ces fringues-là étaient à la mode en 1984. Jackie et Biao sont habillés avec des sweast shirts flashy pas franchement sympas. Et puis, ils font du skate. C’était le début du mouvement.

Sammo n’est pas en reste. Je pourrais, rien qu’avec ce film, faire une nouvelle revue de mode avec toutes les tenues qu’il porte. En plus, il a eu le bon goût de se faire une permanente du plus bel effet. Bref, Sammo porte tout et n’importe quoi ici. Il se ridiculise comme rarement, mais sans que cela produise les effets comiques dont il a pu faire preuve à de maintes reprises. C’est bien entendu très regrettable.

Restent dans Soif de justice les combats que Sammo Hung a évidemment chorégraphiés. Ils sont pour la plupart d’entre eux offerts à Jackie Chan et à Yuen Biao qui sont, comme toujours, des maîtres de l’agilité. Mais, ça fait quand même bizarre de les voir se battre dans un château d’Espagne. Mais encore une fois, pourquoi pas ?

Soif de justice (快餐车, Wheels on meals, Hong Kong, 1984) Un film de Sammo Hung avec Jackie Chan, Yuen Biao, Sammo Hung, Lola Forner, Benny Urquidez.

lundi 23 juin 2008

Leaving me loving you


C’est une romance à l’eau de rose, un film où le romantisme est le personnage principal. Me quitter et t’aimer. C’est le programme de ce film de Wilson Yip qui n’a rien à voir avec les autre films que le cinéaste a pu proposer depuis. C’est d’abord et avant tout un film produit par sa star principale, l’acteur Leon Lai qui est un peu en perte de vitesse depuis quelques années.

Ça se passe à Shanghai, aujourd’hui. Leon Lai est le Dr. Wong et Faye Wong est Yuet San, son ex petite amie qui organise des soirées. Ils se sont séparés après avoir vécu une belle histoire ensemble. Wilson Yip montre cet amour avec quelques flash-back où on les voit faire du manège, manger une glace, sourire, bref la vie est belle. Mais aujourd’hui, ils ne se parlent plus même si le Dr. Wong est encore amoureux d’elle. Elle le déteste mais ils vont devoir travailler ensemble car ils ont le même client, un vieil riche homme. On s’en doute, le film passera sa durée à réconcilier les deux personnages.

Pour cela Leaving me loving you procède par étapes très simples pour montrer le rapprochement que Wong va faire pour se rapprocher de Yuet et à commencer par déménager dans la même rue qu’elle après qu’il a perdu sa trace dans la ville. Puis, une fois qu’ils se mettent à collaborer, il va chercher à montrer qu’il peut être à nouveau digne d’elle. C’est un chemin semé d’embûches pour lui comme pour elle.

Le parcours du médecin et de l’organisatrice de soirées est classique cependant, avec une bonne dose de musique sirupeuse et trois chansons de Leon Lai (après tout c’est lui qui produit). En revanche, l’image de Leaving me loving you est superbe d’une grâce comme on en voit trop rarement dans le cinéma hongkongais. D’une certaine manière, Wilson Yip et son directeur de la photo ont choisi de transmettre par les images ce que les personnage ressentent. Les travellings sont émouvants jusqu’à un certain point, car malheureusement le fil émotionnel est connu d’avance et le scénario est cousu de fil blanc.

Il y a une intrigue secondaire qui est intéressante. Celle qui concerne Kong le collègue du Dr. Wong. Il gare chaque fois mal la voiture et c’est toujours la même policière qui lui met une amende. Petit à petit, une amitié va naître qui va se transformer en romance pour Kong. Hélas pour lui, la jeune femme tombe amoureuse du Dr. Wong. Mais ce dernier fait en sorte que Kong sorte avec elle.

Leaving me loving you se regarde sans ennui même si Yip a fait mieux dans le genre romantisme avec Juliet in love. Il est finalement un cinéaste très inégal. Sans doute lui suffit-il d’avoir un beau projet pour faire exploser son talent.

Leaving me loving you (大城小事, Chine – Hong Kong, 2004) Un film de Wilson Yip avec Leon Lai, Faye Wong, Xiao Hai, Jiang Yihong, Chen Jianbin, Li Tang, Zhou Yue, Lee Na-yong.

dimanche 22 juin 2008

Le Royaume interdit

Jackie Chan et Jet Li dans un même film, cela faisait au moins vingt ans que les fans (et les autres) attendaient cela. Depuis cinq ans, les deux acteurs ont cherché à travailler ensemble. On pensait que cela n’arriverait plus et voici ce Royaume interdit réalisé par l’homme qui a commis les deux Little Stuart et d’autres comédies familiales pas franchement inventives.

Jet Li et Jackie Chan mettront quarante bonnes minutes à se rencontrer mais ils ne se sépareront plus jusqu’à la fin du film. Comme il se doit, cette rencontre se fait sur un combat entre les deux hommes, combat réglé par Yuen Woo-ping qui se contente de la routine. C’est une imitation de ce qui se fait en ce moment dans le film d’art martial : beaucoup de numérique et de moins en moins de câbles. La caméra virevolte autour des acteurs. C’est elle qui chorégraphie et non plus les jambes et les bras. C’est aussi peu gracile que dans les derniers films de Zhang Yimou.

Le personnage principal est un adolescent américain passionné de wu xia pian et de films de kung-fu. Sur son mur, il y a une affiche de Bruce Lee et d’autres films, sur sa télé on peut apercevoir que passe The Monkey goes West de Ho Meng-hua. Bref, notre ado est très versé dans l’Asie Vision. D’ailleurs le film commence par une séquence de rêve avec Jet Li dans le rôle du Roi Singe. Un Jet Li en costumes et maquillé. Ça continue bien avec un générique illustré par des affiches de célèbres de la Shaw Brothers. Et après le film commence et là ça se gâte sérieusement.

Notre jeune héros va dans un magasin tenu par un vieillard. C’est Jackie Chan atrocement grimé. Une bande de jeunes loubards vient voler la caisse de notre honorable commerçant et lui tire dessus au pistolet. Jackie Chan remet au garçon un bâton lui demandant de le rendre à son propriétaire. Le jeune atterrit dans une Chine (où le film a été entièrement tourné) de légende, celle du wu xia pian.

