lundi 30 juin 2008
18 jeunes gens en quête d’orage
mercredi 25 juin 2008
Soif de justice
En 1984, les Espagnols savaient tous parler cantonais. C’est ce que nous dit ce film assez moyen de Sammo Hung, bien en deçà de ce qu’il a pu tourner dans cette période phare de
L’intrigue se déroule donc dans une petite ville de la péninsule. Moby (Sammo Hung) est détective privé. Plus exactement, il est le larbin de Matt. Mais les affaires ne marchent pas. L’électricité a été coupée, le téléphone aussi. Les créanciers recherche le patron de Moby et il s’enfuit laissant Moby seul. Il devient, non sans fierté, son propre patron. Un homme vient alors l’engager pour rechercher une jeune femme dont il n’a aucune photo. Moby va mener l’enquête.
David (Yuen Biao) et Thomas (Jackie Chan) sont deux amis qui vivent et travaillent ensemble. Ils font leur gym d’un même mouvement et partagent tout. Ils sont d’honnêtes commerçants et tiennent un restaurant ambulant qui fait le bonheur des Espagnols. Lors d’une visite à l’asile de fous où habite le père de David, ils font la connaissance de Sylvia. On va vite comprendre que c’est la fille qui est au cœur des investigations de Moby. Pour l’anecdote, dans cet asile on aperçoit Wu Ma qui fait l’horloge, John Sham et Richard Ng.
Je reviens à Sylvia (Lola Forner) qui est au centre d’un héritage. Sa mère avait eu un enfant avec un comte espagnol et elle serait en droit de réclamer l’héritage. Là, des méchants à la solde d’un homme qui veut s’accaparer l’argent du comte vont entrer en scène. Sylvia pour se débrouiller dans la vie est devenue pickpocket. Pour attirer les hommes, elle fait croire qu’elle se prostitue. David et Thomas vont aller plus d’une fois à sa rescousse même si elle leur en fait baver.
Le scénario de Soif de justice est constamment poussif et manque de bout en bout de souffle. Et je ne parle même pas de crédibilité. Ici, c’est plutôt la débilité des gags qui resurgit, tous plus indigents les uns que les autres bien moins élaborés que dans la « trilogie » du Flic de Hong Kong. Les trois acteurs sont allés passer des vacances en Espagne. Pourquoi pas ?
Ce qui est drôle c’est de voir tous les acteurs parler cantonais à nos trois héros. On ne sait pas tout de suite que ça se passe en Espagne, et on se demande pourquoi ils ne parlent pas espagnol. Mais non. Ensuite, ce sont les fringues qu’ils portent. Une horreur de ringardise. Mais ces fringues-là étaient à la mode en 1984. Jackie et Biao sont habillés avec des sweast shirts flashy pas franchement sympas. Et puis, ils font du skate. C’était le début du mouvement.
Sammo n’est pas en reste. Je pourrais, rien qu’avec ce film, faire une nouvelle revue de mode avec toutes les tenues qu’il porte. En plus, il a eu le bon goût de se faire une permanente du plus bel effet. Bref, Sammo porte tout et n’importe quoi ici. Il se ridiculise comme rarement, mais sans que cela produise les effets comiques dont il a pu faire preuve à de maintes reprises. C’est bien entendu très regrettable.
Restent dans Soif de justice les combats que Sammo Hung a évidemment chorégraphiés. Ils sont pour la plupart d’entre eux offerts à Jackie Chan et à Yuen Biao qui sont, comme toujours, des maîtres de l’agilité. Mais, ça fait quand même bizarre de les voir se battre dans un château d’Espagne. Mais encore une fois, pourquoi pas ?
Soif de justice (快餐车, Wheels on meals, Hong Kong, 1984) Un film de Sammo Hung avec Jackie Chan, Yuen Biao, Sammo Hung, Lola Forner, Benny Urquidez.
lundi 23 juin 2008
Leaving me loving you
C’est une romance à l’eau de rose, un film où le romantisme est le personnage principal. Me quitter et t’aimer. C’est le programme de ce film de Wilson Yip qui n’a rien à voir avec les autre films que le cinéaste a pu proposer depuis. C’est d’abord et avant tout un film produit par sa star principale, l’acteur Leon Lai qui est un peu en perte de vitesse depuis quelques années.
Ça se passe à Shanghai, aujourd’hui. Leon Lai est le Dr. Wong et Faye Wong est Yuet San, son ex petite amie qui organise des soirées. Ils se sont séparés après avoir vécu une belle histoire ensemble. Wilson Yip montre cet amour avec quelques flash-back où on les voit faire du manège, manger une glace, sourire, bref la vie est belle. Mais aujourd’hui, ils ne se parlent plus même si le Dr. Wong est encore amoureux d’elle. Elle le déteste mais ils vont devoir travailler ensemble car ils ont le même client, un vieil riche homme. On s’en doute, le film passera sa durée à réconcilier les deux personnages.
