mardi 30 septembre 2008

Phantom lover


Ronny Yu adapte dans Phantom lover le mythe du fantôme de l’opéra. Il faut dire qu’il s’y connaît en film de fantôme puisqu’il tourne ce film juste après ses deux Bride with white hair. Il utilise une nouvelle fois Leslie Cheung dans le grand rôle de l’amant défiguré qui va hanter un théâtre de sa présence.


Il faut cependant signaler que Leslie Cheung n’apparaît que peu dans le film bien qu’il soit en tête d’affiche. De plus, la plupart du temps, il est caché par une longue cape et son visage est à peine visible. Il sera dans toute la deuxième partie du film, celle où il est un fantôme (réel ou non) dans un quasi obscurité. Son personnage, Song Tangping, est celui d’un immense dramaturge, en l’occurrence il interprète Shakespeare et plus précisément Roméo et Juliette.


Le film se déroule en 1936. Une troupe de théâtre sans le sou et sans engagement précis a acquis les ruines d’un théâtre conçu et créé par Song Tangping quelques années auparavant. Le théâtre est aujourd’hui délabré, dans un état pitoyable et les toiles d’araignées ont tout envahi. Un des jeunes acteurs de la troupe, Waiching, aperçoit une ombre puis rencontre l’intendant du lieu qui lui raconte la triste histoire de Song.


Jusqu’alors, Phantom lover était filmé en sépia, pour donner une illusion de noir et blanc. Paradoxalement, le passé est filmé en couleur dans un style flamboyant, bien qu’un peu kitsch, il faut tout de même l’avouer. L’homme raconte cette histoire où Song Tangping jouait Roméo et où une jeune femme de bonne famille venait chaque soir l’écouter. Ils tombèrent amoureux, mais le père de la belle en avait décidé autrement et l’avait promise en mariage à un riche homme d’affaires.


Le soir du mariage, elle n’est plus vierge, le mari veut la répudier. Lui et son père profite de leur colère pour détruire le théâtre de Song en l’incendiant. Le comédien y meurt brûlé vif. La femme en devient folle et croit voir Song Tangping dans le personnage de Waiching.


C’est bien entendu une histoire très romantique et qui s’ancre dans la tradition gothique. Le théâtre, en tant que décor, n’est pas dans la tradition chinoise, il est au contraire issu de l’architecture occidentale avec un dôme de verre. La lumière du film (sépia je le rappelle) est pour beaucoup dans l’atmosphère lugubre du film. En revanche, il y a toujours le problème de la musique. C’est un problème, non pas parce qu’elle est composée de synthé comme dans beaucoup de films de Hong Kong de cette époque (et encore maintenant). Plutôt, la pièce Roméo et Juliette est jouée en chansons. Et elles sont très sirupeuses dans la grande tradiction du slow de la cantopop. Là, le kitsch est assez horripilant, et la douce voix de Leslie Cheung n’y peut rien.


Phantom lover (夜半歌声, Hong Kong, 1995) Un film de Ronny Yu avec Leslie Cheung, Ng Sin-lin, Huang Lei, Lau Lam, Roy Szeto, Tina Lau, Bao Fang, Phillip Kwok, Wong Bing.

samedi 27 septembre 2008

Histoire écrite sur l'eau



Cette histoire écrite sur l’eau est celle d’un col blanc tout ce qu’il y a de plus normal qui s’apprête à se marier. Mais il va épouser la fille de son patron. Une lettre anonyme trouvée dans le tiroir de son bureau lui annonce que sa fiancée n’est plus vierge. Lui-même l’est et n’envisage pas de coucher avant le mariage. Pourquoi ? Il commence à s’interroger sur cette idée de virginité et se rappelle quelques souvenirs familiaux.

C’est l’eau qui est élément déclencheur de ses souvenirs. Ce qu’il se rappelle le plonge dans un état d’étonnement. Il se rend compte que sa mère a eu une grande influence dans son choix, qu’elle lui tenait tout un discours à ce sujet et qu’il a suivi ses conseils jusqu’à devenir un homme totalement effacé. Pour oblitérer sa peur du sexe et de la sexualité, il va aller voir une prostituée et va semble-t-il en tomber amoureux. En vérité, c’est sa mère qu’il aime par-dessus tout. Inceste, j’écris ton nom.