Il y retrouve un drunken master qui va lui apprendre les rudiments du kung-fu et devenir son sifu. Ce maître du combat ivre est bien sûr Jackie Chan qui se joue à nouveau un personnage qu’il a interprété il y a trente ans. Bonjour la modernité du scénario. Une fois la présentation des méchants, c’est-à-dire un roi aux diaboliques pouvoirs magiques et une sorcière aux longs cheveux blancs (mais n’est pas Brigitte Lin n’importe quelle actrice), Jet Li arrive dans le récit en moine. Au bout de quelques combats et de nombreux artefacts, on comprendra que ce moine est le propriétaire du bâton et qu’il est aussi le Roi Singe qui va nous débarrasser du méchant.

Rob Minkoff filme son film comme on lui a demandé de le faire : à grand renfort d’effets spéciaux qui enlève toute poésie. Comme Les Orphelins de Huang Shi, Le Royaume interdit est une commande de la Chine pour exporter, en l’occidentalisant à outrance du point de vue des rapports humains, l’imaginaire chinois. Il suffit d’espérer qu’un vrai créateur offrira un jour à Jackie Chan et Jet Li une vraie rencontre. D’ici à ce que Le Royaume interdit sorte (le film devait sortir cette semaine et sera visible dans trois mois), il faudra se farcir le nouveau Rob Cohen, soir La Momie 3 où Jet Li sera la méchante momie d’une armée de soldats de terre cuite. Mais pour l’instant, ce film est bête, laid et inutile.

Le Royaume interdit (The Forbidden kingdom, Etats-Unis – Chine, 2008) Un film de Rob Minkoff avec Jackie Chan et Jet Li.

vendredi 20 juin 2008

Une ville d'amour et d'espoir


Une ville d’amour et d’espoir est un film sur l’échec. L’échec d’un adolescent qui espère beaucoup et qui n’arrivera jamais à ses fins. Ce qu’il y a d’assez étonnant dans ce long métrage plutôt court (62 minutes), c’est son ton qui reste celui de la comédie jusqu’à la toute fin qui verse dans le drame.

L’ado s’appelle Masao. Il vit avec sa mère malade et cacochyme et sa petite sœur débile légère. Masao va au collège et sa mère souhaite qu’il aille au lycée. La mère travaille dans la rue à cirer les chaussures. Masao va vendre son pigeon à une jeune femme de bonne famille. Son père est le chef d’une entreprise voisine. Elle veut absolument aider Masao en lui donnant de l’argent mais il préfère vendre son pigeon. Car il a une combine : le pigeon rentre au bercail et il vend à nouveau. Jamais il n’acceptera de l’aide mais veut travailler, mais son plan ne se déroulera pas comme il le souhaiterait et il va se retrouver le bec.

Une ville d’amour et d’espoir est un film social, c’est-à-dire une critique de la société japonaise et de son mode de fonctionnement. Oshima a beaucoup d’empathie pour son personnage principal et le montre entre sa pauvreté et la richesse des autres. Il montre surtout que cet état est héréditaire avec tout le poids du destin. On naît pauvre et on reste pauvre, de père en fils. La même situation s’applique pour les riches. Et quand les riches veulent aider les pauvres, cela se retourne contre eux. Certes, cela est un peu schématique voire caricatural et démonstratif.

Mais ce qui intéresse le plus est la figure de Masao interprété par Hiroshi Fujikawa. L’adolescent est toujours filmé droit comme un piquet, l’air vaguement hébété et le regard vide. Cette position au milieu des autres qui sont assis ou en mouvement le singularise. Masao est en retrait de la société, il ne l’acceptera jamais ou la société le rejettera. Cette jeunesse en rupture, Oshima la montera dans ses autres films bien mieux.

Une ville d’amour et d’espoir (愛と希望の街, Japon, 1959) Un film de Nagisa Oshima avec Hiroshi Fujikawa, Yuki Tominaga, Yuko Mochizuki, Michiko Ito, Fumio Watanabe, Fujio Suga.

jeudi 19 juin 2008

Sparrow


Le nouveau film de Johnnie To nous lance un défi : raconter l’histoire la plus ténue qui soit et tenir sur la durée standard d’un long métrage. Le cinéaste, c’est vrai, n’a plus rien à prouver et on pourrait facilement dire qu’il est un formaliste, formule facile qu’il faudrait prouver. Si être formaliste aujourd’hui consiste à fignoler ses plans, à les rendre plus beaux les uns que les autres, à esthétiser à outrance et constamment, alors Johnnie To est formaliste. Sauf que Sparrow peut être vu comme une simple récréation d’un cinéaste qui a envie de filmer des lieux qu’il a aime. Pour cela, il a créé une histoire amusante et insignifiante.

Cette histoire est donc simple. Quatre pickpockets cyclistes rencontrent une jeune femme chinoise mariée à un riche et vieux hongkongais. Ils vont s’aider pour voler l’argent de l’homme d’affaires. Mais tel est pris qui croyait prendre. C’est à peu près tout. Ce scénario permettra de se promener dans Hong Kong, car il faut bien semer ses poursuivants.

Johnnie To filme les vieilles maisons de Hong Kong comme il filmait celle de Macao dans Exilés. Il s’agit pour lui de témoigner que ces vieilles bâtisses existent encore et qu’elles sont cinégéniques. Les quatre pickpockets se promènent de quartier en quartier, mais pas dans les lieux trop peuplés. Ils ne vont pas à Mongkok, ils vont plutôt sur les buttes (pas facile de les grimper en vélo), dans les quartiers cossus de la métropole. Bref, c’est à une promenade touristique que convie le spectateur de Sparrow. Johnnie To va promener sa caméra et faire quelques jolis plans que l’on pourra facilement qualifier d’imagerie. Des escaliers, le toit d’un immeuble ancien, des intérieurs art déco. C’est très beau et rarement vu dans son cinéma qui par souci de rapidité à toujours filmer les immeubles modernes, notamment ceux de la Milkyway transformés la plupart du temps en commissariat.