Pour cela Leaving me loving you procède par étapes très simples pour montrer le rapprochement que Wong va faire pour se rapprocher de Yuet et à commencer par déménager dans la même rue qu’elle après qu’il a perdu sa trace dans la ville. Puis, une fois qu’ils se mettent à collaborer, il va chercher à montrer qu’il peut être à nouveau digne d’elle. C’est un chemin semé d’embûches pour lui comme pour elle.
Le parcours du médecin et de l’organisatrice de soirées est classique cependant, avec une bonne dose de musique sirupeuse et trois chansons de Leon Lai (après tout c’est lui qui produit). En revanche, l’image de Leaving me loving you est superbe d’une grâce comme on en voit trop rarement dans le cinéma hongkongais. D’une certaine manière, Wilson Yip et son directeur de la photo ont choisi de transmettre par les images ce que les personnage ressentent. Les travellings sont émouvants jusqu’à un certain point, car malheureusement le fil émotionnel est connu d’avance et le scénario est cousu de fil blanc.
Il y a une intrigue secondaire qui est intéressante. Celle qui concerne Kong le collègue du Dr. Wong. Il gare chaque fois mal la voiture et c’est toujours la même policière qui lui met une amende. Petit à petit, une amitié va naître qui va se transformer en romance pour Kong. Hélas pour lui, la jeune femme tombe amoureuse du Dr. Wong. Mais ce dernier fait en sorte que Kong sorte avec elle.
Leaving me loving you se regarde sans ennui même si Yip a fait mieux dans le genre romantisme avec Juliet in love. Il est finalement un cinéaste très inégal. Sans doute lui suffit-il d’avoir un beau projet pour faire exploser son talent.
Leaving me loving you (大城小事, Chine – Hong Kong, 2004) Un film de Wilson Yip avec Leon Lai, Faye Wong, Xiao Hai, Jiang Yihong, Chen Jianbin, Li Tang, Zhou Yue, Lee Na-yong.
dimanche 22 juin 2008
Le Royaume interdit
Jackie Chan et Jet Li dans un même film, cela faisait au moins vingt ans que les fans (et les autres) attendaient cela. Depuis cinq ans, les deux acteurs ont cherché à travailler ensemble. On pensait que cela n’arriverait plus et voici ce Royaume interdit réalisé par l’homme qui a commis les deux Little Stuart et d’autres comédies familiales pas franchement inventives.
Jet Li et Jackie Chan mettront quarante bonnes minutes à se rencontrer mais ils ne se sépareront plus jusqu’à la fin du film. Comme il se doit, cette rencontre se fait sur un combat entre les deux hommes, combat réglé par Yuen Woo-ping qui se contente de la routine. C’est une imitation de ce qui se fait en ce moment dans le film d’art martial : beaucoup de numérique et de moins en moins de câbles. La caméra virevolte autour des acteurs. C’est elle qui chorégraphie et non plus les jambes et les bras. C’est aussi peu gracile que dans les derniers films de Zhang Yimou.
Le personnage principal est un adolescent américain passionné de wu xia pian et de films de kung-fu. Sur son mur, il y a une affiche de Bruce Lee et d’autres films, sur sa télé on peut apercevoir que passe The Monkey goes West de Ho Meng-hua. Bref, notre ado est très versé dans l’Asie Vision. D’ailleurs le film commence par une séquence de rêve avec Jet Li dans le rôle du Roi Singe. Un Jet Li en costumes et maquillé. Ça continue bien avec un générique illustré par des affiches de célèbres de
Notre jeune héros va dans un magasin tenu par un vieillard. C’est Jackie Chan atrocement grimé. Une bande de jeunes loubards vient voler la caisse de notre honorable commerçant et lui tire dessus au pistolet. Jackie Chan remet au garçon un bâton lui demandant de le rendre à son propriétaire. Le jeune atterrit dans une Chine (où le film a été entièrement tourné) de légende, celle du wu xia pian.
Il y retrouve un drunken master qui va lui apprendre les rudiments du kung-fu et devenir son sifu. Ce maître du combat ivre est bien sûr Jackie Chan qui se joue à nouveau un personnage qu’il a interprété il y a trente ans. Bonjour la modernité du scénario. Une fois la présentation des méchants, c’est-à-dire un roi aux diaboliques pouvoirs magiques et une sorcière aux longs cheveux blancs (mais n’est pas Brigitte Lin n’importe quelle actrice), Jet Li arrive dans le récit en moine. Au bout de quelques combats et de nombreux artefacts, on comprendra que ce moine est le propriétaire du bâton et qu’il est aussi le Roi Singe qui va nous débarrasser du méchant.
