Bienvenue à la caserne de pompiers du quartier de
Tsi Wan Shan commue à Hong Kong pour être la plus malchanceuse du territoire.
On découvre ainsi que toute l’équipe a été victime d’une intoxication
alimentaire. On apprend que les soldats du feu ne connaissent pas vraiment leur
matériel. Finalement on se rend compte de leur incompétence chronique. Raymond
Cheung Man-kit (Alex Fong Chung-sun) le nouveau capitaine est là pour remettre
de l’ordre dans cette caserne. C’est un homme à la solide réputation, comme on
dit sévère mais juste. Le film montre la vie quotidienne dans cette unité de
manière documentaire, caméra portée à l’épaule au plus près des acteurs quand
ils partent en mission, enregistrant le jargon propre au métier. Puis, il
s’agit de faire de la fiction.
La première partie de Lifeline présente les personnages principaux. Raymond est un homme
strict, au visage fermé. Son épouse a immigré depuis des années aux Etats-Unis
(le film se situe clairement dans cette idée de l’angoisse de la rétrocession)
et elle revient à Hong Kong avec leur fille Sandy qui, parce qu’elle n’a jamais
vécu à Hong Kong, ne parle qu’anglais. Si l’épouse revient, c’est parce qu’un
mal la ronge (elle est alcoolo). Les rapports ne sont pas faciles entre eux
deux faisant progresser le film vers le mélo, comme d’ailleurs dans tous les
rapports entre les différents protagonistes à l’exception du jeune pompier
Ho-yin (Raymond Wong Ho-yin), nouveau dans la caserner et plein d’espoirs qui
apparait en début du film sous un mode comique. Il invite son vieux père à
venir préparer un repas sain pour ses collègues. Son personnage sera un peu
sacrifié.
Lo Ka-wai (Ruby Wong) est l’unique femme pompier de
la station mais Johnnie To et son scénariste attitré Yau Nai-hoi ne
s’appesantissent pas sur les différences de sexe. Ka-wai a des soucis avec son
mari (Dang Chi-fung) avec qui elle refuse d’avoir des rapports sexuels pour ne
pas tomber enceinte. Elle aime son métier mais doit subir la tradition sociale
qu’une femme, avant son travail, est une mère. Enfin, Yau Sui (Lau Ching-wan),
le héros de Lifeline est une tête
brûlée, un soldat du feu qui reste persuadé qu’il faut sauver des vies au
mépris du danger. Il va d’ailleurs à l’encontre de ses supérieurs et surtout de
Raymond, ce qui n’est pas sans causer quelques tensions entre eux. Yau Sui
tombe amoureux de Annie Chan (Carman Lee), la médecin qui a soigné la brigade
après leur intoxication. Elle déprime parce que son copain flirte avec d’autres
filles. Elle menace de sauter de son balcon et Yau Sui va la sauver. Malgré son
air rugueux d’ours mal léché, elle tombe amoureuse de lui assurant au film un
trio de couples en crise.
Voilà pour la partie romance nécessaire puisque c’est
un film Shaw Brothers. A ce stade de sa carrière, Johnnie To n’est pas encore
indépendant. Ses scénarios sont encore très conformistes, balisés par des
effets scénaristiques un peu grossiers. Il est possible cependant de sentir les
prémisses de ce qu’il fera plus tard dans la partie finale quand la brigade est
envoyée, malgré son incompétence, aider à circonscrire un important incendie
dans une usine. Là, scénaristiquement le film se contente de montrer comment l’équipe
se soude, comment elle doit faire face aux moqueries et sauver deux personnes. Dans
cette partie, Johnnie To joue aussi sur le suspense simple autour du danger qu’encourent
les pompiers avec lesquels le spectateur a désormais de la sympathie. Visuellement,
ce finale de Lifeline est l’ébauche
de l’abstraction telle que Johnnie To la pratique dans ses polars avec son
apogée dans Exilé. Filmé dans l’obscurité,
il insère son cadre d’éléments qui sature la vision du plan détournant ainsi l’idée
de film d’action, de suspense et de tension, comme dans The Mission, Exilé ou Sparrow, il cherche à travailler sur le
sur-place des personnages, sur la répétition des gestes et la poétique du
mouvement.
Lifeline (十萬火急, Hong Kong, 1997) Un film de Johnnie To avec Lau Ching-wan, Alex Fong Chung-sun,
Carman Lee, Damian Lau, Ruby Wong, Raymond Wong Ho-yin, Chan Man-lei, Yuen Bun,
Lam Suet, Kenneth Chan, Dang Chi-fung, Yeow Ying-ying, Annabelle Lau, Yuen
Ling-to.
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