Cette volonté de filmer ces lieux produit directement le scénario. Plus question de mettre en scène la grosse artillerie, des combats au pistolet. Ici le calme règne. Plus question non plus de filmer en voiture qui demande trop de travail pour placer la caméra. Simon Yam et sa troupe marchent et vont parfois du vélo. Même si le vélo a du mal à supporter le poids de quatre grands gaillards comme eux. Pas question non plus de créer des personnages de policiers. Le film reste entre gens d’immoralité. Ce sont des dandys. Le beau moment du film restera celui du vol du passeport de Kelly Lin qui lui ouvrira sa liberté. Ou non. Nos pickpockets se promènent sous la pluie, armés de parapluie et de lames de rasoir. Johnnie To réinvente mine de rien le gunfight. C’est très beau et assez amusant.

Tout cela apporte son lot de nostalgie. Malgré l’humour pince sans rire entre les quatre garçons, on sent que Johnnie To est à la fin d’une étape. D’ailleurs, n’a-t-il pas annoncé qu’il quittait la Milkyway. Après son retour à Lau Chin-wan en compagnie de Wai Ka-fai pour le superbe Mad detective, Sparrow semble l’aboutissement du cinéma délicieusement superficiel qu’il a pu faire et qui a donné Yesterday once more, The Mission ou Exilé. Je me demande bien ce que sera le prochain film de Johnnie To.

Sparrow (文雀, Hong Kong, 2008) Un film de Johnnie To avec Simon Yam, Kelly Lin, Lam Ka-tung, Law Wing-cheong, Kenneth Cheung, Lam Suet, Lo Hoi-pang.

Sorties à Hong Kong (juin 2008)

City without baseball (無野之城)

Un film de Lawrence Ah Mon et Scud avec Leung Yu-chung, Ron Heung, Lin Yuan, Monie Tung, Daai Ji-ching, Tsang Kin-chung, Au Wing-leung. 101 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 19 juin 2008.




Sparrow (文雀)

Un film de Johnnie To avec Simon Yam, Kelly Lin, Lam Ka-tung, Law Wing-cheong, Kenneth Cheung, Lo Hoi-pang, Lam Suet. 87 minutes. Classé Catégorie IIA. Sortie : 19 juin 2008.





mardi 17 juin 2008

Invisible target


Quand Benny Chan ne tourne pas avec Jackie Chan, il met en scène les jeunes acteurs qu’il a contribué à lancer : Nicholas Tse et Shawn Yue. Il faut ajouter le jeune Jaycee Chan dont le nom de famille vient directement de son papa, Jackie.

Jaycee, Shawn et Nicholas sont trois flics. Ils ne se connaissent pas mais vont être amenés à travailler ensemble lors d’une enquête aux multiples rebondissements. Une bande de truands menée par de vilains et cruels Chinois vont semer la pagaille dans Hong Kong. Cette bande des quatre est dirigée par Wu Jing, qui était déjà très méchant dans SPL, qui sert ici de modèle tout à fait assumé. Wu Jing et ses potes (dont Andy On qui ne cesse pas d’être bouffi au fil des films – faut arrêter la muscu Andy) ont attaqué un fourgon blindé et on piqué le pognon. Dommage collatéral : la fiancée de Nicholas Tse meurt dans l’attaque. Il va chercher à se venger.

Par ailleurs, Shawn Yue travaille sur une autre enquête mais il va rencontrer Nicholas dans un taxi alors qu’il poursuivait un suspect. Ils vont faire équipe. Puis viendra Jaycee. Son cas est différent, c’est un simple flic qui vit avec sa grand-mère et qui est très serviable. C’est un doux alors que les deux autres sont des excités de première qui foutent des coups de poing à la moindre contrariété. Et des contrariétés, ils vont en avoir pendant les deux heures que dure Invisible target.

En dehors de moments de comédie inhérents au genre de la comédie d’action cantonaise, il n’y a que de l’action. La comédie consiste ici à de l’humour sans grande finesse et toujours situé en dessous de la ceinture. Shawn Yue doit chier des balles qu’un méchant lui a fait avaler de force. La grand-mère de Jaycee croit qu’il aime les garçons, d’où quelques quiproquos lorsqu’il ramène chez lui ses nouveaux amis couverts de bleus et qu’ils se badigeonnent d’onguent. Faut aimer, c’est la routine, ils se sont pas cassé le cul pour les blagues.

Quant à l’action, c’est un feu d’artifices permanent. Les méchants étant très, très, très méchants, ils dézinguent à tout va. Il y a au moins quinze flics tués à chaque scène de gunfight. Etant donné, qu’il y a une scène de gunfight toutes les dix minutes, on en conclue vite que les forces de police hongkongaise doivent compter environ la moitié de la population de la ville. Mais quand on aime on ne compte pas les morts.

Quand les méchants ne tirent pas, ils font exploser à la grenade tout ce qui les gène. Et des explosions aussi il y en a beaucoup, beaucoup. Et des cascades, que les acteurs ont semble-t-il fait eux-mêmes comme l’exige la tradition de la comédie d’action dans la lignée de Jackie Chan. Elles sont bien sûr spectaculaires ces cascades. Et des poursuites, à pied, sur les toits, dans la rue, au milieu de la foule, en voiture, un peu partout, en bus avec plein d’enfants. Ça n’arrête jamais. On se demande comment ils font.

Après avoir couru, sauté d’un haut d’un immeuble, évité quelques balles, quelques grenades et d’autres objets contendant, nos trois héros vont se battre avec les méchants. Wu Jing et Andy On sont costauds et leurs coups sur les corps frêles de Nicholas, Shawn et Jaycee fait mal. Très mal. Là encore, ça n’arrête pas et ça vole dans tous les sens. Ils tombent sans délicatesse sur les tables et les chaises, sans doute le plus gros budget du film tant ils en cassent.

Entre deux explosions et trois coups de poing, il n’est pas facile de déterminer si les acteurs jouent bien. Jaycee Chan tente quelques moments de dramaturgie : il pleure deux fois. Il grimace plutôt. Il est jeune, il ne pourra que s’améliorer. En revanche, Shawn Yue est impeccable et pourrait bien devenir l’un des meilleurs acteurs de Hong Kong. En deux mots comme en cent, Invisible target est super divertissant mais tout à fait sans intérêt.