Rob Minkoff filme son film comme on lui a demandé de le faire : à grand renfort d’effets spéciaux qui enlève toute poésie. Comme Les Orphelins de Huang Shi, Le Royaume interdit est une commande de
Le Royaume interdit (The Forbidden kingdom, Etats-Unis – Chine, 2008) Un film de Rob Minkoff avec Jackie Chan et Jet Li.
vendredi 20 juin 2008
Une ville d'amour et d'espoir
Une ville d’amour et d’espoir est un film sur l’échec. L’échec d’un adolescent qui espère beaucoup et qui n’arrivera jamais à ses fins. Ce qu’il y a d’assez étonnant dans ce long métrage plutôt court (62 minutes), c’est son ton qui reste celui de la comédie jusqu’à la toute fin qui verse dans le drame.
L’ado s’appelle Masao. Il vit avec sa mère malade et cacochyme et sa petite sœur débile légère. Masao va au collège et sa mère souhaite qu’il aille au lycée. La mère travaille dans la rue à cirer les chaussures. Masao va vendre son pigeon à une jeune femme de bonne famille. Son père est le chef d’une entreprise voisine. Elle veut absolument aider Masao en lui donnant de l’argent mais il préfère vendre son pigeon. Car il a une combine : le pigeon rentre au bercail et il vend à nouveau. Jamais il n’acceptera de l’aide mais veut travailler, mais son plan ne se déroulera pas comme il le souhaiterait et il va se retrouver le bec.
Une ville d’amour et d’espoir est un film social, c’est-à-dire une critique de la société japonaise et de son mode de fonctionnement. Oshima a beaucoup d’empathie pour son personnage principal et le montre entre sa pauvreté et la richesse des autres. Il montre surtout que cet état est héréditaire avec tout le poids du destin. On naît pauvre et on reste pauvre, de père en fils. La même situation s’applique pour les riches. Et quand les riches veulent aider les pauvres, cela se retourne contre eux. Certes, cela est un peu schématique voire caricatural et démonstratif.
Mais ce qui intéresse le plus est la figure de Masao interprété par Hiroshi Fujikawa. L’adolescent est toujours filmé droit comme un piquet, l’air vaguement hébété et le regard vide. Cette position au milieu des autres qui sont assis ou en mouvement le singularise. Masao est en retrait de la société, il ne l’acceptera jamais ou la société le rejettera. Cette jeunesse en rupture, Oshima la montera dans ses autres films bien mieux.
Une ville d’amour et d’espoir (愛と希望の街, Japon, 1959) Un film de Nagisa Oshima avec Hiroshi Fujikawa, Yuki Tominaga, Yuko Mochizuki, Michiko Ito, Fumio Watanabe, Fujio Suga.
jeudi 19 juin 2008
Sparrow
Le nouveau film de Johnnie To nous lance un défi : raconter l’histoire la plus ténue qui soit et tenir sur la durée standard d’un long métrage. Le cinéaste, c’est vrai, n’a plus rien à prouver et on pourrait facilement dire qu’il est un formaliste, formule facile qu’il faudrait prouver. Si être formaliste aujourd’hui consiste à fignoler ses plans, à les rendre plus beaux les uns que les autres, à esthétiser à outrance et constamment, alors Johnnie To est formaliste. Sauf que Sparrow peut être vu comme une simple récréation d’un cinéaste qui a envie de filmer des lieux qu’il a aime. Pour cela, il a créé une histoire amusante et insignifiante.
Cette histoire est donc simple. Quatre pickpockets cyclistes rencontrent une jeune femme chinoise mariée à un riche et vieux hongkongais. Ils vont s’aider pour voler l’argent de l’homme d’affaires. Mais tel est pris qui croyait prendre. C’est à peu près tout. Ce scénario permettra de se promener dans Hong Kong, car il faut bien semer ses poursuivants.
