lundi 21 février 2011

Monga


La vie de gangster de Mosquito a commencé à cause d’une cuisse poulet. Mosquito (Marc Cho) a rejoint son nouveau lycée du quartier de Monga en 1986 et devient la cible des autres. Un jour, à la pause de midi, le petit caïd du bahut lui pique la cuisse de poulet que sa maman lui avait préparée. Mosquito décide de ne pas se laisser faire mais il est poursuivi. C’est là qu’il force l’admiration de Dragon Lee (Rhydian Vaughan), chef du gang qui va l’accueillir jusqu’à la fin de ses jours. Dragon Lee, chemise ouverte et coiffé d’un mulet dirige la gang du Temple composée de Monk (Ethan Ruan), cheveux rasés et dos tatoué, Monkey (Cai Changxian), petit gars trapu qui aime se battre et Ah-Po (Huang Denghui), le comique de service. Mosquito montre qu’il a du cran, qu’il sait se battre et force l’admiration des quatre autres.

Mosquito n’a que sa mère qui tient un salon de coiffure dans lequel vient le parrain Grey Fox (Doze Niu) qui l’aurait abandonnée des années auparavant. Sa famille de substitution sera donc le gang et son père par procuration sera Geta (Ma Ju-lung). Les débuts sont amusants, Mosquito et ses potes s’amusent, ils se bastonnent avec les autres en souriant jusqu’au jour où au cours d’un repas, un sbire apporte dans un journal un doigt à Geta. Là, Mosquito comprend qu’il est entré dans une organisation qu’il ne pourra jamais quitté, si ce n’est par la mort, et que c’est un univers de violence. Puis, c’est le gang qui décide de punir un jeune qui a violé la copine de Dragon Lee. Monk lui colle les lèvres et les yeux à la glue, mais le jeune meurt. La bande devra s’exiler quelques temps, histoire de leur apprendre la vie. Ce sera leur unique incartade hors du quartier, ils sont enfermés dans leur univers, dans les quelques rues qu’ils contrôlent et ne connaissent rien du reste du monde. Ils sont prisonniers de Monga.

Monga décripte les rites du gang de manière détaillée, proche de l’idée documentaire, non pas pour les glorifier mais pour en pointer le cynisme. La bande est par exemple fascinée par la manière dont les hommes de Grey Fox anticipent chacune de ses demandes. Monga agit comme s’ils n’avaient jamais vu de film de triade, ce qui est possible. Le film évoque également les premiers rapprochements commerciaux avec la Chine de Pékin, comme si Taiwan s’ouvrait pour la première fois au monde et à ses patries cousines. Mosquito et sa bande découvrent comment fonctionne le syndicat du crime. Ils découvrent aussi les femmes en allant au bordel, d’ailleurs tenu par Lu Yi-ching, l’actrice fétiche de Tsai Ming-liang. Mosquito tombe évidemment amoureux d’une pute au grand cœur, Ning (Ke Jia-yan), prisonnière de son bordel à qui Mosquito compte redonner le sourire, alors que lui-même n’inspire pas la joie de vie.

Durant ses 2h20, Monga brasse pas mal de personnages. S’il se désintéresse assez vite du sort de Monkey et Ah-Po, et s’il donne au personnage de Dragon Lee une structure classique de fils de chef, le film devient passionnant dans le destin de Monk, dont il est clairement dit qu’il ne s’intéresse pas aux filles. Son homosexualité latente, jamais avouée, est magnifiée par une image qui filme les corps de ses acteurs (surtout ceux de Monk et Mosquito) au plus près des peaux. Monk est fasciné par Mosquito, il admire sa force de caractère mais le jalouse en même temps. Quand Mosquito tombe amoureux de Ning, la prostituée malgré elle, le comportement de Monk change. Monga, dans sa dernière partie, montre les luttes de pouvoir entre triades et semble tomber dans l’écueil du genre. Cependant, le film offre de manière généreuse son lot d’humour, de larmes, de violence qui explique le succès du film à Taiwan.

Monga (艋舺, Taiwan, 2010) Un film de Doze Niu avec Ethan Ruan, Mark Chao, Rhydian Vaughan, Ke Jia-yan, Huang Denghui, Cai Changxian, Ma Ju-lung, Chen Han-dian, Doze Niu, Ke Shu-qin, Xi Man-ning, Lu Yi-ching.

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