lundi 2 janvier 2012

Tricky brains


Wong Jing n’a pas découvert Stephen Chow, mais il lui a permis de s’exprimer pleinement, d’une certaine manière, le cinéaste l’a sublimé dans ce début des années 1990. Tricky brains est l’exemple le plus typique du mode comique de l’acteur où le scénario n’a plus aucune importance et où seuls les gags comptent. C’en est d’ailleurs fascinant. C’était une période bénie pour Stephen Chow qui est devenu le roi du box office en 1990 (et cela a duré cinq ans). Il jouait dans cette période dans près d’une dizaine de films par an, dont aucun n’est vraiment bon, mais cela le poussera à expérimenter beaucoup et à l’encourager à passer à la réalisation, à moins tourner, à se faire rare depuis dix ans (seulement trois films en incluant Shaolin soccer).

Le scénario est très simple : Jing Koo (Stephen Chow) est un détective privé embauché par Macky (Waise Lee) pour mettre au point un piège. La fiancée de Macky, la belle Lucy Ching (Rosamund Kwan) travaille incognito dans l’entreprise de son père M. Ching (Baau Hon-lam), un riche homme d’affaires. Un simple employé de la boite, Chi Man-kit (Andy Lau), qui ignore tout d’elle, cherche à la séduire et elle répond à ses timides avances, sous l’œil de Banana (Chingmy Yau), la meilleure amie de Lucy. Jing Koo doit se faire passer pour le frère de Kit, disparu depuis des années, et va s’incruster dans leur appartement, où Kit habite avec son père Yan Chi (Ng Man-tat). La stratégie de déstabilisation peut commencer. L’important dans Tricky brains n’est pas ce qui arrivera aux personnages (qu’on se rassure, le couple sera réuni et s’aimera), mais les gags des acteurs.

Les toilettes. Dans la séquence d’ouverture, Shing Fui-on s’assoit sur des toilettes et Stephen Chow l’enferme dans une cage pour qu’il y soit prisonnier, puis, les toilettes partent dans une galerie marchande où les clients se moquent de Shing Fui-on. Dans l’entreprise de Ching, Stephen Chow est envoyé aux chiottes par un collègue (interprété par Wong Jing). Sur la porte, il est écrit Ladies (il ne semble pas parler anglais), et Wong Jing affirme que ce sont des toilettes pour hommes. Ce dernier fait le pari avec ses collègues que Koo ressortira des toilettes tabassé par Liu Fan, une actrice au physique corpulent présentée comme peu commode. Stephen Chow s’en sortira en se faisant passer pour mort ( !) et humilera Wong Jing tandis que son père « adoptif » récupérera l’argent des paris.

Les vêtements. Les habits déchirés, c’est toujours rigolo. Andy Lau et Ng Man-tat auront leurs chemises mises en lambeaux dans une boite de nuit quand ils se battent contre un gros balaise. Stephen Chow arrive, pour son premier jour de travail, dans le costume du God of gambling, sur le son de la musique du film. Plus tard, toujours dans ce costume chic mais porté de travers à la manière d’un moine, il chantera un air d’opéra avec Andy Lau et Ng Man-tat au lieu de se parler comme tout le monde (l’un des moments les plus drôles). Ng Man-tat et Stephen Chow font de la gym tonique en survet fluo flashy. L’un des gags récurrents est aussi qu’aucun des deux ne supportent d’entendre le mot « père » et sont pris d’un tic qui fait onduler leur corps. Stephen Chow ira en boite de nuit en combinaison moulante où est écrit I Am Married. Avec Andy Lau, il fait un combat de vêtement et doivent retirer leur slip (dix ans avant le défi défilé de Zoolander). Et finalement, Ng Man-tat sera déguisé en bonne femme.

L’ambivalence sexuelle. Plusieurs fois dans le film, le personnage de Stephen Chow se présente comme gay, sans que cela soit vraiment justifié, mais c’est un des ressorts comiques récurrents de ses films de cette époque. Il tente de faire rire avec le Sida qu’il affirme avoir et qui est censé dégoûter les gens autour de lui, notamment Chingmy Yau avec qui il pourrait avoir une aventure. Stephen Chow achète des pilules de sensualité pour la refourguer à Andy Lau qui a bien du mal à dire à Rosamund Kwan qu’il l’aime. Tout cela se passe dans un cinéma où Andy Lau veut embrasser tout le monde et ploter les filles autour de lui. Finalement, les deux hommes s’embrasseront sur la bouche. Il y a encore de nombreux autres gags (la langue de Stephen Chow, les jeux de mots, les acteurs hurlent régulièrement, l’humiliation des personnages) qui donnent un film très lourd, souvent hilarant et typique du style primitif pas encore dompté de Stephen Chow.

Tricky brains (整蠱專家, Hong Kong, 1991) Un film de Wong Jing avec Stephen Chow, Andy Lau, Rosamund Kwan, Chingmy Yau, Ng Man-tat, Waise Lee, Wong Jing, Baau Hon-lam, John Ching Tung, Chan Man-na, Shing Fui-on, Yu Miu-lin, Liu Fan, Charlie Cho, Jo Jo Ngan, Benz Kong, Bill Lung.

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