Johnnie To filme les vieilles maisons de Hong Kong comme il filmait celle de Macao dans Exilés. Il s’agit pour lui de témoigner que ces vieilles bâtisses existent encore et qu’elles sont cinégéniques. Les quatre pickpockets se promènent de quartier en quartier, mais pas dans les lieux trop peuplés. Ils ne vont pas à Mongkok, ils vont plutôt sur les buttes (pas facile de les grimper en vélo), dans les quartiers cossus de la métropole. Bref, c’est à une promenade touristique que convie le spectateur de Sparrow. Johnnie To va promener sa caméra et faire quelques jolis plans que l’on pourra facilement qualifier d’imagerie. Des escaliers, le toit d’un immeuble ancien, des intérieurs art déco. C’est très beau et rarement vu dans son cinéma qui par souci de rapidité à toujours filmer les immeubles modernes, notamment ceux de
Cette volonté de filmer ces lieux produit directement le scénario. Plus question de mettre en scène la grosse artillerie, des combats au pistolet. Ici le calme règne. Plus question non plus de filmer en voiture qui demande trop de travail pour placer la caméra. Simon Yam et sa troupe marchent et vont parfois du vélo. Même si le vélo a du mal à supporter le poids de quatre grands gaillards comme eux. Pas question non plus de créer des personnages de policiers. Le film reste entre gens d’immoralité. Ce sont des dandys. Le beau moment du film restera celui du vol du passeport de Kelly Lin qui lui ouvrira sa liberté. Ou non. Nos pickpockets se promènent sous la pluie, armés de parapluie et de lames de rasoir. Johnnie To réinvente mine de rien le gunfight. C’est très beau et assez amusant.
Tout cela apporte son lot de nostalgie. Malgré l’humour pince sans rire entre les quatre garçons, on sent que Johnnie To est à la fin d’une étape. D’ailleurs, n’a-t-il pas annoncé qu’il quittait
Sparrow (文雀, Hong Kong, 2008) Un film de Johnnie To avec Simon Yam, Kelly Lin, Lam Ka-tung, Law Wing-cheong, Kenneth Cheung, Lam Suet, Lo Hoi-pang.
Sorties à Hong Kong (juin 2008)
Un film de Lawrence Ah Mon et Scud avec Leung Yu-chung, Ron Heung, Lin Yuan, Monie Tung, Daai Ji-ching, Tsang Kin-chung, Au Wing-leung. 101 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 19 juin 2008.
Sparrow (文雀)
Un film de Johnnie To avec Simon Yam, Kelly Lin, Lam Ka-tung, Law Wing-cheong, Kenneth Cheung, Lo Hoi-pang, Lam Suet. 87 minutes. Classé Catégorie IIA. Sortie : 19 juin 2008.
mardi 17 juin 2008
Invisible target
lundi 16 juin 2008
Soleils de demain (Shochiku)
En complément de programme du DVD d’Une ville d’amour et d’espoir, Carlotta a eu la bonne idée de mettre un court métrage de Nagisa Oshima qui présente quelques unes des vedettes montantes – ou en devenir – du studio Shochiku. C’est drôle, espiègle et très coloré. Une jeune actrice avec un parapluie rouge présente ses camarades acteurs et actrices qui ont commencé leur carrière de cinéma il y a de cela déjà 50 ans. Je n’ai reconnu aucun nom, ce qui n’est guère étonnant de ma part, mais sans doute ont-ils eu l’heure de gloire. Seul un spécialiste pourrait me le dire. Cela étant, cette abnde-annonce de six minutes présente aussi toute la variété que pouvait proposer le studio à ses spectateurs : romance, polar, chambara, comédie musicale, épopée, etc… Oshima accorde ses plans – tout est tourné en décor – à chacun des genres et le tout est très amusant.
Soleils de demain (明日の太陽
vendredi 13 juin 2008
Loving you
C’est le premier grand rôle que Johnnie To offre à Lau Ching-wan. Le premier d’une longue série qui a continué jusqu’à Mad detective. C’est aussi pour To une manière inédite d’aborder le polar hongkongais. Il va y mettre une bonne dose de réalisme et filmer de nombreuses scènes caméra à l’épaule. Ça fait souvent penser à la série NYPB Blue.
Loving you souffre de quelques défauts importants et à commencer par son scénario. Liu (Lau Ching-wan) est un flic autoritaire et peu amène. Son travail passe avant tout et surtout avant sa femme. En fait, sa femme passe après tout. Le soir de l’anniversaire de leur rencontre, il préfère penser à autre chose. Liu trompe aussi sa femme, mais elle lui rend bien. Elle essaie de lui dire quelque chose. Il ne rentre pas chez eux. Il préfère aller baiser une jeune femme. Elle lui dira quelques jours plus tard qu’elle est enceinte… de son patron.
Le travail ne se passe pas aussi bien que voulu. Un méchant particulièrement retord (un trafiquant de drogue) découvre que les gens avec qui il traite affaires sont deux flics infiltrés. Il en abat un (une femme flic) et provoque une overdose sur l’autre. Le méchant s’enfuit après une course poursuite sur les toits (déjà, bien avant Running out of time) et Liu balance la drogue aux quatre vents. Le méchant va se venger. Liu sera attaqué violement lors d’un piège qu’on lui a tendu. Une balle se loge dans sa tête. Il ne sera plus lui-même.