Invisible target (男儿本色, Hong Kong, 2007) Un film de Benny Chan avec Nicholas Tse, Jaycee Chan, Shawn Yue, Wu Jing, Andy On, Mark Cheng, Sam Lee, Candy Liu, Elanne Kwong, Lam Ka-wah, Lam Suet, Lisa Lu.

lundi 16 juin 2008

Soleils de demain (Shochiku)




En complément de programme du DVD d’Une ville d’amour et d’espoir, Carlotta a eu la bonne idée de mettre un court métrage de Nagisa Oshima qui présente quelques unes des vedettes montantes – ou en devenir – du studio Shochiku. C’est drôle, espiègle et très coloré. Une jeune actrice avec un parapluie rouge présente ses camarades acteurs et actrices qui ont commencé leur carrière de cinéma il y a de cela déjà 50 ans. Je n’ai reconnu aucun nom, ce qui n’est guère étonnant de ma part, mais sans doute ont-ils eu l’heure de gloire. Seul un spécialiste pourrait me le dire. Cela étant, cette abnde-annonce de six minutes présente aussi toute la variété que pouvait proposer le studio à ses spectateurs : romance, polar, chambara, comédie musicale, épopée, etc… Oshima accorde ses plans – tout est tourné en décor – à chacun des genres et le tout est très amusant.


Soleils de demain (明日の太陽 , Japon, 1959) Une bande-annonce de Nagisa Oshima.

vendredi 13 juin 2008

Loving you


C’est le premier grand rôle que Johnnie To offre à Lau Ching-wan. Le premier d’une longue série qui a continué jusqu’à Mad detective. C’est aussi pour To une manière inédite d’aborder le polar hongkongais. Il va y mettre une bonne dose de réalisme et filmer de nombreuses scènes caméra à l’épaule. Ça fait souvent penser à la série NYPB Blue.

Loving you souffre de quelques défauts importants et à commencer par son scénario. Liu (Lau Ching-wan) est un flic autoritaire et peu amène. Son travail passe avant tout et surtout avant sa femme. En fait, sa femme passe après tout. Le soir de l’anniversaire de leur rencontre, il préfère penser à autre chose. Liu trompe aussi sa femme, mais elle lui rend bien. Elle essaie de lui dire quelque chose. Il ne rentre pas chez eux. Il préfère aller baiser une jeune femme. Elle lui dira quelques jours plus tard qu’elle est enceinte… de son patron.

Le travail ne se passe pas aussi bien que voulu. Un méchant particulièrement retord (un trafiquant de drogue) découvre que les gens avec qui il traite affaires sont deux flics infiltrés. Il en abat un (une femme flic) et provoque une overdose sur l’autre. Le méchant s’enfuit après une course poursuite sur les toits (déjà, bien avant Running out of time) et Liu balance la drogue aux quatre vents. Le méchant va se venger. Liu sera attaqué violement lors d’un piège qu’on lui a tendu. Une balle se loge dans sa tête. Il ne sera plus lui-même.

Il s’agira alors de vivre avec son nouvel handicap : il boite et a perdu le goût. Métaphoriquement, il n’a plus le goût de vivre d’autant que sa femme, qui va s’occuper de lui lors de la convalescence, porte l’enfant d’un autre. Il peut tenter de refaire son couple, elle va peut-être ne pas retourner chez sa mère. Mais une chose est sûre, rien ne sera facile, surtout quand on veut l’assassiner.

La mise en scène de Johnnie To est encore très hasardeuse. Les scènes d’action sont filmées au plus près, les rendant assez invisibles pour un film hongkongais, mais cela relève de la méthode américaine. Il s’agit de plans très rapides, cut et donnant de la confusion sur l’issue du combat. Pourquoi pas.

Mais là où Loving you se fait un peu plus intéressant, c’est dans sa métaphore de la peur de la rétrocession, la naissance d’un bébé étant vue comme un saut vers l’inconnu, comme la méconnaissance de l’avenir. La femme de Liu prévoyait de partir au Canada avec son nouvel amant comme beaucoup de Hongkongais l’auraient voulu. La peur aussi des changements au sein de la police avec l’exclusion de ses prérogatives (un jeune flic est muté ailleurs malgré sa loyauté envers Liu). Enfin, dernier détail, la chute de la maison Shaw Brothers qui distribue le film. La dernière séquence est tournée dans les locaux de la TVB, la chaîne télé des frères Shaw. Tout est décombre et désolation et la production n’hésite pas à faire brûler ce décor pour les besoins de l’action.

Loving you marque la fin d’une ère. Il n’est pas encore le film de la maturité pour Johnnie To, mais il est le terrain d’expérimentations que l’on retrouvera dans ses films majeurs.

Loving you (无味神探, Hong Kong, 1995) Un film de Johnnie To avec Lau Ching-wan, Carmen Lee, Tok Chung-wa, Ruby Wong, Yuen Bun, Wong Wa-wo, Lam Suet, Alan Mak.

jeudi 12 juin 2008

Sorties à Hong Kong (juin 2008)

Missing (深海尋人)

Un film de Tsui Hark avec Angelica Lee, Isabella Leong, Chang Chen, Tony Leung Ka-fai, Chang Chen-yue, Guo Xiadong. 118 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 12 juin 2008.





mercredi 11 juin 2008

JCVD


Clint Eastwood aura attendu 52 ans et son neuvième film Honky tonk man en 1982 pour connaître la reconnaissance de la critique française, ce qui est un peu le must d’une carrière internationale, admettons-le. Jean-Claude Van Damme n’a jamais eu la reconnaissance de la critique (à part peut-être chez nanarland) et depuis près d’une décennie à peine celle du public, qui ne va même plus voir ses films. Je ne compare pas Clint à Van Damme par facétie, mais parce que les critiques qu’ils ont sur leurs films peuvent être comparées. Clint s’est fait traiter de fasciste au début de sa carrière de cinéaste. Il faut les critiques de l’époque sur Un frisson dans la nuit, son premier film. On n’en revient pas.

Pareillement, Van Damme n’a jamais la faveur de la critique. La bêtise de ses films n’y est pas pour rien. Cela est d’ailleurs largement repris dans la séquence au tribunal où l’avocat décrit comment l’acteur tue ses victimes dans les films. Mais Jean-Claude Van Damme est cependant devenu une star du film bourrin et n’a jamais été connu pour autre chose. Van Damme est-il encore aujourd’hui une star, comme veut le faire croire JCVD ? Ou n’est-il juste qu’un has been de plus qui, comme Chuck Norris, fascine les amateurs de mauvais films. Il y a là une nouvelle tendance de la cinéphilie très à la mode et assez régressive, mais parfois amusante. Van Damme est-il un bon acteur, ou même seulement un acteur ? Le film répond oui avec enthousiasme et beaucoup de mauvaise foi.

