Dans son acception première, le mot glauque désigne une couleur bleue qui tend vers le vert. Par extension, glauque a désigné des films dans lesquels cette lumière verdâtre, produite par des néons, baignaient. Une atmosphère malsaine, un milieu interlope, des couloirs ou des garages mal éclairés. Les personnages de The Moss vont s’empêtrer dans cette bourbe et ne jamais s’en défaire, comme si le destin allait s’acharner sur eux. Dans la glauquerie, le film est entre Fu Bo de Wong Ching-po et Dog bite dog de Soi Cheang.
Au centre du récit, Jan (Shawn Yue), un jeune gars habillé en chemise ouvertes sur un marcel. On ne sait pas au premier abord qui il est. Dans un restaurant des quartiers populaires, il discute avec On (Eric Tsang) et Fai (Matt Chow). On lui demande de se préparer. A quoi ? Jan monte à l’étage où il s’apprête à coucher avec une jeune prostituée, Lulu (Bonnie Sin). Cette dernière est avec sa petite sœur, Fa (Shi Xue-yi), qui vient d’arriver de Chine continentale. C’est une ado, elle est innocente, elle ne semble pas bien comprendre où elle se trouve. Dans la chambre au dessus, un gros type se donner à fond avec une fille. Elle va se défendre de sa brutalité et l’assommer. Dans le même temps, on comprend que On, Jan et Fai sont trois policiers venus faire une descente de police.
Jan n’est pas n’importe quel flic. C’est un ancien infiltré dans les triades. Il connait donc tout le monde, temporise à l’occasion entre les chefs de clans et justement, Mama Chong (Siu Yam-yam), une femme de tête le convoque. Elle cherche son fils qui a disparu. Elle accuse Tong (Liu Kai-chi) d’être le commanditaire de son enlèvement. Il se trouve être l’ancien boss de Jan. Il va falloir négocier serré parce que Mama Chong n’est pas une tendre. Visage fermé, yeux perçants, voix haute, elle accueille Jan dans un entrepôt où elle fait tabasser des hommes de Tong. Plongés torse nu dans un baquet d’eau froide, elle les fait sortir et les frappe avec un pied de biche. Quand à Tong, il refuse de discuter avec Mama Chong tant qu’elle ne rend pas ses hommes et affirme haut et fort qu’il n’est pour rien dans la disparition du fiston.
Tout va se gâter avec l’assassinat de Tong. Alors qu’il quitte son bureau pour rentrer chez lui, un clochard dont on ne saura jamais le nom (Fan Siu-wong) l’abat au révolver après avoir reçu un coup de téléphone. Hirsute, en aillons, ne parlant que mandarin, ce mendiant a rencontré quelques heures avant ce meurtre Fa, la petite sœur. Elle lui avait préparé un plat à son attention. Quand la police menace de l’arrêter, il la kidnappe et l’emmène dans son antre. On restera toujours dans les bas-fonds, dans le sombre, dans des lieux où ça suinte, où les poubelles jonchent le sol, la lumière est basse. Et au milieu, Jan doit faire face à tous les dangers, Mama Chong, le clochard et retrouver Fa alors que sa grande sœur est morte d’inquiétude. Et découvrir qui peut être l’homme qui a décidé de flinguer Tong.
Je situais plus haut The Moss (le clochard se compare à de la mousse, expliquant qu’il n’est pas grand-chose sur cette terre) dans la lignée de Fu Bo et Dog bite dog, deux films très sombres et franchement déprimant. D’une certaine manière, les cinéastes se livrent à une surenchère dans le glauque, dans les malheurs qui arrivent au personnage (la petite Fa manque de mourir), ça se castagne dur avec toute sorte d’objet, ça se flingue, ça saigne. Derek Kwok choisit pour de filmer cette plongée en enfer la caméra à l’épaule. C’est un procédé bien commun aujourd’hui, presqu’un écueil. Cela fonctionne mieux que le parcours des personnages. Au bout d’un moment, le film fait du sur-place, se lamente sur la psychologie du clochard (les lettres de sa maman), pour repartir de plus belle dans une scène de violence sanguinolante.
The Moss (青苔, Hong Kong, 2008) Un film de Derek Kwok avec Shawn Yue, Fan Siu-wong, Bonnie Sin, Eric Tsang, Liu Kai-chi, Siu Yam-yam, Shaun Tam, Shi Xue-yi, Gill Mohindepaul Singh, Lau Gam-ling, Matt Chow, Soi Cheang, Lee Yip-kin, Ho Sai-man.
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