Marcus Ray (Jean-Claude Van Damme) chantonne une chanson de Samuel Hui qui passe dans l’autoradio de sa BMW. Il arrive dans l’entreprise de son ami Tommy (Rob Schneider) qui vend des jean’s. Marcus arrive pour faire la traditionnelle course de pousse-pousse où il va affronter son autre ami, son frère d’adoption Eddie (Wong Wai-man) qui avait gagné l’année précédente, en trichant. La revanche va être terrible et la course se déroule dans les rues pentues de Hong Kong. Tsui Hark s’en donne à cœur joie pour trimballer Van Damme et Schneider dans une chorégraphie réglée par Sammo Hung. Il va jusqu’à humilier l’acteur belge en mettant une anguille dans les mains de Tommy pour fouetter le « joli cul » de Marcus, comme il est entendu dans les dialogues.
L’action est le moteur de Piège à Hong Kong, deuxième film américain de Tsui Hark, mais qui se déroule entièrement à Hong Kong au moment-même de la rétrocession de Hong Kong à la Chine. Les festivités doivent battre son plein, le Prince Charles et le Président chinois sont attendus dans la colonie britannique. Les feux d’artifice de la cérémonie vont être lancés et Tsui Hark va faire exploser bon nombre de bâtiments et de bateaux avec le macguffin du film : une nano-puce que les méchants placent dans de nombreux objets pour pouvoir les faire exploser en demandant une rançon. Des flammes vertes s’enflamment à peu près toutes les vingt minutes après une course poursuite à pied, en pousse-pousse, en voiture, en camion ou en hors-bord et encore après une baston. On sort épuisés du film en toute logique.
Ce qui intéresse apparemment Tsui Hark dans Piège à Hong Kong c’est l’idée de la contrefaçon, de la tricherie illustrée par le titre anglais, Knock off, qui est répétée toutes les cinq minutes. Tommy offre en début de film des chaussures Pumma, avec deux M. Tommy annonce à son ami Marcus qu’il travaille dans un magasin qui s’avère fabriquer des jean’s de contrefaçon. C’est pourquoi la responsable américaine vient à Hong Kong contrôler tout cela. Karen Lee (Lela Rochon) accuse les deux hommes d’être au courant de tout. Mais on apprendra vite que Tommy fait partie de la CIA et qu’il agit pour Johannson (Paul Sorvino) dont le bureau hongkongais se trouve sous la grande statue de Bouddha. Tout le monde va accuser tous les autres jusqu’à ce que chacun révèle sa vraie identité. Chacun ment, sauf le personnage de Jean-Claude Van Damme qui sera toujours à égalité avec le spectateur quand il découvre les rebondissements du scénario.
Ce thème de la tricherie généralisée peut aussi s’appliquer à la situation politique que vivait à l’époque Hong Kong. Tsui Hark filme les célébrations de la rétrocession. On connait son angoisse à ce sujet. Il l’a montrée dans Le Festin chinois puis il est parti, comme d’autres, se faire humilier à Hollywood. Il est logique qu’il décide d’humilier ses acteurs américains dans ce film. Mais il semble également dire que ces fêtes sont une contrefaçon de l’histoire. Une fête aux accents de faux-semblants où l’on ne voit jamais le drapeau en forme de lotus de Hong Kong. Mais Tsui Hark nous emmène dans des quartiers finalement peu visités, des quartiers populaires. Il filme un Hong Kong sans paillette, sans glamour, un Hong Kong plus réaliste ce qui n’est pas le moindre paradoxe par rapport à sa thématique du faux.
Tsui Hark montre qu’il aime sa ville et, autre paradoxe, ne met en scène aucune histoire d’amour entre les personnages. De l’amitié, certes, parfois trahie, parfois fausse. Mais Tommy et Marcus restent amis jusqu’au bout. Et Marcus va faire de Han (Michael Wong) son allié dans l’adversité. Puis Karen deviendra aussi leur amie. Le personnage de Karen n’entame aucune romance ni avec Marcus ni avec Tommy, bien que ce dernier soit particulièrement obsédé sexuel, comme on le voit en début de film avec les pom-pom girls. Il y a bien une scène entre Karen et Tommy chemise ouverte mais elle le menace avec son flingue. En fin de compte, Tsui Hark avec Piège à Hong Kong fait ce qu’il veut et surtout n’importe quoi. Il donne à voir un film qui part dans tous les sens et qui fait exploser la commande du film d’action que Hollywood a pu lui passer pour ne rendre qu’un anti-film d’action. Paradoxalement, Piège à Hong Kong s’est bonifié avec le temps notamment en ce qui concerne les scènes d’action de Sammo Hung. C’est un film d’un désespéré qui semble vouloir en finir avec Hollywood. C’est finalement assez beau cette liberté.
Piège à Hong Kong (Knock off, Hong Kong – Etats-Unis, 1998) Un film de Tsui Hark avec Jean-Claude Van Damme, Rob Schneider, Lela Rochon, Paul Sorvino, Carman Lee, Wong Wai-man, Glen Chin, Michael Fitzgerald Wong, Moses Chan, Lynne Langdon, Ray Nicholas, Jeff Wolfe, Michael Miller, Steve Brettingham, Dennis Chan,
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