Il s’agira alors de vivre avec son nouvel handicap : il boite et a perdu le goût. Métaphoriquement, il n’a plus le goût de vivre d’autant que sa femme, qui va s’occuper de lui lors de la convalescence, porte l’enfant d’un autre. Il peut tenter de refaire son couple, elle va peut-être ne pas retourner chez sa mère. Mais une chose est sûre, rien ne sera facile, surtout quand on veut l’assassiner.
La mise en scène de Johnnie To est encore très hasardeuse. Les scènes d’action sont filmées au plus près, les rendant assez invisibles pour un film hongkongais, mais cela relève de la méthode américaine. Il s’agit de plans très rapides, cut et donnant de la confusion sur l’issue du combat. Pourquoi pas.
Mais là où Loving you se fait un peu plus intéressant, c’est dans sa métaphore de la peur de la rétrocession, la naissance d’un bébé étant vue comme un saut vers l’inconnu, comme la méconnaissance de l’avenir. La femme de Liu prévoyait de partir au Canada avec son nouvel amant comme beaucoup de Hongkongais l’auraient voulu. La peur aussi des changements au sein de la police avec l’exclusion de ses prérogatives (un jeune flic est muté ailleurs malgré sa loyauté envers Liu). Enfin, dernier détail, la chute de la maison Shaw Brothers qui distribue le film. La dernière séquence est tournée dans les locaux de
Loving you marque la fin d’une ère. Il n’est pas encore le film de la maturité pour Johnnie To, mais il est le terrain d’expérimentations que l’on retrouvera dans ses films majeurs.
Loving you (无味神探, Hong Kong, 1995) Un film de Johnnie To avec Lau Ching-wan, Carmen Lee, Tok Chung-wa, Ruby Wong, Yuen Bun, Wong Wa-wo, Lam Suet, Alan Mak.
jeudi 12 juin 2008
Sorties à Hong Kong (juin 2008)
mercredi 11 juin 2008
JCVD
Clint Eastwood aura attendu 52 ans et son neuvième film Honky tonk man en 1982 pour connaître la reconnaissance de la critique française, ce qui est un peu le must d’une carrière internationale, admettons-le. Jean-Claude Van Damme n’a jamais eu la reconnaissance de la critique (à part peut-être chez nanarland) et depuis près d’une décennie à peine celle du public, qui ne va même plus voir ses films. Je ne compare pas Clint à Van Damme par facétie, mais parce que les critiques qu’ils ont sur leurs films peuvent être comparées. Clint s’est fait traiter de fasciste au début de sa carrière de cinéaste. Il faut les critiques de l’époque sur Un frisson dans la nuit, son premier film. On n’en revient pas.
Pareillement, Van Damme n’a jamais la faveur de la critique. La bêtise de ses films n’y est pas pour rien. Cela est d’ailleurs largement repris dans la séquence au tribunal où l’avocat décrit comment l’acteur tue ses victimes dans les films. Mais Jean-Claude Van Damme est cependant devenu une star du film bourrin et n’a jamais été connu pour autre chose. Van Damme est-il encore aujourd’hui une star, comme veut le faire croire JCVD ? Ou n’est-il juste qu’un has been de plus qui, comme Chuck Norris, fascine les amateurs de mauvais films. Il y a là une nouvelle tendance de la cinéphilie très à la mode et assez régressive, mais parfois amusante. Van Damme est-il un bon acteur, ou même seulement un acteur ? Le film répond oui avec enthousiasme et beaucoup de mauvaise foi.
Le jeu de Van Damme n’est pas très intéressant, il essaie d’intérioriser ses émotions (scène du tribunal), son affliction (scène où on passe ses aphorismes à la télé), mais la tête est la même. Il se penche et semble réfléchir. Van Damme a aujourd’hui 47 ans et ce film tente de le réhabiliter, de redéfinir son statut actuel. La vie privée décrite dans JCVD est fausse, elle n’est pas réelle. Jean-Claude Van Damme doit donc interpréter Jean-Claude Van Damme, ce qui n’est pas une mince affaire puisque le réalisateur lui impose une image, l’image qu’il a envie que l’on retienne de la star belge. Ceci implique une vie familiale fantasmée et surtout l’absence de tout rappel de sa vie de drogué (qui lui a permis de nous offrir ces célèbres réflexions).
Question cinéma, donc acting – comme le dite Jean-Claude, JCVD regarde vers les gloires passées, c’est-à-dire son unique film avec John Woo. Il est dit deux fois dans les dialogues que John Woo aurait été amené aux Etats-Unis par Van Damme. Beau fantasme, certes. Mais pourquoi pas parler de Tsui Hark (deux films ensemble) ou Ringo Lam (quatre films ensemble) ? Parce que JCVD est un film de pur marketing. La scène inaugurale, assez médiocre et démagogique, montre un cinéaste chinois imbu de lui-même faire une scène d’action en plan séquence à notre quadragénaire dans une image d’une rare laideur. Ce dernier souffre. Car Van Damme a souffert dans ce cinéma d’action alors qu’il est un acteur shakespearien (nous dite le film épris de citation).