Le jeu de Van Damme n’est pas très intéressant, il essaie d’intérioriser ses émotions (scène du tribunal), son affliction (scène où on passe ses aphorismes à la télé), mais la tête est la même. Il se penche et semble réfléchir. Van Damme a aujourd’hui 47 ans et ce film tente de le réhabiliter, de redéfinir son statut actuel. La vie privée décrite dans JCVD est fausse, elle n’est pas réelle. Jean-Claude Van Damme doit donc interpréter Jean-Claude Van Damme, ce qui n’est pas une mince affaire puisque le réalisateur lui impose une image, l’image qu’il a envie que l’on retienne de la star belge. Ceci implique une vie familiale fantasmée et surtout l’absence de tout rappel de sa vie de drogué (qui lui a permis de nous offrir ces célèbres réflexions).

Question cinéma, donc acting – comme le dite Jean-Claude, JCVD regarde vers les gloires passées, c’est-à-dire son unique film avec John Woo. Il est dit deux fois dans les dialogues que John Woo aurait été amené aux Etats-Unis par Van Damme. Beau fantasme, certes. Mais pourquoi pas parler de Tsui Hark (deux films ensemble) ou Ringo Lam (quatre films ensemble) ? Parce que JCVD est un film de pur marketing. La scène inaugurale, assez médiocre et démagogique, montre un cinéaste chinois imbu de lui-même faire une scène d’action en plan séquence à notre quadragénaire dans une image d’une rare laideur. Ce dernier souffre. Car Van Damme a souffert dans ce cinéma d’action alors qu’il est un acteur shakespearien (nous dite le film épris de citation).

JCVD est le dernier avatar du cinéma post-moderne qui regarde de partout, imite tout le monde (enfin, plus exactement certains cinéastes cultes en ce moment). Sidney Lumet est allégrement cité et Un après-midi de chien imité et parodié (Soualem, très mauvais, déguisé en John Cazale). Le plus pénible est cette image sépia, couleur glauque (littéralement et figurativement) qui tend, en vain, à donner son atmosphère sombre. Hommage à Tarantino (musique en décalage avec l’action, scénario non linéaire) à Monte Hellman ou Ingmar Bergman (accident de pellicules). Le clou du film devant être le solo de Van Damme qui évoque plus largement celui de Delon dans Les Acteurs de Bertrand Blier. D’une certaine manière, ce que l’on reprochait justement à Delon dans Astérix aux Jeux Olympiques est ici érigé en génie pour Van Damme.

JCVD aurait pu être un très bon court métrage, il est un long métrage poussif pour happy few, pour ceux qui ont vu des films de Van Damme (un genre à lui tout seul) dans leur jeunesse. Le cinéphile doit-il aimer ces navets-là pour apprécier JCVD. Hélas oui. Dans quelques années, quelqu’un fera bien un film sur Ben Affleck avec lui-même jouant son propre rôle. A moins que ça n’existe déjà.

JCVD (France – Belgique – Luxembourg, 2008) Un film de Mabrouk El Mechri avec Jean-Claude Van Damme.

mardi 10 juin 2008

Running out of time + Running out of time 2


J’ai toujours trouvé que Lau Ching-wan est un acteur qui a la classe. Dans les films de Johnnie To, il a pourtant rarement eu l’occasion d’être classieux, bien au contraire, il a souvent dû endosser des rôles de débris de la société avec des costumes ridicules. De ses loques funèbres dans My left eye sees ghosts au costume étriqué dans Mad detective en passant par les fringues de racaille dans Fat choi spirit, Lau Ching-wan a eu dans les Running out of time de porter de magnifiques costumes sombres qui le mettent si bien en valeur.

Les deux films ne se valent pas. Seul l’original, avec Andy Lau, vaut beaucoup. Johnnie To en fait la matrice de ses films suivants, tout autant que dans The Mission en développant son sens inné de l’incongru. Running out of time, rattraper le temps, est un bon film même si ses défauts sont particulièrement pénibles (des ralentis en début de récit fatiguent vite), mais comparé à Running out of time 2, c’est grandiose.

Dans les deux films, Lau Ching-wan joue l’inspecteur Ho. Un homme célibataire qui s’habille très bien, en noir (toujours) et dont la fonction consiste à être le négociateur de la police en cas de prise d’otage. Ho est aussi un homme qui passe son temps à tout planifier et qui dirige sa brigade de manière très maniaque ne laissant aucune initiative. Il se comporte toujours en gentil papa avec ses subalternes mais aussi avec son patron le commissaire Wong Kai-fai (Hui Siu-hung). Leur rapport entre ces deux là sont constamment sur le registre comique, Wong jouant le trouble-fête, le monsieur catastrophe, gênant l’action de Ho.

Andy Lau sera le méchant du film. Enfin méchant, il faut le dire vite pusiqu’il va passer son temps à jouer au chat et à la souris avec Ho, sur tous les lieux possibles, dans un taxi, sur un toit, dans un bowling, dans un parking. Andy va demander de l’aide à l’inspecteur sans que Ho ne le sache, guidant l’inspecteur dans des lieux où ils ne serait jamais aller. Au programme, des déguisements et des masques. Andy Lau se grime en vieillard ou en femme. Des chausse-trappes et des pièges, un scénario en forme de jeu de pistes, ce qui permet de ne pas respecter la moindre crédibilité.

C’est cela qui est plaisant dans Running out of time et qui ne fonctionne pas dans Running out of time 2. Dans ce deuxième film, Ekin Cheng y est une sorte de magicien qui se prend pour un Robin des Bois urbain. Il est toujours suivi par un aigle lamentablement créé avec de pauvres effets spéciaux. Il y a dans Running out of time de belles idées sur l’amitié entre les deux Lau. Ils se retrouvent régulièrement dans les mêmes lieux (un taxi) et finissent par s’aider pour arriver à leurs fins. Dans Running out of time 2, il y a une tentative de créer du fantastique quand Ekin Cheng disparaît comme par magie, mais cela ne fonctionne jamais. L’équilibre qui existe dans le premier film n’est jamais présent dans le deuxième.

