Dans
un Hong Kong qui s’apprête à vivre les angoisses de la rétrocession, la
population renoue avec une spiritualité basique. Fung (Tony Leung Chiu-wai)
navigue allégrement sur cette vague de retour à la religion. Lui-même ne croit
pas du tout en Dieu depuis qu’enfant il assistait un prêtre (Richard Ng) et que
l’homme a posé le pied sur la lune et que Fung ne croit plus en la Moon Lady
que priait ce prêtre. Mais il cherche à bien profiter de la crédulité de ses
concitoyens avec l’aide de Calvin (Bowie Lam) plus charismatique que Fung et
qui s’apprête à passer à la télévision dans l’émission de Joan (Karen Mok),
animatrice qui elle aussi a bien l’intention de profiter de cet engouement.
Assez vite, quand les affaires de Calvin commencent à bien aller, ce dernier
décide qu’il doit recevoir un part plus importante. C’est la rupture entre les
deux hommes.
Seulement
voilà, Fung ne sait pas faire grand-chose et Calvin lui fait bien remarquer que
c’était lui que les clients venaient voir pour ses conseils occultes. Fou de
rage et déambulant dans la rue un soir, Fung croise une procession recréant la
Passion du Christ. Grotesque procession mais celui qui incarne Jésus se donne à
fond. Il s’agit de Chun (Jordan Chan) que Fung aborde dans les pissotières.
Chun n’est pas franchement une flèche et Jordan Chan avec sa tête rasée, ses
yeux trop grands, sa tête allongée parvient à faire de son personnage un benêt
non seulement crédible mais également touchant. Il se voit alors proposer par
Fung de rentrer dans une combine pour gagner de l’argent grâce aux conseils
spirituels. Il accepte parce qu’il rêve d’être acteur et que c’est un rôle
comme un autre.
Première
mission : faire de Chun un mage. D’abord la tenue de Chun qui portera
désormais une grande toge blanche avec un petit sac en bandoulière. Au plus
grand fait de sa popularité, ses fans se vêtiront comme lui. Puis lui trouver
un nom. Fung trouve qu’il a une ressemblance avec un ancien moine bouddhiste
dont il a retrouvé une statue. Chun sera désormais Maître Da Da et la
réincarnation de ce moine dont on apprendra plus tard l’identité. Enfin, faire
un gros coup de pub, une grande promo à la télévision. Fung a encore des
contacts et parvient à faire en sorte de mettre dans le coup Pao Wah (Alex To),
une star de la cantopop. Ils font croire qu’il est mourant, Da Da en profite
pour le ressusciter. Des milliers de fans hystériques suivent ces événements et
c’est tout bénef pour Fung et Chun comme pour Pao Wah.
Heaven can’t wait met le doigt sur un monde avide d’audience à tout
prix quelles que soient les sujets. Joan, la reporter vedette profite elle
aussi de la crédulité de son patron (Kent Cheng) qui est fan d’ésotérisme. Bien
entendu, cette entente avec Fung pour que Chun fasse de la télé se fait au
détriment de Chi qui avait pourtant passé un accord avec Joan. Chun alias
Maitre Da Da est alors invité sur les plateaux télé et ses prédictions sont
loufoques. Il s’avère pourtant que grâce à un coup du sort et de nombreux
hasards, elles se réalisent. Dans une des séquences les plus amusantes, Da Da semble
dire absolument n’importe quoi au grand dam de Fung. Il parle de l’herpès
d’un invité lors d’un dîner mondain, prévoit un effondrement de la bourse alors
que tout va bien (finalement un tremblement de terre au Japon change le destin)
ou encore annonce que tous les chevaux d’une course hippique vont arriver ex
aequo.
Le
film se concentre alors sur un homme qui est exploité de toutes parts, qui fait
cristalliser toutes les peurs d’un pays et fait resurgir les pires mesquineries
d’une société qui ne plus qu’en l’argent. Heaven
can’t wait traite tout cela sur un ton léger sur un récit qui n’est pas
exempt de longueurs et où la musique est un peu lourdingue (Carmina Burana, Tchaïkovski,
Brazil). Mais le film est tenu par son duo d’acteurs et surtout par Jordan Chan
(je le redis parce qu’on ne le voit presque plus au cinéma). Ses scènes
comiques avec son air buté et son regard hagard sont aussi fortes que ses
scènes d’émotion (le retour au pays et la discussion avec sa mère). Jordan Chan
a reçu une nomination aux Hong Kong Film Awards pour ce rôle.
Heaven
can't wait (救世神棍, Hong Kong, 1995) Un film de Lee Chi-ngai avec Tony Leung Chiu-wai,
Jordan Chan, Bowie Lam, Karen Mok, Jerry Lamb, Alex To, Kent Cheng, Lawrence Cheng, Richard Ng, Dennis Chan,
Teresa Ha, Anita Yuen.
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