La mère est incarnée par Mariko Okada, l’épouse de Yoshida. Elle est magistrale en femme castratrice. Pas de dialogues surabondants dans Histoire écrite sur l’eau. Au contraire, tout passe par l’image. Les flash-back invoquant l’inceste sont toujours amenés par l’eau, l’élément maternel chaque fois que notre héros va quelque part. Okada avance avec son ombrelle (elle fait de l’ombre à la vie de son fils), elle est admirée par ses camarades de classe, elle ne fait pas son âge. Cette ogresse si calme est l’atout majeur du film. D’ailleurs, le calme sous la tempête est un effet de mise en scène qui fait froid dans le dos.

Le cadre des plans est d’une rigueur exceptionnelle. Pour utiliser un cliché, chaque plan est un tableau. Et ce n’est rien de le dire. La lumière, notamment sur les visages, abasourdit. Quelle beauté. Dans la dernière demi heure, le film bascule dans la noirceur la plus effarante. Une séquence onirique (l’inceste) finit d’achever le spectateur.

Histoire écrite sur l’eau (水で書かれた物語, Japon, 1965) Un film de Yoshishige (Kijû) Yoshida avec Mariko Okada, Ruriko Asaoka, Yasunori Irikawa, Isao Yamagata, Shin Kishida.

vendredi 26 septembre 2008

Sorties à Hong Kong (septembre 2008)

Painted skin (畫皮)
Un film de Gordon Chan avec Zhou Xun, Chen Kun, Vicki Zhao, Donnie Yen, David Leong, Betty Sun. 103 minutes. Classé Catégorie IB. Sortie : 26 septembre 2008.










jeudi 25 septembre 2008

Sorties à Hong Kong (septembre 2008)

Connected (保持通話)

Un film de Benny Chan avec Louis Koo, Barbie Shiu, Nick Cheung, Liu Ye, Fan Siu-wong, Eddie Cheung, Flora Chan. 125 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 25 septembre 2008.







mercredi 24 septembre 2008

Les Arts martiaux de Shaolin


Je n’ai pas très envie d’écrire en ce moment. Je n’ai pas très le goût de regarder des films. Regarder quoi ce soir ? Un film horrifique japonais ou autre chose ? J’ai un tas de dvd qui m’attend sur un coin de mon bureau. Ils n’espèrent qu’une chose : être vus enfin depuis le temps qu’ils prennent la poussière. Bon, j’exagère un peu mais à peine. C’est par vague l’envie de cinéma cantonais ou autre. Bon, aujourd’hui, je me suis déplacé pour aller voir Entre les murs, notre Palme d’or française depuis 21 ans. J’ai aimé mais ça m’a déprimé. Autre sujet de déprime : la sortie du naveton Le Royaume interdit, horrible compilation de morceaux choisis du wu xia pian pour ados américains. J’en ai déjà parlé il y a trois mois.


Je me suis regardé ce soir un autre film avec Jet Li, Les Arts martiaux de Shaolin. Bon, c’est un peu niais, je dois avouer. L’histoire est assez banale mais il y a Jet Li tout gamin et le savoir-faire de Liu, même si c’est un Shaw Brothers en mandarin et d’une époque où la compagnie allait bien mal. J’en ai déjà parlé aussi de cette fameuse concurrence avec la Golden Harvest. Je ne vais pas radoter. Je crois aussi que j’ai commencé à apprécier le cinéma de Hong Kong grâce à Jet Li et sans doute avec son premier film Le Temple de Shaolin.


Là, Jet Li est un jeune moine de Shaolin du Nord. Il est orphelin et va chercher à se venger. Il est comme il se doit très indiscipliné et fougueux mais plein de générosité (voir la séquence où il frappe un arbre jusqu’au sang pour exorciser ses démons de vengeance puis où il récupère un nid d’oisillons qu’il va soigner.) Dans ses pérégrinations, il va rencontrer une jeune femme qui cherche à se venger de la même personne, ils vont faire un bout de chemin ensemble ainsi qu’avec un laïc. Rien de bien neuf dans le scénario, ni dans le déroulement de l’action.


