Au pays merveilleux de Hollywood, on n’en finit plus de faire des remakes des « classiques » des films horrifiques. Depuis cinq ans, on aura tout eu : Amityville la maison du diable, Halloween,
Mais je reviens à The Eye. Le scénario est identique aux deux versions. Une jeune femme, la vingtaine (Angelica Lee chez les Pang, Jessica Alba chez les Français) est aveugle depuis l’enfance. Attention, elle n’est pas née aveugle. C’est pourquoi tous les espoirs pour qu’elle puisse voir à nouveau sont permis. Elle recouvre la vue après une greffe de la cornée. Passé un temps d’adaptation, elle se rend compte qu’elle peut voir les morts, et surtout les êtres qui viennent chercher les moribonds pour les amener de vie à trépas. Un psychologue (Lawrence Chou ou Alessandro Nivola selon la version) va l’aider à s’acclimater à sa nouvelle vie de voyante. Mais un jour notre héroïne s’aperçoit qu’elle voit, notamment dans les miroirs, le visage de la jeune femme qui est donneuse d’organes. Avec le psy, elle va en Thaïlande ou au Mexique (cocher la bonne réponse) pour comprendre pourquoi ceci lui arrive.
Le scénario est identique mais les ambitions divergent. Les frères Pang voulaient renouveler le film de fantômes, genre tombé en désuétude à Hong Kong, mais qui vivait à nouveau au Japon, sous des formes dégénérées (Ring, par exemple). Il s’agissait pour eux de montrer le passage entre les vivants et les morts. The Eye version Hong Kong ne fait pas vraiment peur. Le psy est très vite convaincu que la jeune femme doit rencontrer son alter ego décédée. En revanche, Moreau et Palud utilise tous les artifices classiques du montage cut pour faire sursauter. Et effectivement le spectateur sursaute dans leur The Eye, comme il le faisait dans Ils, mais sans réussir à produire une ambiance d’angoisse. Il faut dire qu’ils en mettent beaucoup plus de ces moments où la réalité se transforme en forme de flash-back ou de flash-forward, histoire de tenter de nous perturber. Si Moreau et Palud échouent, c’est que notre croyance en les morts est radicalement différente que dans le bouddhisme, car nous ne croyons pas, nous autres judéo-chrétiens, en la réincarnation.
The Eye version Hollywood met beaucoup plus de temps à s’installer. Le fait que notre héroïne soit violoniste est donné d’emblée chez eux pour évoquer les sens que Jessica Alba a développé plus que la vue. Ainsi ils peuvent jouer sur les effets sonores qui parasitent les moments horrifiques. Chez les Pang, l’orchestre dans lequel joue Angelica Lee est un orchestre de non-voyants. Ils se font plus cruels puisqu’elle est renvoyée de la formation et se retrouve toute seule, finalement bien plus seule que lorsqu’elle était aveugle. La fin de The Eye tournée par les frères Pang est là aussi bien plus noire car la jeune femme échoue dans sa mission. Difficile de dire lequel des deux est le meilleur ou lequel est le moins pire. Tout dépendra finalement de ce que l’on en attend et de son envie d’avoir un petit peu peur.
The Eye (见鬼, Hong Kong – Thaïlande, 2002) Un film d'Oxide Pang et Danny Pang avec Angelica Lee, Lawrence Chou, Candy Lo, Chutcha Ruijnanon, Pierre Png.
The Eye (Etats-Unis, 2008) Un film de David Moreau et Xavier Palud avec Jessica Alba, Alessandro Nivola, Parker Posey, Fernanda Romero, Chloe Moretz.
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