Vendu comme un (vulgaire) film érotique par le distributeur (amour, luxure, trahison lit-on sous le titre) et critiqué comme tel par la presse (« thriller érotique » dans Le Monde), Lust Caution semble être fait pour satisfaire les amateurs de beautés chinoises qui iront admirer la jeune Wei Tang après avoir maté Shu Qi, Zhang Ziyi il y a quelques années.
En vérité, il doit y avoir à tout casser 20 minutes de scènes de cul dans Lust Caution, mais la force visuelle et politique de ces scènes est si imposante que l’on ne retient qu’elles. On est loin de la piteuse scène de sexe entre Lam Ka-tung et Kelly Lin dans la partie Tsui Hark de Triangle.
Ce qui frappe dans l’érotisme de Lust Caution, c’est justement son absence d’érotisme. Pas bandants pour deux sous les fesses et les poils de Tony Leung Chiu-wai et de Wei Tang. Au contraire, c’est un choc, littéralement entre les deux personnages. Un entrechoc entre l’apprentie espionne et le fonctionnaire à la solde des forces d’occupation japonaises. Dans la première scène de cul, M. Yee (Tony Leung Chiu-wai) attache avec sa ceinture Wong Chai-chi (Wei Tang) qu’il connaît sous son pseudonyme, Madame Mak. Ces gestes violents, M. Yee les reproduit de son travail où il interroge (sous la torture) ceux qui contestent la présence japonaise dans ce Shanghai sous la guerre.
M. Yee comprend son erreur, il détache la jeune femme et la baise. Vraiment, Ang Lee filme avec crudité les scènes d’amour. Il n’y a ici aucune sensualité, et donc aucun érotisme dans Lust Caution. La deuxième scène, comme la troisième, n’est pas plus jouissive pour le spectateur. M. Yee est un brutal. Les corps se mélangent. Petit à petit, on ne distingue plus à qui appartient telle jambe, telle peau, tel poil. L’idée géniale d’Ang Lee est de ne pas déterminer qui domine l’autre dans le lit.
Ces scènes de cul domineront donc tout le film et il s’agira pour Chai-chi de faire en sorte que ce soit elle qui soit sur M. Yee. Elle y arrive, mais pour cela, elle aura dû batailler ferme, à la fois face à M. Yee et face à ses camarades qui veulent l’assassiner.
Lust caution dure plus de 2 heures et demi. Avant d’accéder aux scènes de cul, il faudra pour Chai-chi approcher M. Yee. Ang Lee propose un flash-back qui commence quand Chai-chi est une jeune étudiante naïve. Elle rencontre à Hong Kong des étudiants en théâtre. Elle avait fui Shanghai et la guerre. Ces jeunes gens sont en fait des résistants au Japon. M. Yee travaillait pour l’occupant, le groupe veut le tuer. Chai-chi étant la plus jolie, c’est elle qui devra le séduire.
Pour cela, elle se fera passer pour Madame Mak et deviendra une mondaine et ira régulièrement jouer au mah-jong avec Madame Yee (Joan Chen), alors qu’elle ne sait pas y jouer. Elle va tomber amoureuse de M. Yee et ne pas s’apercevoir que Kuang Yu-min (Wang Leehom) est lui amoureux d’elle. La fausse troupe retourne à Shanghai pour poursuivre sa mission et enfin ils retrouvent M. Yee.
Pour bien marquer la différence entre les rapports mondains entretenus entre Madame Mak et M. Yee, Ang Lee utilise un moyen très simple mais efficace. Tant qu’ils ne sont pas amants, il les filme en champ contrechamp. Ils sont séparés. Puis dès qu’un peu de passion les lie, il les filme dans le même plan, et parfois, comme indiqué plus haut, mêlé jusqu’au point de ne plus les reconnaître.
Après, la vision politique d’Ang Lee reste commune, ou on dira classique. Il prône avec mollesse l’unité chinoise et stigmatise à peine la collaboration avec
Je ne cesserai de m’étonner de la possibilité d’Ang Lee de pouvoir passer d’univers si différents. Que peut-on rapprocher entre Le Secret de Brokeback Mountain et Lust Caution si ce n’est le secret ? Et peut-être aussi ces autres films (Garçon d’honneur par exemple), mais sans doute Ang Lee n’est pas un auteur, tel qu’on l’entend dans la critique française, mais il est déjà un excellent réalisateur. Peut être même un cinéaste.
Lust Caution (色,戒, Chine – Etats-Unis, 2007) Un film de Ang Lee avec Wei Tang, Tony Leung Chiu-wai, Joan Chen,
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