On parle peu dans ce film, les scènes d’arts martiaux sont longues, jusqu’à l’écoeurement parfois. Liu Chia-liang en fait trop, il en donne pour l’argent du spectateur, j’imagine. Enfin, ce qui intéresse vraiment c’est Jet Li, et sa jeunesse. Son air de gamin comme on peut le voir sur la photo. Plus de vingt ans plus tard, il a bien entendu changé, lui et les films minables dans lesquels il joue maintenant. Dans Les Arts martiaux de Shaolin, Jet Li apparaît pour la dernière fois torse nu. Il ne le fera plus jamais après. Pourquoi ? Par pudeur ou au contraire pour se démarquer les deux sans doute.


Jet Li se déguise en femme pour duper ses ennemis lorsqu’il s’agit de passer les barrages. Et c’est drôle, loin du sérieux actuel. On sait que jamais il ne reviendra à ce qu’il a pu faire avant, jadis et à cette époque où il était svelte. Rien ne nous rendra le passé si ce n’est ces bons vieux dvd.


Les Arts martiaux de Shaolin (Martial arts of Shaolin, 南北少林, Hong Kong, 1986) Un film de Liu Chia-liang avec Jet Li.

dimanche 21 septembre 2008

Happy funeral


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Je n’ai jamais évoqué les mésaventures d’Edison Chen. L’acteur a été l’objet d’une scabreuse histoire de mœurs au début de l’année. En cause, des photos personnelles de lui en train de faire l’amour avec des actrices connues de Hong Kong : Gillian Chung et Cecilia Cheung, notamment. Chen avait pris ces photos et les avait stocké dans le disque dur de son ordinateur portable. Lors d’une réparation, les photos ont été volées puis divulguées sur internet. Les actrices étaient-elles au courant ? Peu importe, car à Hong Jong, et plus encore dans l’industrie du cinéma, on doit rester jeune et joli. Tout cela a été narré dans le détail sur hkcinemagic.

Pour Edison Chen et les actrices, cela est grave. Ils représentent un potentiel commercial que ces histoires de fesses sont venues contrecarrer. Gillian Chung, chanteuse ultra populaire avec Charlene Choi, a désormais quelques soucis de crédibilité dans son rôle d’actrice gentille et propre sur elle. Pour Cecilia Cheung, c’est encore pire. Elle s’est retirée du cinéma (j’espère provisoirement) pour se marier avec Nicholas Tse. Elle a eu un bébé en août 2007. Tse a exigé un test de paternité. Mais c’est pour Edison Chen que l’histoire a été catastrophique. Avant la parution des photos, il avait tourné dans Sniper. La production a décidé de supprimer la plupart de ses scènes. Le nouveau film de Stephen Fung dans lequel il devait jouer est au point mort.

C’est toute une génération de jeunes acteurs et actrices de Hong Kong qui est touchée et ébranlée dans leurs plans de carrière. Le cinéma est en crise et il est devenu de plus en plus difficile d’acquérir un statut de star. La double carrière chanteur acteur permet de développer leur talent, mais aujourd’hui que Nicholas Tse et Edison Chen sont sur la sellette, il n’y a plus guère que Louis Koo et Daniel Wu pour représenter cette génération arrivée après la rétrocession.

Le cas du film de Barbara Wong est intéressant. Il n’y a pas de nom connu dans sa distribution. Le film est une sorte de suite de son film phénomène Truth or dare : 6th Floor Rear Flat en date de 2003. D’ailleurs le titre en chinois de Happy funeral est le même avec juste un 2. Wong a engagé de jeunes chanteurs issus de la chanson ou du hiphop cantonais (l’un des rares intérêts du film est d’y entendre du cantorap). Deux actrices montantes complètent la distribution. Les personnages y parlent essentiellement de réussite au travers d’une métaphore lugubre : celui de l’enterrement. Il est possible d’y voir une allusion à cette nouvelle génération qui tente de s’en sortir avec ses moyens jeunes et fun.

