jeudi 16 décembre 2010

Le Parrain de Hong Kong


Le lancement du Grand bond en avant a mis sur le chemin de l’exil des milliers de Chinois. Beaucoup ont tenté d’aller à Hong Kong et parmi eux Ho (Ray Lui). Le Parrain de Hong Kong est l’histoire de cet homme, son ascension, sa décadence et sa chute sur une période de trente ans. De son arrivée à Hong Kong à la prison où on le découvre en ouverture du film. Ce film, l’un des plus longs films de Hong Kong jamais réalisés (deux heures et quart), est un récit épique et romanesque de grande tenue.

C’est donc au début des années 1960 que Ho arrive à Hong Kong. Avec son ami Ming (Lawrence Ng), il passe de petits boulots en petits boulots. Payés une misère, humiliés par leurs patrons, ils décident de changer de voix. Leur premier acte est d’aller voler les meubles et les bijoux de l’appartement du patron du restau qui remet les victuailles non consommés par les clients dans les assiettes des nouveaux clients. Ho et Ming seront aidés par deux frères Grand Hak (Chan Wing-chung) et Petit Hak (Frankie Chan), deux gars costauds dont les muscles serviront de gardes du corps régulièrement et par Man (Waise Lee), fidèle mais pas téméraire.

Ho a de l’ambition. Il ne veut pas se consacrer aux cambriolages minables. Il va rencontrer Bo le Gras (Kent Cheng), l’un des chefs de clan de Hong Kong. La colonie est alors dirigée par quatre chefs qui se partagent les activités criminelles. Bo suggère à Ho et sa bande de se débarrasser de Ping le Denté (Ng Man-tat). Ho va vendre de la drogue dans le quartier de Ping, pour le provoquer. Bo avait imaginé un plan pour supprimer Ping et ses hommes. Tout se termine à grands coups de hache où le chef et une bonne partie de sa bande meurent. A quatre, ils ont décimé plusieurs dizaines d’hommes. Ho a désormais gagné ses galons de chef, mais il en veut évidemment beaucoup plus.

Bien entendu, quand un mafieux augmente son pouvoir, non seulement c’est au détriment d’un autre parrain, mais en plus il en espère toujours plus. Cela inquiète les autres chefs de clan et en premier lieu Bo le Gras. D’abord parce que Bo sent son couple (illégitime) en danger. Sa maîtresse May (Amy Yip), dont les seins sont de belle tenue, est devenue la petite amie de Ming, obsédé sexuel dont l’insatiabilité charnelle commence à créer des tensions entre Bo et Ho, qui se moque de cette liaison deouble. Bo cherche à se venger en doublant Ho. Il suggère d’aller voler l’héroïne pure que le boss Kong fait venir de Thaïlande. Ho et ses sbires se déguisent en marins chinois dans une scène flamboyante de violence mêlée de doute.

Au fil des décennies, Ho change. Il oublie vite sa chemise d’ouvrier pour passer au costume prêt-à-porter puis au manteau de fourrure de maquereau. Il passe du taudis à la grande maison à la décoration clinquante. Son succès fait des jaloux et il doit arroser les flics encore plus que ses concurrents. Comme ses ennemis, le chef de la police Liu le Tigre (Kenneth Tsang) joue sur tous les tableaux et sa protection sera donnée au plus offrant. L’argent coule à flot. Le Parrain de Hong Kong ne se contente pas de dénoncer tous les pourris de cette époque, il dissèque en profondeur le processus de la corruption, ses drames et la folie qu’elle engrange.

Et les femmes dans tout cela ? J’ai déjà évoqué le cas de May et Min. Ho rencontrera Yin (Cecilia Yip), veuve avec deux enfants. Yin est la sœur d’un homme que Ho a battu mais épargné. Il souhaite aider la sœur et ils vont tomber amoureux. Comme lui, elle deviendra l’une des têtes de la mafia. D’extraction modeste, elle conseillera Ho jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus retenir sa folie de domination. Quand il sera trop tard pour quitter la scène, il continuera de jouer son rôle de parrain de Hong Kong. Le film est un portrait d’un pays morcelé au travers des personnages qui ne parviennent pas à coller les morceaux de leur vie. La vulgarité des personnages est pourtant poignante en tant qu’elle invoque un destin inexorable que plus personne ne peut contrecarrer. Une histoire triste et belle à la fois. L'histoire d'un monstre, qui a réellement existé, que Ray Lui avec sa corpulence incarne à merveille.

Le Parrain de Hong Kong (To be number one, 跛豪, Hong Kong, 1991) Un film de Poon Man-kit avec Ray Lui, Kent Cheng, Cecilia Yip, Amy Yip, Waise Lee, Lawrence Ng, Chan Wing-chung, Frankie Chan, Elvis Tsui, Tommy Wong, Kenneth Tsang, Lo Lieh, Ng Man-tat, Lau Shun, Lau Kong.

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