Essentiellement comique, l’enquête policière de Running out of time réserve aussi quelques moments de pure tendresse entre Andy Lau et Yoyo Mung dans un bus où Johnnie To les filme en silence tandis qu’il tente de s’échapper. Ce personnage de Yoyo Mung, délicat et mystérieux, tranche avec le dynamisme du reste du film. Dans Running out of time 2, c’est Lam Suet qui incarne ce mystère avec ses comportements anormaux face à Ekin Cheng. Lam Suet et Ekin Cheng jouent à pile ou face et Lam Suet perd toujours. Mais, cela ne mène à rien.

A la limite, on pourrait presque croire que To a sabordé lui-même le second film, laissant la réalisation à Low Wing-cheong, qui fût son assistant sur le premier. Il refait, sans conviction, la même chose. Bref, Running out of time est l’un des films les plus équilibrés, les plus drôles et scénaristiquement les plus malins et amibtieux de Johnnie To.

Running out of time (暗战, Hong Kong, 1999) Un film de Johnnie To avec Lau Ching-wan, Andy Lau, Yoyo Mung, Waise Lee, Hui Siu-hung, Lam Suet, Ruby Wong.

Running out of time 2 (暗战2, Hong Kong, 2001) Un film de Johnnie To et Low Wing-cheong avec Lau Wing-chan, Ekin Cheng, Kelly Lin, Hui Siu-hung, Lam Suet, Ruby Wong.

dimanche 8 juin 2008

Les Orphelins de Huang Shi


Les films inspirés d’histoire vraie ont tous l’ambition d’être réalistes, ou au moins crédibles. Les Orphelins de Huang Shi a cette ambition. Le récit de cette production pour le moins hétéroclite (un cinéaste canadien, deux acteurs chinois du cinéma hongkongais, des fonds chinois, allemand et australien) se déroule pendant la deuxième guerre mondiale. Les Japonais (seule l’armée est visible) occupent la Chine tandis que les Chinois, divisés, tentent de s’unir contre eux en suspendant leur guerre civile.

George Hogg (Jonathan Rhys-Meyers) est un journaliste anglais venu faire un reportage sur le conflit. Il va être pris sous les feux des différents combattants. George parle japonais ce qui lui permet de se défendre lorsque les Japonais l’arrêtent. Ils le prennent pour un espion, vont l’exécuter mais il est sauvé par Chen (Chow Yun-fat) un communiste. Sur les conseils de ce dernier, il va dans une maison qui s’avère être l’orphelinat de Huang Shui.

Là, les enfants sont en mauvais état. Ils souffrent de malnutrition, ils sont sales et ils sont seuls et apeurés. George ne veut pas s’occuper d’eux mais très vite il va se donner comme mission de leur rendre la vie meilleure. Il commence par leur apprendre l’hygiène (ils ont des poux), puis à leur apprendre quelques rudiments d’anglais (ils ne savent même pas le parler ces ringards) et accessoirement le basket-ball. Ce brillant journaliste décide aussi d’assurer leur autosuffisance alimentaire en créant de toute pièce un jardin potager grâce à l’aide de Madame Wang (Michelle Yeoh). Cet homme regorge de talents.

Dans l’orphelinat il rencontre une femme médecin blonde qui parle chinois dont il tombera bien entendu amoureux. Lee (Radha Mitchell) n’est là que pour apporter une vague touche féminine qui fera que l’homme pourra s’accomplir dans tous les domaines. Quant aux enfants, ils sont tous mignons et attentifs aux leçons du maîtres, tous sauf un qui ne comprend pas le bien que l’occidental peut apporter à l’oriental. Qu’on se rassure, cet adolescent ignare mourra dans d’atroces souffrances.

Tel le grand Timonier, George va avec les enfants traverser une bonne partie de la Chine pour amener ses enfants en lieu sûr. Les conditions ne sont pas si dures que ça car ils n’ont jamais faim (on ne les voit d’ailleurs jamais manger), ne sont pas fatigués et Jonathan Rhys-Meyers est toujours très bien rasé. Cette longue marche ne doit à vrai dire rien à Mao mais tout à Marco Polo et à sa route de la soie. On est donc dans une occidentalisation des rapports.

Les Orphelins de Huang Shi c’est la bonne conscience européenne dans les paysages grandioses chinois. Le film est très rarement crédible et ressemble à un long téléfilm étalé sur deux heures. Autant dire que c’est très ennuyeux et totalement inutile. Jamais le film ne réussit à créer la moindre émotion malgré son pathos. D’ailleurs même les acteurs semblent se demander ce qu’ils font dans cette entreprise.

Les Orphelins de Huang Shi (The Children of Huang Shui, Chine – Allemagne – Australie, 2007) Un film de Roger Spottiswoode avec Jonathan Rhys-Meyers, Chow Yun-fat, Michelle Yeoh, Radha Mitchell, Guang Li.