A ce titre, la présence d’Eric Tsang est significative. Il est dans le cinéma depuis plus de trente ans et est toujours actif. Mais il représente la vieille école. Dans son rôle, la bande de jeunes lui demande de financer leur projet. Il s’y refuse d’abord mais doit bien comprendre qu’ils ont raison et que ça marche. Seulement voilà, on dira que dans l’autre film de Barbara Wong, on a déjà oublié les acteurs. Et de Happy funeral, qu’il est bien mou, très à la mode (on filme au caméscope) et complètement anecdotique. On y rit un peu (la scène d’enterrement de la grand-mère du copain de Tian Yuan), on est vaguement émus lors de celui de Suzy la mémé qui leur loue l’appartement bon marché qui donne son titre aux films. Finalement, la nouvelle génération est bien pâle et il n’est pas certain qu’elle puisse remplacer la vague d’Edison Chen.

Happy funeral (六樓后座2 家屬謝禮, Hong Kong, 2008) Un film de Barbara Wong avec Elanne Kong, Tian Yuan, Law Chung-him, Donald Tong, Siu Yeah-jim, 6 Wing, C. Kwan, Candy Hau, Eric Tsang, Tang Chi-fung, Stephanie Cheng, Philip Ng, Raymond Wong Bak-ming, Karena Lam, Candy Lo, Lawrence Chou, Sammy.

vendredi 19 septembre 2008

Sorties à Hong Kong (septembre 2008)

The Forbidden legend of sex & chopsticks (金瓶梅)

Un film de Chin Man-kei avec Hikaru Wakana, Kaera Uehara, Lam Wai-kin, Chui Siu-keung. 94 minutes. Classé Catégorie III. Sortie : 19 septembre 2008.







mardi 16 septembre 2008

Le Sens du devoir II



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D’accord, c’est le numéro deux, mais dans ce cas-là pourquoi est-il copyrighté en 1985 alors que le numéro un date de 1986. Il y a des énigmes comme ça que je ne peux pas expliquer. Yes, Madam semble être sorti avant Royal warriors et ça se sent dans tout le film qui lui est supérieur. Ou alors, tout simplement ne faut-il pas tenir compte des titres français.

Au centre du film, il y a bien entendu Michelle Yeoh (Kheng dans le générique du film) qui est la fliquette sans peur et sans reproche. Elle va pour arrêter un exhibitionniste quand elle comprend que dans la rue d’à côté, un cambriolage à mains armées est en tain d’être commis. Ni une ni deux, elle saute de la voiture, court très vite et va défendre la loi avec son flingue chargé dans la main. Les méchants sont retors et ils s’enfuient après avoir dézingué quelques personnes. Retour au commissariat : tout le monde la félicite. Elle se voit adjoindre un co-équipier, qui se trouve être une femme, Cynthia Rothrock.

Entre temps, on aura fait la connaissance du responsable en chef du cambriolage. C’est Monsieur Tin (James Tien), un homme d’affaires véreux qui veut récupérer le microfilm d’un contrat bidon. Ceci est le macguffin de Yes, Madam. James Tien ricane de manière sardonique, il est le méchant typique qui n’hésite à faire tuer n’importe qui pour arranger ses magouilles et c’est ce qu’il fera tout au long du film. C’est l’ennemi de la loi. (Le final à ce titre approuve le fait de faire justice soi-même, sans doute une des fins les moins intelligentes du cinéma d’action).

Entre les flics et les mafieux, trois pauvres cloches : Tsui Hark, Mang Hoi et John Sham. Ce trio forme l’atout majeur de Yes, Madam, ce par quoi le film restera digne et surtout drôle. Mang Hoi et John Sham sont deux voleurs. Au début du film, ils rentrent dans une chambre d’hôtel luxueux et volent le portefeuille d’un Américain. Or, le microfilm se trouve dans ce portefeuille. Tsui Hark fabrique des faux passeports et justement il va trafiquer celui de l’Américain et le vendre à un sbire de James Tien. Mal leur en prendra puisqu’ils vont être confrontés à la fois à la police et au parrain.

C’est surtout le personnage de Tsui Hark qui est plaisant. Il est habillé d’une salopette bleue et coiffé d’un casque avec une lampe qui lui permet de bien voir les faux passeports qu’il produit. Mais c’est son jeu qui est le plus étrange. Il semble constamment sur des braises, il bouge sans arrêt tout son corps. Il apparaît excité comme un puce, à la limite de l’hystérie. Il joue un fou furieux qui ment à tout le monde et qui vit dans un taudis aux pièges multiples. Tsui Hark est un élément comique assez fort. J’imagine tout à fait qu’il pourrait aussi pénible sur les tournages de ses films.