JCVD est le dernier avatar du cinéma post-moderne qui regarde de partout, imite tout le monde (enfin, plus exactement certains cinéastes cultes en ce moment). Sidney Lumet est allégrement cité et Un après-midi de chien imité et parodié (Soualem, très mauvais, déguisé en John Cazale). Le plus pénible est cette image sépia, couleur glauque (littéralement et figurativement) qui tend, en vain, à donner son atmosphère sombre. Hommage à Tarantino (musique en décalage avec l’action, scénario non linéaire) à Monte Hellman ou Ingmar Bergman (accident de pellicules). Le clou du film devant être le solo de Van Damme qui évoque plus largement celui de Delon dans Les Acteurs de Bertrand Blier. D’une certaine manière, ce que l’on reprochait justement à Delon dans Astérix aux Jeux Olympiques est ici érigé en génie pour Van Damme.
JCVD aurait pu être un très bon court métrage, il est un long métrage poussif pour happy few, pour ceux qui ont vu des films de Van Damme (un genre à lui tout seul) dans leur jeunesse. Le cinéphile doit-il aimer ces navets-là pour apprécier JCVD. Hélas oui. Dans quelques années, quelqu’un fera bien un film sur Ben Affleck avec lui-même jouant son propre rôle. A moins que ça n’existe déjà.
JCVD (France – Belgique – Luxembourg, 2008) Un film de Mabrouk El Mechri avec Jean-Claude Van Damme.
mardi 10 juin 2008
Running out of time + Running out of time 2
J’ai toujours trouvé que Lau Ching-wan est un acteur qui a la classe. Dans les films de Johnnie To, il a pourtant rarement eu l’occasion d’être classieux, bien au contraire, il a souvent dû endosser des rôles de débris de la société avec des costumes ridicules. De ses loques funèbres dans My left eye sees ghosts au costume étriqué dans Mad detective en passant par les fringues de racaille dans Fat choi spirit, Lau Ching-wan a eu dans les Running out of time de porter de magnifiques costumes sombres qui le mettent si bien en valeur.
Les deux films ne se valent pas. Seul l’original, avec Andy Lau, vaut beaucoup. Johnnie To en fait la matrice de ses films suivants, tout autant que dans The Mission en développant son sens inné de l’incongru. Running out of time, rattraper le temps, est un bon film même si ses défauts sont particulièrement pénibles (des ralentis en début de récit fatiguent vite), mais comparé à Running out of time 2, c’est grandiose.
Dans les deux films, Lau Ching-wan joue l’inspecteur Ho. Un homme célibataire qui s’habille très bien, en noir (toujours) et dont la fonction consiste à être le négociateur de la police en cas de prise d’otage. Ho est aussi un homme qui passe son temps à tout planifier et qui dirige sa brigade de manière très maniaque ne laissant aucune initiative. Il se comporte toujours en gentil papa avec ses subalternes mais aussi avec son patron le commissaire Wong Kai-fai (Hui Siu-hung). Leur rapport entre ces deux là sont constamment sur le registre comique, Wong jouant le trouble-fête, le monsieur catastrophe, gênant l’action de Ho.
Andy Lau sera le méchant du film. Enfin méchant, il faut le dire vite pusiqu’il va passer son temps à jouer au chat et à la souris avec Ho, sur tous les lieux possibles, dans un taxi, sur un toit, dans un bowling, dans un parking. Andy va demander de l’aide à l’inspecteur sans que Ho ne le sache, guidant l’inspecteur dans des lieux où ils ne serait jamais aller. Au programme, des déguisements et des masques. Andy Lau se grime en vieillard ou en femme. Des chausse-trappes et des pièges, un scénario en forme de jeu de pistes, ce qui permet de ne pas respecter la moindre crédibilité.
C’est cela qui est plaisant dans Running out of time et qui ne fonctionne pas dans Running out of time 2. Dans ce deuxième film, Ekin Cheng y est une sorte de magicien qui se prend pour un Robin des Bois urbain. Il est toujours suivi par un aigle lamentablement créé avec de pauvres effets spéciaux. Il y a dans Running out of time de belles idées sur l’amitié entre les deux Lau. Ils se retrouvent régulièrement dans les mêmes lieux (un taxi) et finissent par s’aider pour arriver à leurs fins. Dans Running out of time 2, il y a une tentative de créer du fantastique quand Ekin Cheng disparaît comme par magie, mais cela ne fonctionne jamais. L’équilibre qui existe dans le premier film n’est jamais présent dans le deuxième.
