vendredi 30 mai 2014

Les Larmes d'un héros


Tourné en 1983 entre deux comédies burlesques mais sorti en 1986, Les Larmes d’un héros est le premier essai de John Woo dans le cinéma d’action avec gunfights, héros tragiques et méchants ultra violents. Sans doute faut-il commencer par évoquer ce titre français qui contredit le titre original (Heros shed no tears, les héros ne versent pas de larmes), car c’est bien le sens anglais qui annonce ce qui sera le fond du récit que va subir pendant 80 minutes Chan Chung, le personnage de mercenaire qu’interprète Eddy Ko ici.

Il est un Chinois de Hong Kong embauché par le gouvernement birman pour capturer un baron de la drogue (Bruce Cheung Mong). Le film se déroulera entièrement dans la forêt du triangle d’or de l’opium (Thaïlande, Birmane et Laos). Chan Chung et ses comparses ont réussi à enlever le trafiquant (un général cela dit en passant). Habillés en treillis, mal rasés, le corps en sueur, ils vont être rapidement poursuivis par toute une horde de méchants et en tout premier les soldats du général qui laisse ses médailles comme le petit poucet ses pierres.

Chan Chung doit d’abord récupérer son fils Kuen et sa sœur, qui vivent dans une cabane avant que les soldats ne viennent les prendre en otage. Puis, le film avec toute cette cargaison de personnages poursuit son récit programmatique : échapper à la mort. La menace vient des soldats birmans, et plus tard d’un sadique colonel vietnamien (Lam Ching-ying) que Chan Chung blesse à l’œil droit en lui tirant dessus pour sauver une française qui veut quitter le pays. La poursuite est inégale : deux armées contre un petit groupe.

Le héros va subir les pires outrages de la part de tous ses ennemis. On s’attaque d’abord à ses proches. Son fils est proche d’être brûlé vif par les soldats qui allument un feu autour de lui. Ses amis sont attaqués. Puis, son corps déjà bien mutilé (ses cicatrices au dos) sera torturé dans une séquence assez difficile où il se fait coudre les sourcils à vif par le colonel. Il s’agit d’appuyer l’émotion dans les rapports entre le fils et le père avec une musique à grand renfort de violons mielleux et des gros plans sur les visages épuisés par la bataille.

John Woo s’exerce ici à mettre en scène l’action avec beaucoup d’explosions, beaucoup de balles tirées et beaucoup de sang qui sera versé. Les comparses de Chan Chung vont tous mourir les uns après les autres. Le film lorgne du côté de Michael Cimino et de Voyage au bout de l’enfer (la scène de dés qui se termine par un flingue sur la tempe) avec cette folie qui gagne tous les personnages. Leur répétition et leur similitude apporte de la monotonie alors qu’elles sont envisagées pour apporter des rebondissements à l’action.

Film souvent considéré comme mineur (mais tout autant que ses comédies burlesques, ce qui est faux d’ailleurs), Les Larmes d’un héros est un film mal aimé de son créateur qui s’est vu enlever le montage final. Les scènes comiques ralentissent le récit et son peu drôles, une scène érotique ridicule avec un soldat français coupe le film en deux. Ce qui n’empêche pas que le méchant incarné par Lam Ching-ying, avec son œil en moins qui augmente sa cruauté, soit réussi. Les Larmes d’un héros est comme un brouillon de ses futurs polars.

Les Larmes d’un héros (Heroes shed no tears, 英雄無淚, Hong Kong, 1983) Un film de John Woo avec Eddy Ko, Lam Ching-ying, Ma Ying-chun, Philllip Loffredo, Cecile Le Bailly, Lee Hye-sook, Chin Yuet-sang, Tsang Choh-lam, Ka Lee, Pang Yun-cheung, Chow Gam-kong, Bruce Cheung Mong.

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