Encore dans le registre comique, Sammo Hung, David Chiang et Richard Ng jouent trois papis dans une maison de retraite, dans une courte apparition. Wu Ma un policier acariâtre. Le reste est de l’action avec un scénario irréaliste. Ils sont là histoire de mettre le pied à ‘étrier aux deux actrices et les placer dans leur lignée. Le combat final va à Michelle Yeoh et Cynthia Rothrock qui fouttent des coups aussi violents que d’autres dans pas mal d’autres films. Un film qui fleure bon les années 1980.

Le Sens du devoir II (Yes, Madam, 皇家師姐, Hong Kong, 1985) Un film de Corey Yuen avec Michelle Yeoh, Cynthia Rothrock, Mang Hoi, John Sham, Tsui Hark, James Tien, Dick Wei, Chung Fat, Wu Ma, Dennis Chan, Richard Ng, Sammo Hung, David Chiang, Eddie Maher, Michael Harry, Fruit Chan.

lundi 15 septembre 2008

Le Sens du devoir


C’est drôle de voir Michelle Yeoh dans un film qui date déjà de plus de vingt ans. Elle est méconnaissable. Aujourd’hui, la pauvre, elle est obligée de jouer dans des Momie 3 ou autre Babylon AD. Son visage est d’une tristesse incroyable, d’une mélancolie qui exprime toute la détresse de l’actrice cascadeuse depuis qu’elle est passée à Hollywood, section série B et films d’action à franchise. Pas un seul rôle à la mesure de la beauté de son visage quadragénaire. Elle pourrait jouer des personnages de mère, d’amoureuse, mais non, elle fait des figures de sage, de mystique. Mais c’est son visage qui veut cela. Regardez donc ce visage qui illustre ce texte. On ne la reconnaît pas.


A l’époque de Royal warriors (le titre se rapporte à la police royale), Michelle Yeoh s’appelait Michelle Kahn et elle était cascadeuse. D’une certaine manière Ann Hui a retracé ses débuts dans son film Stunt woman. L’idée principale du film est de faire de cette cascadeuse une actrice d’action. Après tout, Meng Hoi et Mars, comme d’autres encore (Blackie Ko) ont eu leur chance et ont fait une petite carrière dans le cinéma d’exploitation cantonais. Problème majeur : Michelle Yeoh ne parle pas cantonais, ce qui n’est pas très grave en soi, elle sera longtemps doublée et apprendra la langue. Donc, non seulement on ne reconnaît pas son visage mais pas non plus sa voix.


Mais on ne demande pas à l’actrice de parler, c’est une action beauty et elle va se battre, éventuellement tomber amoureuse. En l’occurrence de Michael Wong, le beau gosse de service, cet acteur mal vu à Hong Kong parce que métis, et surtout un des acteurs les moins intéressants de l’époque. Royal warriors, c’est un condensé en 90 minutes de toutes ces années 1980 dans l’industrie du cinéma cantonais. La musique au synthé qui ne s’interrop jamais et qui surjoue chaque scène. Musique rigolote pour les scènes d’humour, gros clavier larmoyant pour les scènes d’émotion, rythme trépidant pour les scènes d’action. Ça commence dès le début, au Japon, dans une séquence avec ces fringues typiques, ces épaulettes compensées. C’est drôle.


Ça continue dans un avion, où les trois personnages principaux sont réunis. En plus de Yeoh et de Wong, il y a l’acteur Henry Sanada. Dans l’avion, des méchants veulent libérer un des leurs que l’on extrade à Hong Kong. Il s’était fait serment dans une guerre (laquelle ?). Baston dans l’avion. Car, oui, la seule chose qui compte dans ce film au scénario aussi épais qu’un papier à cigarette, c’est la baston. Evidemment dans un avion c’est impressionnant. On tire des coups de feu, on tue, on casse un hublot. De retour à Hong Kong, les méchants traquent nos trois amis : explosion de voiture et autres belles choses. Oui, seule l’action compte. Il faut aimer ça pour aimer Le Sens du devoir.