Essentiellement comique, l’enquête policière de Running out of time réserve aussi quelques moments de pure tendresse entre Andy Lau et Yoyo Mung dans un bus où Johnnie To les filme en silence tandis qu’il tente de s’échapper. Ce personnage de Yoyo Mung, délicat et mystérieux, tranche avec le dynamisme du reste du film. Dans Running out of time 2, c’est Lam Suet qui incarne ce mystère avec ses comportements anormaux face à Ekin Cheng. Lam Suet et Ekin Cheng jouent à pile ou face et Lam Suet perd toujours. Mais, cela ne mène à rien.
A la limite, on pourrait presque croire que To a sabordé lui-même le second film, laissant la réalisation à Low Wing-cheong, qui fût son assistant sur le premier. Il refait, sans conviction, la même chose. Bref, Running out of time est l’un des films les plus équilibrés, les plus drôles et scénaristiquement les plus malins et amibtieux de Johnnie To.
Running out of time (暗战, Hong Kong, 1999) Un film de Johnnie To avec Lau Ching-wan, Andy Lau, Yoyo Mung, Waise Lee, Hui Siu-hung, Lam Suet, Ruby Wong.
Running out of time 2 (暗战2, Hong Kong, 2001) Un film de Johnnie To et Low Wing-cheong avec Lau Wing-chan, Ekin Cheng, Kelly Lin, Hui Siu-hung, Lam Suet, Ruby Wong.
dimanche 8 juin 2008
Les Orphelins de Huang Shi
Les films inspirés d’histoire vraie ont tous l’ambition d’être réalistes, ou au moins crédibles. Les Orphelins de Huang Shi a cette ambition. Le récit de cette production pour le moins hétéroclite (un cinéaste canadien, deux acteurs chinois du cinéma hongkongais, des fonds chinois, allemand et australien) se déroule pendant la deuxième guerre mondiale. Les Japonais (seule l’armée est visible) occupent
George Hogg (Jonathan Rhys-Meyers) est un journaliste anglais venu faire un reportage sur le conflit. Il va être pris sous les feux des différents combattants. George parle japonais ce qui lui permet de se défendre lorsque les Japonais l’arrêtent. Ils le prennent pour un espion, vont l’exécuter mais il est sauvé par Chen (Chow Yun-fat) un communiste. Sur les conseils de ce dernier, il va dans une maison qui s’avère être l’orphelinat de Huang Shui.
Là, les enfants sont en mauvais état. Ils souffrent de malnutrition, ils sont sales et ils sont seuls et apeurés. George ne veut pas s’occuper d’eux mais très vite il va se donner comme mission de leur rendre la vie meilleure. Il commence par leur apprendre l’hygiène (ils ont des poux), puis à leur apprendre quelques rudiments d’anglais (ils ne savent même pas le parler ces ringards) et accessoirement le basket-ball. Ce brillant journaliste décide aussi d’assurer leur autosuffisance alimentaire en créant de toute pièce un jardin potager grâce à l’aide de Madame Wang (Michelle Yeoh). Cet homme regorge de talents.
Dans l’orphelinat il rencontre une femme médecin blonde qui parle chinois dont il tombera bien entendu amoureux. Lee (Radha Mitchell) n’est là que pour apporter une vague touche féminine qui fera que l’homme pourra s’accomplir dans tous les domaines. Quant aux enfants, ils sont tous mignons et attentifs aux leçons du maîtres, tous sauf un qui ne comprend pas le bien que l’occidental peut apporter à l’oriental. Qu’on se rassure, cet adolescent ignare mourra dans d’atroces souffrances.
Tel le grand Timonier, George va avec les enfants traverser une bonne partie de
Les Orphelins de Huang Shi c’est la bonne conscience européenne dans les paysages grandioses chinois. Le film est très rarement crédible et ressemble à un long téléfilm étalé sur deux heures. Autant dire que c’est très ennuyeux et totalement inutile. Jamais le film ne réussit à créer la moindre émotion malgré son pathos. D’ailleurs même les acteurs semblent se demander ce qu’ils font dans cette entreprise.
