Pour
regarder la version japonaise de Godzilla,
celle de 1954 non remaniée par Hollywood, il faut avoir la VHS éditée en 1997
par HK Vidéo. Il est d’ailleurs étonnant que le film de Hinoshiro Honda ne soit
toujours pas édité en DVD. Il était tout aussi étonnant qu’entre 1957, date de
la sortie française de la version américaine, avec Raymond Burr dans le rôle
d’un journaliste commentant la destruction du Tokyo par le monstre, et 1997 le
film ait été invisible dans son montage intégral.
A
l’origine du scénario de Godzilla,
un fait divers marquant au Japon. Des pêcheurs japonais ont été contaminés près
des îles Bikini après un essai nucléaire de l’armée américaine. Les thons
pêchés étaient irradiés. La peur du péril nucléaire, neuf ans après Nagasaki et
Hiroshima, était dans tous les esprits tout autant que la méfiance envers les
forces d’occupation américaines. Méfiance pour les secrets enfouis dans ces
explosions qui menacent l’archipel.
Comme
dans le fait divers, tout commence par d’étranges événements au large d’une
petite île. Une explosion blanche, des bateaux qui se brisent, des pêcheurs qui
se noient. Un vieil homme du village a bien reconnu la résurgence d’une
ancienne légende locale où un monstre préhistorique vient du fin fonds de
l’océan. Personne n’ose le croire, notamment la jeune génération qui semble
avoir oublié les anciennes histoires. Le film joue avec ces croyances
populaires.
Assez
vite des scientifiques sont dépêchés pour enquêter. A leur tête, le professeur
Yamane (Takashi Shimura) et sa fille Emiko (Momoko Kôchi). Ils écoutent la
population locale et constatent vite les grosses empreintes sur le sable. Ils
vont être confrontés à Godzilla qui surgit de l’autre côté de l’île. Il fait 50 mètres de haut et rugit avec les effets sonores conçus
par Akira Ifukube, également créateur du thème du film, particulièrement
efficace avec son harmonie cadencée et angoissante.
Détruire
ou ne pas détruire Godzilla, telle est la question que se posent les autorités
et les scientifiques. Si le professeur Yamane, par souci scientifique, souhaite
étudier la créature, son assistant Ogata (Akira Takarada), par ailleurs
éventuel petit ami d’Emiko, est pour la destruction de Godzilla. Quant à
Serizawa (Akihiko Hirata), un scientifique pacifiste qui porte un bandeau sur
son œil droit, il a inventé un « oxygene
destroyer » (en anglais dans les dialogues japonais) qui pourrait tuer
toute vie dans la baie de Tokyo.
Godzilla mêle l’histoire personnelle entre les différents
protagonistes (notamment la romance entre Ogata, Emiko et Serizawa) et la
destruction de Tokyo. C’est un acteur qui porte un déguisement de Godzilla, en
l’occurrence Ryosaku Takasugi. Il écrasera avec ses grosses pattes des
maquettes et des trains miniatures, tandis que parfois en surimpression des habitants
de la ville tentent de fuir. Le film montre un regard souvent désespéré d’un
pays qui a l’angoisse du péril atomique et Godzilla en est la métaphore
hideuse.
Godzilla
(ゴジラ, Japon, 1954) Un film de Hinoshiro Honda
avec Akira Takarada, Momoko Kôchi, Akihiko Hirata, Takashi Shimura, Fuyuki
Murakami, Sachio Sakai, Toranosuke Ogawa, Miki Hayashi, Takeo Oikawa, Seijiro
Onda, Tsuruko Mano, Toyoaki Suzuki, Ren Yamamoto, Ryosaku Takasugi.
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