vendredi 6 juin 2008

La Source thermale d'Akitsu


C’est un film en costumes. C’est un film en couleurs. C’est le centième film de l’actrice Mariko Okada. C’est leur rencontre entre eux deux, une rencontre fructueuse qui va les emmener à travailler souvent ensemble, et plus si affinités. C’est Mariko qui produit ce film et qui en fait les costumes, cela s’appelle La Source thermale d’Akitsu et c’est un film sublime.
C’est surtout un mélodrame, un vrai, un pur, un beau qui se déroule sur près de deux décennies et qui va mettre à l’épreuve la passion réciproque mais contradictoire de Shinko (Mariko, donc) et Shusaku Kawamoto (Hiroyuki Nagato). Ils se rencontrent quelques semaines avant la fin de la guerre. L’Empereur n’a pas encore capitulé. Lui est malade, il est soldat, il se traîne. Une femme O-Tami (Sumiko Hidaka) lui donne comme conseil d’aller se faire soigner dans les bonnes eaux de la source thermale d’Akitsu. Ce qu’il va faire. Il y rencontre Shinko qui tient l’auberge. Elle est jeune, elle a 17 ans et ils tombent amoureux l’un de l’autre. Enfin, tout cela est un peu plus compliqué comme va nous le démontrer de manière magistrale la mise en scène de Yoshida.
Shusaku quitte Akitsu. Il n’est plus malade. Il part en ville. Il devient alcoolique, il pense à Shinko et va la voir dans sa campagne. C’est une autre époque, les soldats américains sont là, ils amènent leur modernité, leur nouveauté, leurs mœurs, mais Shinko ne bouge pas. Elle reste la même avec son kimono traditionnel et propose à Shusaku le rituel du double suicide. Ils vont au bord de la rivière et se préparent à se noyer. Mais Shinko sait nager, Shinsaku sort des cordes de son manteau pour se lier et plonger. Devant le ridicule de la scène, ils se mettent à éclater de rire. Yoshida dédramatise la scène. Du cliché, il fait une scène comique dans une volonté de faire exploser le genre mélodramatique.
La musique a une grande importance dans le film. Elle est composée par Hikaru Hayashi. Son omniprésence donne un effet inattendu. On y entend des violons larmoyants voire mièvres qui soulignent l’effet mélo puis souvent la partition atteint une gravité quasi insoutenable pour le spectateur qui annonce un élément purement dramatique. On y est pris au ventre, on sait que l’on va entrer dans une phase de malentendu entre les deux protagonistes. On sait que c’est à ce moment là que les décisions qu’ils vont prendre ne seront pas bonnes et qu’elles vont aller à l’encontre de leur bonheur.
L’essentiel de la mise en scène de Yoshida est de filmer son actrice et héroïne. Il la filme sous toutes les coutures dans de superbes travellings à travers la campagne japonaise où les cerisiers sont en fleurs. Ses kimonos évoquent sa condition de femme de l’ancien temps, d’avant guerre et les années 1950 puis 1960 n’entameront en rien sa passion interdite pour Shusaku qui, entre temps, s’est marié et a eu une fille. Leurs scènes communes sont pour la plupart filmées dans l’auberge que tient Shinko. Les portes coulissantes sont autant de barreaux qui l’enferment dans une prison. Les champs contrechamps sont filmés à deux personnages mais un des personnages est filmé de dos.
Le drame de Shinko est qu’elle ne rend pas compte qu’elle est en train de sombrer. Elle va perdre son sourire et sa joie de vie au fur et à mesure que sa déception augmente. Elle va se mettre à boire alors que lui s’est arrêté, elle va se mettre à fumer, puis elle n’aura presque plus figure humaine. Ses cheveux seront défaits, son sourire éteint. C’est tragique mais c’est sublime.
La Source thermale d’Akitsu (秋津温泉, Japon, 1962) Un film de Yoshishige Yoshida avec Mariko Okada, Hiroyuki Nagato, Sumiko Hidaka.

jeudi 5 juin 2008

La Fin d'une douce nuit


Yoshishige Yoshida, Acte III. Je reprends ma phase de découverte du cinéaste japonais en regardant ses films par ordre chronologique. Pour l’instant ça va.
Ce qu’il y a de frappant dans son troisième film, ironiquement titré La Fin d’une douce nuit, c’est sa rapidité. Le premier quart d’heure va à une vitesse folle et je dois avouer que je me suis un peu surpris à lire la jaquette du DVD pour comprendre. Je ne devrais pas faire ça, mais j’ai parfois un peu de mal avec les acteurs japonais. J’ai surtout du mal à les reconnaître. Et ensuite à distinguer les personnages, d’où parfois ma confusion pour comprendre un scénario même linéaire.
Ça commence par le personnage principal qui se fait lourder par sa copine parce qu’elle va se marier avec un autre. Ils sont allongés dehors sous le ciel bleu d’hiver. D’ailleurs, la fille parle du ciel bleu d’hiver. Ils partent, c’est elle qui conduit la voiture, elle le lâche en ville sans plus de ménagement. Voici l’ambition de Jirô : essayer de trouver une femme pour se marier. Voici son destin : se faire larguer. Dès la première séquence, Yoshida nous dit ce qui va constamment arriver à son personnage principal masculin.
Un accident de tunnel plus tard, tunnel dans lequel une voiture a pris feu et qui éclaire le visage de Jirô, nous nous trouvons dans un restaurant minable où il repère la jeune Harumi qui sert les repas aux clients. Jirô lui parle et la drague lourdement. Mais Harumi n’est pas douce, loin de là et sa réplique est cinglante. Ce qui constituera une nouvelle humiliation pour Jirô. Cela ne fait que commencer. Retour en ville. Jirô va piquoler dans un bar tenu par Sawako qui se trouve être la fille de son patron. Il travaille comme simple employé dans un magasin.
Un homme est saoul. Jirô l’aide à sortir du bar et le ramène chez lui. Madame Sawako lui en très reconnaissante. L’homme s’appelle Monsieur Oka et c’est un riche patron. Il travaille dans la raffinerie de pétrole (on est en plein boum économique avec de nouvelles fortunes. Monsieur Oka vit avec sa bru qui vit mal son veuvage. Jirô voit pour lui l’occasion de trouver une porte de secours pour faire un bon mariage.
Dans le bar de Sawako, il a cependant entendu que la patronne recherche une jeune femme pour en remplacer une autre. Jirô prend sa moto et kidnappe presque la jeune fille. Elle viendra s’incruster chez lui, lui qui n’habite qu’une pauvre pièce sale et mal arrangée. Sa patronne va vite lui présenter l’honorable Monsieur Hondô, qui trouve Harumi très à son goût et qui va en faire sa protégée.
Tout cela se déroule en très peu de temps, le reste du film va se contenter, si j’ose dire, de faire graviter tous ces personnages dans une quête effroyable pour gagner de l’argent, pour faire l’amour et surtout pour profiter des autres. Ironie du titre, il n’y a pas vraiment de douceur dans une quelconque nuit que chaque protagoniste passera. Sawako fera de Jirô son amant mais elle traitera comme une putain en lui lançant avec mépris quelques billets. Elle est persuadée que Harumi et lui ont une liaison et va encore plus pousser la fille dans les griffes de Hondô. Puis, elle se moquera des tentatives de Jirô pour devenir le nouveau mari de Madame Oka. Elle se moquera surtout de sa vénalité.
Face à la classe dominante, nos deux pauvres (Jirô et Harumi) ne font pas le poids et fatalement vont se brûler les ailes. Non pas perdre leur innocence car ils n’en avaient déjà plus. Yoshida nous montre un monde des affaires. Il compare l’amour avec le libéralisme. Ça n’est pas glorieux. La jeunesse, c’est la vitesse. Jirô roule en moto, il va très vite, il ne réfléchit pas, il fonce, ses mots vont plus vite que sa pensée. Il n’arrive à penser que sur sa moto : belle scène sur un circuit. Les vieux riches eux sont toujours calmes, ils jouent au golf, ils sont assis et mûrissent longuement leurs sales coups. Ils ont cependant toujours une longueur d’avance. Quand Jirô croit avoir été plus malin qu’eux, Yoshida nous le montre sur une grande roue de foire foraine. Non seulement elle va très lentement, mais en plus elle tourne en rond.
La Fin d’une douce nuit est d’une grande noirceur et se termine dans un étrange sentiment de plénitude et d’amertume conjuguées.
La Fin d’une douce nuit (甘い夜の果て, Japon, 1961) Un film de Yoshishige Yoshida avec Masahiko Tsugawa, Michiko Saga, Teruyo Yamagami, Sumiko Hidaka, Osamu Takizawa, Jun Hamamura, Takamaru Sasaki, Hiroko Sugita, Reiko Hitomi, Kei Sato.