Le Sens du devoir (Royal warriors, 皇家戰士, Hong Kong, 1986) Un film de Paul Chung avec Michelle Yeoh, Henry Hiroyuki Sanada, Michael Wong, Eddie Maher, Suzuki Hirmichi, Blackie Ko, Kenneth Tsang, Dennis Chan.

vendredi 12 septembre 2008

Coq de combat (Shamo)


C’est vraiment une bonne nouvelle que le dernier film de Soi Cheang arrive en France, même en DVD, moins de six mois après sa sortie en salles à Hong Kong. Coq de combat, voilà comme s’appelle aujourd’hui Shamo, inspiré d’un manga japonais, sans soute très populaire. En tout cas, le film est brutal et aussi désespéré que Dog bite dog.


Coq de combat inaugure son récit par des plans très calmes de la campagne. Une gentille famille mange. Papa, maman, la petite sœur et Ryo (Shawn Yue). Le repas est silencieux et un plan d’ensemble nous montre une belle flaque de sang sous les parents. Ils viennent d’être tué par le fiston qui reste sans bouger. La fille ne dit rien non plus. Ryo se fait arrêter par la police, parce qu’il est mineur (il est censé avoir seize ans), il est jugé en tant par la justice juvénile et écope d’une peine de deux ans de prison. L’incarcération ne se fera pas dans la joie. Le directeur est un sadique qui ne rechigne pas à bastonner Ryo, à le laisser les autres détenus torturer l’adolescent, et à l’humilier. Quelques scènes sont très dures, comme celle où Ryo est attaché et bâillonné et que le directeur lui apporte un délicieux repas qu’il ne peut pas manger.


Le jeune homme reçoit la visite de sa petite sœur. Elle lui annonce avec beaucoup de gentillesse qu’elle a été placée en foyer mais qu’elle va s’en aller de cette famille d’accueil. Pour gagner sa vie, grâce au crime de son frère, elle devra se prostituer. Bonjour l’ambiance familiale. Justement, se trouver une famille de remplacement est l’un des objectif de Ryo. Dans la prison, il trouve un ami, un bon petit gros qui le soutient et qui le vêtit quand les autres humilient Ryo. Cela arrive deux fois dans le film, en prison après une scène de torture, plus tard lors d’un combat où il se fait humilier par des gardes du corps. Puis le personnage de Francis Ng arrive. Il porte un uniforme rouge (un condamné à mort : il a assassiné le Premier Ministre) alors que les autres uniformes sont oranges. Francis Ng va enseigner à Shawn Yue le karaté (je rappelle qu’on est au Japon). Cette première partie de Coq de combat offre parmi les plus beaux plans vus dans le cinéma cantonais depuis pas mal de temps. Soi Cheang sait mettre en scène la violence et sait la magnifier, tout comme Park Chan-wook avait pu le faire dans Old boy. Certaines scènes font très mal, on ressent les coups, elles fascinent surtout. On peut citer un autre nom : Sam Peckinpah, par exemple avec sa manière de faire de gros cons violents des héros. Comme toujours, il n’est pas facile de dire que la violence peut être poétique, mais là c’est le cas, plus sans doute que Takashi Miike dans son étrange film de prison Big band love juvenile A.


Une fois sorti de prison, le personnage de Shawn Yue a grandi, il a désormais 21 ans et ses cheveux sont devenus blonds. Sa sœur est une pute accro à la drogue. Il est encore accompagné de son pote le gros. Ryo va cette fois chercher à expérimenter les leçons que Francis Ng lui a données. A partir de ce moment, le film se fait moins beau, mais reste tout autant glacial. Ryo se fait embauché pour combattre dans une ligue de boxe. Il va se battre dans le Lethal Fight, le combat à mort, que dirige Bruce Leung (qui était la « grenouille » dans Crazy kung-fu). Coq de combat enchaîne les combats, bien réglés, joliment éclairés et avec du suspense. Les sentiments entre les personnages ne sont pas les plus hauts.


C’est sans doute cela le plus étonnant dans la carrière de Soi Cheang, cette empathie pour les salauds, pour les mauvais sentiments est contre toutes les règles habituelles dans le cinéma de Hong Kong. Vraiment un auteur à suivre.


