Je n’ai jamais considéré, contrairement à beaucoup de gens notamment dans la presse, que Yuen Woo-ping était ni un bon réalisateur ni le meilleur chorégraphe. Sa réussite hollywoodienne prouve pour moi qu’il a surtout su adapter sa manière de mettre en scène les combats. S’adapter aux canons hollywoodien, c’est abandonner sa propre personnalité. C’est l’une des raisons qui ont causé les échecs de Tsui Hark et John Woo, la nivélisation par le bas de Jackie Chan et Sammo Hung. Tout ça pour dire que je préfère quand Yuen Woo-ping fait le couillon avec ses frères comme dans The Miracle fighters qui est l’un de ses films les plus amusants.
L’histoire tient sur une feuille de papier à cigarette. Au 17ème siècle, l’empereur accuse Kao, un de ses fidèles (Eddy Ko), d’avoir épousé une femme d’une ethnie conquise, donc ennemie. Il l’accuse de trahison et lui demande de la tuer. Il refuse quand le sorcier chauve-souris (Yuen Shun-yi) décide de l’abattre. Kao se défend, se bat et kidnappe le prince avant de s’enfuir. L’enfant meurt et Kao devient fou. Des années plus tard, l a pris sous son aile un orphelin qui est devenu à la fois son disciple (il lui a enseigné les rudiments des arts-martiaux) et son homme à tout faire. Shu Gut (Yuen Yat-choh, le fils de Simon Yuen) est appelé ainsi parce que son nom signifie « racine » est qu’il a été trouvé au pied d’un arbre.
Malgré les années, le sorcier chauve-souris n’a jamais renoncé à trouver Kao. Il faut préciser que ce sorcier au rire sardonique (évidemment) a une grande cape qui lui permet de voler et qui cache quelques armes pour défaire ses ennemis. Sur sa tunique, au niveau du poitrail, il a un symbole du yin-yang. Il fait beaucoup de grimaces et est accompagné d’hommes de main vêtus de noir qui ont tous un sourire vicieux. Il est le mal incarné et au fil des années semblent avoir pris de plus en plus de pouvoir. Il est tellement méchant qu’il a inventé des combattants qui se trouvent prisonniers dans des jarres. Ce personnage poupon (joué par Brandy Yuen), au visage peint en blanc et aux joues et lèvres rouges, est un combattant mais sa voix fluette lui donne un air enfantin. Les méchants de The Miracle fighters sont ridiculisés, grotesques et là pour faire rire. Et effectivement, c’est très drôle.
Si les personnages de vilains sont moqués, les gentils ne sont pas en reste. Shu-gut est relativement épargné même si sa naïveté au milieu de toute cette agitation est un peu exagérée. A la mort de Kao, il trouve refuge chez deux vieux. Le vieillard est joué par Keung Kar-yan et la mémé est jouée par Yuen Cheung-yan (c’est un acteur). Ils sont extrêmement grimés pour donner encore plus de comique. Chacun habite une maison située l’une en face de l’autre séparées par une ligne rouge qu’ils s’interdisent de franchir. Seulement voilà, bien qu’ils se connaissent depuis des années, ils ne cessent jamais de se jouer des mauvais tours. Ils sont habiles à la magie. Quand la vieille confectionne des paillons de papier, elles les expédient chez le vieux qui les capture. Et ils se chamaillent comme des enfants. C’est un humour puéril et donc bon-enfant qui est à l’œuvre.
Entre les deux, Shu-gu tente de trouver sa place. Chaque vieux le considère comme un larbin et l’utilise à tour de rôle et chacun râle que l’autre l’accapare beaucoup trop. Ce qui n’empêche pas le vieil homme de lui jouer aussi quelques tours, sa spécialité étant d’animer des objets en papier. Mais devant la menace du sorcier chauve-souris qui revient à l’attaque, ils doivent s’unir. Ils vont enseigner au jeune homme leur spécialité : l’art martial de la fuite. Cela consiste à démultiplier ses jambes et ses bras, à escamoter sa tête pour tromper et égarer les adversaires. Que dire de plus si ce n’est que ce film concocté par la famille Yuen (on aperçoit même la photo de feu Simon Yuen) est un petit miracle de comédie d’action.
The Miracle fighters (奇門遁甲, Hong Kong, 1982) Un film de Yuen Woo-ping avec Yuen Yat-choh, Leung Kar-yan, Yuen Cheung-yan, Brandy Yuen, Eddy Ko, Yuen Shun-yi, Huang Ha, Tino Wong.
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