lundi 30 novembre 2009

Plastic city

« Ici commence le Brésil » est-il écrit sur un panneau en plein Amazonie. Panneau qui ouvre et clôt Plastic city. Entre la forêt amazonienne, il y a Sao Paulo, la jungle urbaine, celle dans laquelle vit Yudo (Anthony Wong), réfugié au Brésil depuis des décennies, exilé de sa Chine natale et qui, dans une belle scène violente inaugurale, recueille Kirin (Jo Odagiri) dont les parents ont été abattus par la police brésilienne. Un tigre blanc regarde Yudo. Il s’en fera tatouer deux sur le torse. Il sera plus fort qu’un tigre.


Yudo est le « roi de la contrefaçon ». C’est son métier de faire fabriquer des objets contrefaits et de la vendre. Kirin, qui est devenu son fils, l’aide dans cette tache. Et sa compagne également, Ocho (Crystal Huang Yi), chanteur de cabaret. Il a pour l’instant le soutien des autorités grâce à corruption. Ça ne va pas durer. Comme les affaires marchent, d’autres veulent en profiter. D’abord le potentat local qui veut s’acoquiner avec Mr. Taiwan (Jeff Chen) qui veut moderniser les méthodes de contrefaçon. Yudo souhaite continuer seul. Il va se retrouver en prison. Sa déchéance dans le milieu commence.


Yu Lik-wai aurait pu faire un film de triades classique où des Chinois se font la guerre sur fond de carioca. Mais Yu Lik-wai aime trop les images bien léchées à la Wong Kar-wai (les deux hommes ont travaillé ensemble) pour se contenter d’un récit classique sur la chute d’un homme et d’un modèle de société. Plastic city se veut résolument moderne au point de ne jamais se laisser aller à ne jamais suivre la moindre ligne scénaristique. Un récit commence puis Yu Lik-wai l’abandonne pour en prendre un autre sans jamais revenir au précédent. Une impression de vacuité s’empare alors du simple spectateur que je suis.


Yu Lik-wai navigue entre le réalisme social le plus rude et la poésie filmique. Il filme des vendeurs à la sauvette, le chômage galopant, la lutte des classes, l’ultralibéralisme dans un style que je qualifierai de néo-réaliste. Caméra portée à l’épaule, image crue, aspect documentaire. La rue est filmée avec une volonté de vérisme. En revanche, il prend un malin plaisir à mettre de nombreuses lampes, néons, lumière trafiquées tout au long des scènes d’intérieur qui rappellent furieusement Wong Kar-wai et ses dispositifs lumineux. On a déjà vu ça et ces scènes sont proches du kitsch en ce qu’elles contrastent trop avec le reste.


Plastic city est ponctué de séquences incongrues telle celle où deux bandes rivales s’affrontent sur une plateforme d’un pont en construction. Comment sont-ils montés là-haut d’ailleurs ? Avec de grands effets de ralentis, d’images saturées d’orange et de sang qui gicle comme dans un film de Kitano, les bras tombent, les gars meurent, sans que l’on en comprenne l’enjeu. Anthony Wong est bien entendu un grand acteur mais le doublage de ses scènes en portugais avec un mouvement des lèvres décalé (et une autre voix) donne une impression de cinéma expérimental involontaire.


Plastic city (蕩寇, Hong Kong – Japon – Brésil – France, 2008) Un film de Yu Lik-wai avec Anthony Wong, Jo Odagiri, Crystal Huang Yi, Taina Muller, Jeff Chen, Milhem Cortaz, Antonio Petrin.

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