Coq de combat (Shamo, 軍雞, Hong Kong, 2007) Un film de Soi Cheang avec Shawn Yue, Bruce Leung, Pei Pei, Francis Ng, Annie Liu, Dylan Kuo.

jeudi 11 septembre 2008

Sorties à Hong Kong (septembre 2008)

Ocean flame (一半海水 一半火焰)

Un film de Liu Fen-dou avec Liao Fan, Hai Yitian, Hui Shiu-hung, Lam Suet, Monica Mok, Simon Yam, Derek Tsang. 102 minutes. Classé Catégorie III. Sortie : 11 septembre 2008.







mercredi 10 septembre 2008

Fleur secrète

Quand un film érotique tendance SM scato sort avec une belle affiche qui ne dit pas vraiment ce que le film va être, il existe un risque que les spectateurs se trompent sur la marchandise. Car l’affiche française actuelle ne ressemble pas à celle de ce film japonais de 1974. Ainsi, avec un titre aussi poétique, Fleur secrète, et une affiche romantique, il y a du Mizoguchi ou du Ozu pour le spectateur non averti, et pas une accumulation de bondage et d’humiliations. Dans la salle où j’ai vu le film, il y avait trois autres spectateurs. Le premier a pesté tout le premier quart d’heures (il y une scène innocente avec des chenilles sur le cul d’une servante où il sortait bon nombre de putain), puis a quitté la salle au bout de vingt minutes. Il y avait derrière moi, un couple de retraités. La femme est parti au bout d’une demie heure, et lui cinq minutes après. Cela ne m’a empêché de rester et de regarder le reste. Juste un petit dérangement anecdotique.


Il faut dire que Fleur secrète ne va pas crescendo dans les scènes de sexe. Ça commence tout de suite très fort avec un écran rouge, un gamin qui tient un flingue, un gros zoom sur sa mère qui se fait baiser par un GI noir du nom de Jimmy. Le gamin tire sur le mioche et on le retrouve quelques années plus tard, dans le bordel SM que tient sa vieille mère. Dans la cave, on aperçoit des filles nues attachées et bien malmenées sous le fouet de la mère et les insultes d’un client. Pendant ce temps le générique défile.


Notre héros est un jeune cadre qui vient chez maman, qui depuis ce crime est devenu impuissant et qui passe son temps à se branler chez lui. Ça ne serait pas grave s’il ne conservait pas tous les mouchoirs avec lequel il a essuyé son sperme. Son patron veut le voir. Notre employé va chez son boss. Il traite sa servante de curieuse façon, C’est l’histoire avec les chenilles qui a choqué mon voisin de cinéma. Le patron veut que son cadre dresse sa femme. En effet, il pense qu’il est adepte du SM après avoir trouvé des photos dans son bureau (quel âne, quand même !).


Voilà donc notre homme qui va capturer la femme de son patron. Et en tomber amoureux au grand dam de sa maman qui ne voit en elle qu’une salope (c’est dans les sous-titres français). La femme se soumet mais il faut se méfier. Tout le monde semble devenir fou d’une manière ou d’une autre, mais paradoxalement, le réalisateur a de la tendresse pour ses ogres. Car chacun a une bonne raison d’agir ainsi.


Pur film d’exploitation, je ne pense pas déceler un auteur chez ce cinéaste de roman porno, mais des tendances pour les couleurs rouges, et une manière toute à lui – poétique – de filmer les fleurs. Pas trop ma tasse de thé vert non plus, je ne suis pas programmateur à la CF, moi.


Fleur secrète (花と蛇, Japon, 1974) Un film de Masaru Konuma avec Naomi Tani, Yasuhiko Ishizu, Nagatoshi Sakamoto.



mardi 9 septembre 2008

The Prodigal son


Dans une petite ville de la région de Canton, comme on voit beaucoup dans ces comédies cantonaises, il était une fois un jeune homme qui était le plus grande combattant, à tel point que tout le monde l’appelait Tsan le Bagarreur. Ainsi commence l’histoire de ce fils prodigue. Il n’y a bien entendu aucun rapport avec la parabole du Nouveau Testament.


