lundi 6 avril 2009

He's a woman, she's a man


Ce désormais classique de la comédie dramatique cantonaise a du mettre un bon de temps à se faire. Eric Tsang, via sa compagnie UFO, a produit ce long métrage de Peter Chan qui savait à l’époque filmer à hauteur d’hommes ses scénarios. C’est un autoportrait inversé de Leslie Cheung que l’on peut lire dans He’s a woman, she’s a man, et pour lui aussi il fallait un certain courage pour sortir du placard.


Wing (Anita Yuen) est une jeune femme qui a la passion de la cantopop. Elle a pour idole la chanteuse Rose (Carina Lau) et cherche à tout prix à la voir, à l’approcher et à posséder des objets qui lui auraient appartenu. Rose est encore une fois gagnante du trophée de la meilleure chanteuse. Elle remercie Sam Koo (Leslie Cheung), son compositeur et producteur attitré, qui est absent de la cérémonie.


Sam Koo préfère jouer du piano (en l’occurrence Twist and shout) avec les vieux musiciens qui accompagnaient son père lui-même un chanteur connu et respecté, symbole d’une autre époque. Peter Chan brocarde gentiment le star system dérivé du marché de la cantopop en montrant tous les fans qui cherchent à vendre les objets des stars comme des reliques. Mention spéciale à la gamine qui propose aux clients le caleçon de Tony Leung. Cette partie sur le système des stars est assez intéressante.


Sam Koo est par ailleurs l’amant de Rose, mais cette liaison doit rester secrète pour ne pas blesser les fans. Ils habitent dans le même immeuble, relié par un escalier secret. Sam sent la lassitude arriver et cherche à produire un nouvel artiste. Il va faire passer un casting pour découvrir un chanteur. Yu Lo (Jordan Chan) le colocataire de Wing suggère qu’elle pourrait se faire passer pour un garçon, ne serait-ce que pour approcher Sam Koo, et par extension Rose. Mais, c’est elle, en tant que garçon, qui sera retenue.


Wing est donc maintenant un garçon. Il va s’habiller en garçon et les autres remarquent qu’il est efféminé. Auntie (Eric Tsang), le conseiller mode de Sam reste persuadé que Wing est homo. Auntie est lui-même homo et s’habille avec une grande robe blanche. Il faut remercier Eric Tsang de cette composition finalement relativement nuancée pour ce personnage de grande folle. Avec son physique, ce n’était pas évident.


Or la situation va se compliquer pour notre plus grand plaisir. Rose va chercher à draguer Wing pour rendre jaloux Sam et se fait photographier par les paparazzi. Dans le même temps, Wing va succomber au charme de Sam qui en vient lui-même à se demander s’il ne serait pas devenu gay. C’est dans cette mise en abyme de la vie privée de Leslie Cheung qu’il faut trouver les choses les plus intéressantes sur le devoir de garder secrète l’homosexualité des artistes.


Leslie Cheung n’a jamais directement et ouvertement parlé de son homosexualité. C’est dans cette période qu’il a joué des rôles plus ambiguës. Le frère efféminé qui tombe amoureux de Teresa Mo, personnage de garçon manqué, dans All’s well end’s well de Clifton Ko ou l’acteur d’opéra chinois de Adieu ma concubine de Chen Kaige. On peut bien entendu regretter que tout redevienne dans l’ordre des choses, mais quelque chose passe. Le public s’est intéressé à ce film. Du coup, d’autres films moins gracieux ont utilisé le sujet à de seules fins de pantalonnades. Peter Chan a réalisé la suite du film dans Who’s the woman who’s the man, avec Anita Mui, cette fois.


He’s a woman, she’s a man (金枝玉葉, Hong Kong, 1994) Un film de Peter Chan avec Leslie Cheung, Anita Yuen, Carina Lau, Jordan Chan, Eric Tsang, Law Kar-ying, Joe Cheung, Jerry Lamb, Lawrence Cheng.

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