mercredi 4 juin 2008

Sorties en France (et pas à Hong Kong)


Sparrow le dernier film de Johnnie To sort aujourd’hui en France dans un réseau limité certes, mais il sort. Depuis que le cinéaste est devenu l’image-même du cinéma hongkongais, il est l’auteur favori de la presse et dans une moindre mesure du public, puisque la disponibilité des films reste un problème. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que Sparrow sorte en France puisque ses films précédents étaient sortis, sauf Linger, faut-il le rappeler. Bref, les « polars » de Johnnie To sortent en France. Pour l’instant. Ce qui surprend, c’est que Sparrow n’est pas encore sorti à Hong Kong. Il débarquera sur les écrans le 19 juin. Cette (fausse) bonne nouvelle en cache une autre, très mauvaise. La sortie de CJ7 de Stephen Chow a tout simplement été annulée. Poliment, on dira qu’elle est reportée sine die. Le dernier film de Stephen, un beau film, va sans aucun doute se retrouver directement dans les bacs DVD, avec un peu de chance. Explication : entre le moment où Sony Pictures a acheté les droits de distribution du film et le moment où les « décideurs » ont vu CJ7, il a du se passer quelques semaines. Ils ont pensé avoir acquis une nouvelle comédie d’action du cinéaste de Shaolin soccer et de Crazy kung-fu, ils se sont retrouvés devant une comédie dramatique sur la pauvreté en Chine. Et là, c’est le drame. Comment vendre le film aux fans qui attendent quelque chose qu’ils ont déjà vu ? En allant sur allociné, on pouvait voir il y a quelques semaines des bandes-annonces et de la pub. Et là plus rien. C’est un nouvel avatar de la méconnaissance crasse du cinéma cantonais. Apparemment, cela n’est pas près de s’arrêter.

dimanche 1 juin 2008

Slim till dead


La sortie d’un film de Wong Jing est toujours un évènement. Enfin presque. On peut toujours se moquer de lui, de ses méthodes et de ses choix, mais Wong Jing est encore là, à tenir le cap, à écrire des films, à en réaliser certains (de moins en moins), à en produire (une bonne moyenne de trois par an) et comme dans Slim till dead à faire l’acteur. Wong Jing est vivant et ce film sort aujourd’hui en DVD. La réalisation du film est dévolue à Marco Mak, monteur de son état, qui va filmer ce thriller comme on peut attendre qu’un producteur balourd comme Wong le souhaite : avec un maximum d’effets visuels.

Le respectable Anthony Wong campe Wong Tak, un policier qui enquête sur le meurtre crapuleux d’un mannequin. Un film est retrouvée morte et ne pesant plus que 35 kilos. Sur elle, la police trouve une étiquette sur laquelle est indiquée 70 lb (70 livres), comme si elle était une marchandise. Wong Tak est marié à Ling (Sheren Tang) qui a quitté la police. C’est une fine psychologue et sera très utile à la résolution de l’enquête. D’autant qu’une autre mannequin disparaît. La mort rode. Très vite un indice vient aider Tak et son collègue Bull (Raymond Wong) : un homme, Ken, devient le suspect numéro un.

L’enquête doit vite avancer car il y a le concours de beauté organisé par une célèbre marque internationale de produits amaigrissant qui se prépare. Pour coacher les filles, entre en scène Cheerie (Cherrie Ying) qui tient un magasin de diététique et de beauté. Sa clientèle devient rapidement des proies potentielles pour le tueur en série. Ken devient introuvable, mais Cheerie sait où il se trouve : il est tombé amoureux d’elle et tente de la séduire. Toute cette histoire de meurtres va suivre son cours, avec son lot de courses poursuite, de chausse-trappes, de faux indices et une résolution de l’intrigue qui est assez facilement devinable. Oui, on peut deviner avec un peu de jugeote qui tue toutes ces mannequins. On est dans une production Wong Jing quand même.

Mais ce qui est intéressant dans Slim till dead s’appelle Anthony Wong. L’acteur est souverain et s’en donne à cœur joie. Non pas qu’il cabotine mais sa partition est souvent du ressort comique comme dans la scène où il veut faire l’amour à sa femme et qu’elle se refuse à lui. C’est évidemment lui le seul personnage important du film. D’ailleurs tous les autres acteurs paraissent d’une grande fadeur à côté de lui, même si avec beaucoup de générosité, il parvient à les mettre en valeur. Il ne faudra pas oublier non plus la parodie du film de Fruit Chan Nouvelle cuisine où Crystal Tin imite à merveille Myriam Yeung.

L’autre attrait de Slim till dead est ailleurs et il est bien plus vénal. Il s’agit pour Wong Jing de mettre le plus d’actrices jeunes et jolies en bikini. Les spectateurs amateurs de beautés chinoises pourront facilement se rincer l’œil. Marco Mak filme ses actrices comme dans un clip avec des filtres bleus d’un mauvais goût assez prononcé. Tout cela est un pur produit Wong Jing.

Slim till dead (瘦身, Hong, Kong, 2005) Un film de Marco Mak avec Anthony Wong, Sheren Tang, Cherrie Ying, Raymond Wong Ho-yin, Crystal Tin, Zuki Lee, Vonnie Lui, Wong Jing, Jing Gang-shan, Andrew Wu.