Yuen Biao est ce jeune homme impétueux et sûr de lui qui casse la figure à tous ses adversaires. C’est un champion des arts martiaux et tout le monde le sait en ville. Il est toujours accompagné de son fidèle serviteur, si fidèle qu’il organise ces faux duels, ces combats truqués pour la grande gloire de son jeune maître. Quelques mots sur ce serviteur et sur son visage : il a le crâne bien dégarni, les cheveux manquent, son visage est bouffi conséquence des coups de son maître, et il est très maladroit. Bref, ce personnage incarne le bouffon. Ce sont les parents de Yuen Biao qui sont au cœur de ce mensonge : ils pensent que leur fils est trop faible (je rappelle tout de même que c’est Yuen Biao, ils n’ont pas dû le regarder comme il faut). Ainsi quand le jeune maître va au restaurant, un homme à la mine patibulaire crée un conflit et Yuen Biao le bat très aisément.


Jusque là tout va bien. Mais un jour, une troupe d’opéra arrive en ville et tout le monde se rend au spectacle. Yuen Biao, accompagné de son obséquieux serviteur qui ne cesse de secouer son éventail pour aérer son jeune maître, vont féliciter la troupe et en particulier l’actrice principale. Ils veulent l’inviter et plus si affinités. L’actrice refuse poliment cette gentille proposition, mais devant l’insistance, elle se fâche et lui fout quelques tannées. Au bout d’un certain moment, il comprend que cette actrice est en réalité un homme. Cela dénote trois choses : il est ignorant de l’art théâtral et de cette règle que les personnages féminins sont interprétés par des hommes, il se rend compte qu’il est nul en kung-fu, il comprend que tout son entourage lui ment. Ce sont ces deux dernières révélations qui vont l’anéantir et le décider à avoir un sifu pour devenir un vrai artiste martial.


Il demande donc à l’acteur qui est Lam Ching-ying, l’homme qui deviendra plus tard le chasseur de morts vivants dans la série des Mr. Vampire. Lam refuse mais le père de Yuen Biao achète la troupe et le jeune homme devient l’assistant de Lam Ching-ying. Pour corser ce scénario, Sammo Hung ajoute un méchant (mais pas tant que ça) qui rêve de devenir le plus grand artiste martial de Chine. Ce méchant est surtout mal accompagné, car ses hommes de main sont sans pitié et sanguinaires. Sammo Hung qui, jusqu’à présent avait montré quelques beaux combats comme il sait les composer, montre une frénésie de violence brutale et le meurtre de toute la troupe. Tous se font égorger puis brûler. Lam et Yuen partent, ils s’exilent et atterrissent dans la fermer de Sammo Hung.


The Prodigal son prend alors les allures classiques du film de kung-fu où le maître forme son élève. Seulement voilà, Sammo Hung ne fait rien comme tout le monde. Lam refuse toujours d’enseigner à Yuen l’art martial. C’est Sammo qui va devoir s’en charger. Mais son personnage est celui d’un gentil gros balourd qui vit seul avec sa fille naïve et bienveillante. Sammo avait l’intention de prendre sa retraite de sifu et de se consacrer à la calligraphie, mais cette activité sera de courte durée et Yuen Biao recevra son éducation et ira combattre les méchants.


Ce qui frappe le plus dans The Prodigal son est la facilité avec laquelle Sammo Hung passe du burlesque le plus drôle aux combats les plus accomplis. Il y a une progression dans les combats puisque Yuen Biao est d’abord un ignorant des arts martiaux puis enfin un expert. Si la mise en scène est classique : filmage en plan d’ensemble avec de rares gros plans et d’encore plus rares champ-contrechamps, en revanche c’est la variation du rythme qui impressionne. Autre chose au sujet de The Prodigal son, son absence de femme. La belle actrice était un homme, la mère de Yuen Biao n’a aucune importance et enfin la fille de Sammo Hung est une boulotte peu intelligente. Le film est très masculin, très viril, ce qui ne veut pas forcément dire misogyne. Sammo préfère ne pas mettre de personnage prétexte à la romance dans un scénario qui n’en a pas besoin.


The Prodigal son (败家仔, Hong Kong, 1982) Un film de Sammo Hung avec Yuen Biao, Lam Ching-ying, Sammo Hung, Frankie Chan, Peter Chan.