Les Orphelins de Huang Shi (The Children of Huang Shui, Chine – Allemagne – Australie, 2007) Un film de Roger Spottiswoode avec Jonathan Rhys-Meyers, Chow Yun-fat, Michelle Yeoh, Radha Mitchell, Guang Li.
vendredi 6 juin 2008
La Source thermale d'Akitsu
jeudi 5 juin 2008
La Fin d'une douce nuit
mercredi 4 juin 2008
Sorties en France (et pas à Hong Kong)
Sparrow le dernier film de Johnnie To sort aujourd’hui en France dans un réseau limité certes, mais il sort. Depuis que le cinéaste est devenu l’image-même du cinéma hongkongais, il est l’auteur favori de la presse et dans une moindre mesure du public, puisque la disponibilité des films reste un problème. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que Sparrow sorte en France puisque ses films précédents étaient sortis, sauf Linger, faut-il le rappeler. Bref, les « polars » de Johnnie To sortent en France. Pour l’instant. Ce qui surprend, c’est que Sparrow n’est pas encore sorti à Hong Kong. Il débarquera sur les écrans le 19 juin. Cette (fausse) bonne nouvelle en cache une autre, très mauvaise. La sortie de CJ7 de Stephen Chow a tout simplement été annulée. Poliment, on dira qu’elle est reportée sine die. Le dernier film de Stephen, un beau film, va sans aucun doute se retrouver directement dans les bacs DVD, avec un peu de chance. Explication : entre le moment où Sony Pictures a acheté les droits de distribution du film et le moment où les « décideurs » ont vu CJ7, il a du se passer quelques semaines. Ils ont pensé avoir acquis une nouvelle comédie d’action du cinéaste de Shaolin soccer et de Crazy kung-fu, ils se sont retrouvés devant une comédie dramatique sur la pauvreté en Chine. Et là, c’est le drame. Comment vendre le film aux fans qui attendent quelque chose qu’ils ont déjà vu ? En allant sur allociné, on pouvait voir il y a quelques semaines des bandes-annonces et de la pub. Et là plus rien. C’est un nouvel avatar de la méconnaissance crasse du cinéma cantonais. Apparemment, cela n’est pas près de s’arrêter.
dimanche 1 juin 2008
Slim till dead
La sortie d’un film de Wong Jing est toujours un évènement. Enfin presque. On peut toujours se moquer de lui, de ses méthodes et de ses choix, mais Wong Jing est encore là, à tenir le cap, à écrire des films, à en réaliser certains (de moins en moins), à en produire (une bonne moyenne de trois par an) et comme dans Slim till dead à faire l’acteur. Wong Jing est vivant et ce film sort aujourd’hui en DVD. La réalisation du film est dévolue à Marco Mak, monteur de son état, qui va filmer ce thriller comme on peut attendre qu’un producteur balourd comme Wong le souhaite : avec un maximum d’effets visuels.
Le respectable Anthony Wong campe Wong Tak, un policier qui enquête sur le meurtre crapuleux d’un mannequin. Un film est retrouvée morte et ne pesant plus que 35 kilos. Sur elle, la police trouve une étiquette sur laquelle est indiquée
L’enquête doit vite avancer car il y a le concours de beauté organisé par une célèbre marque internationale de produits amaigrissant qui se prépare. Pour coacher les filles, entre en scène Cheerie (Cherrie Ying) qui tient un magasin de diététique et de beauté. Sa clientèle devient rapidement des proies potentielles pour le tueur en série. Ken devient introuvable, mais Cheerie sait où il se trouve : il est tombé amoureux d’elle et tente de la séduire. Toute cette histoire de meurtres va suivre son cours, avec son lot de courses poursuite, de chausse-trappes, de faux indices et une résolution de l’intrigue qui est assez facilement devinable. Oui, on peut deviner avec un peu de jugeote qui tue toutes ces mannequins. On est dans une production Wong Jing quand même.
Mais ce qui est intéressant dans Slim till dead s’appelle Anthony Wong. L’acteur est souverain et s’en donne à cœur joie. Non pas qu’il cabotine mais sa partition est souvent du ressort comique comme dans la scène où il veut faire l’amour à sa femme et qu’elle se refuse à lui. C’est évidemment lui le seul personnage important du film. D’ailleurs tous les autres acteurs paraissent d’une grande fadeur à côté de lui, même si avec beaucoup de générosité, il parvient à les mettre en valeur. Il ne faudra pas oublier non plus la parodie du film de Fruit Chan Nouvelle cuisine où Crystal Tin imite à merveille Myriam Yeung.
L’autre attrait de Slim till dead est ailleurs et il est bien plus vénal. Il s’agit pour Wong Jing de mettre le plus d’actrices jeunes et jolies en bikini. Les spectateurs amateurs de beautés chinoises pourront facilement se rincer l’œil. Marco Mak filme ses actrices comme dans un clip avec des filtres bleus d’un mauvais goût assez prononcé. Tout cela est un pur produit Wong Jing.
Slim till dead (瘦身, Hong, Kong, 2005) Un film de Marco Mak avec Anthony Wong, Sheren Tang, Cherrie Ying, Raymond Wong Ho-yin, Crystal Tin, Zuki Lee, Vonnie Lui, Wong Jing, Jing Gang-shan, Andrew Wu.