Le 5 avril 1911, le quartier de Yoshiwara brûlait entièrement. C’était le lieu des plaisirs, le bordel de Tokyo. L’endroit où Tokyo bordello va nous plonger et remonter le temps en suivant le parcours d’une jeune femme vendue par son père pour éponger ses dettes et qui, quatre ans durant, va exercer la profession de geisha, du plus bas échelon jusqu’au sommet.
Hisano est une adolescente, elle arrive là en baissant les yeux et c’est son regard que Gosha adopte pour montrer le bordel. Pendant toute la première demi-heure du film, tout est montré, toutes les règles sont déployées afin que l’on sache pourquoi telle personne agira de telle manière. Le bordel (de luxe où seuls les gens riches peuvent se payer une prostituée) est une société qui fonctionne en autonomie avec sa hiérarchie au sein des geishas. Au sommet, il y en a trois qui ont des clients attitrés puis vient le tout venant. Devant l’entrée, un rabatteur attire les clients avec une rare obséquiosité. Les maîtresses de maison gèrent tout ce beau monde à la baguette. Gosha montre aussi les apparats, les tenues et les coiffures que les geishas doivent adopter pour se rendre désirables.
Très vite, Hisano se voit attribuer un nom avantageux, Wakashio (jeune marée), sous lequel elle sera désormais connue. Toutes les prostituées travaillent sous pseudonyme. Le premier soir, Hisano tente de s’échapper. Elle sera battue. On lui explique qu’elle a une dette et qu’elle recouvrera sa liberté une fois sa dette remboursée. Cela durera quatre ans. Lors de son évasion avortée, elle croise un jeune étudiant qui manifeste contre le quartier des bordels. Il deviendra son client attitré et parce qu’il est de bonne famille et riche, elle deviendra à son tour grande geisha, ce qui lui attirera la jalousie.
Tokyo bordello suit également le parcours d’autres geishas qui se verront toujours démunies face à la vie, trompées par les hommes qui les affranchissent. Elles espèrent une vie meilleure et digne mais elles sont stigmatisées dans le monde extérieur et reviennent parfois à Yoshiwara. Quant à Hisano et son riche étudiant, ils vivent chastement, il refuse de coucher avec elle, mais elle se met à l’aimer. Il la quitte, elle décide alors de se plonger corps et âme dans son rôle et de faire la parade de la grande geisha qui la désigne comme la personne la plus importante du quartier.
Hideo Gosha traite avec une grande minutie son sujet. Aujourd’hui on dirait que c’est un film académique. Il l’est sans doute dans sa manière à la fois d’agencer son scénario (description documentaire puis romance fatale) et de soigner chaque élément du décor (le quartier a été entièrement reconstruit, aucun détail ne manque). Le résultat est en tout cas impressionnant malgré quelques effets racoleurs un peu douteux (deux geishas s’embrassent nues) qui sont compensés par les désespoir qui s’installe petit à petit dans Tokyo bordello quand les geishas comprennent qu’elles ne seront jamais libres ni aimées.
Tokyo bordello (Japon, 1987) Un film de Hideo Gosha avec Yuko Natori, Rino Katase, Jinpachi Nezu, Sayako Ninomiya.
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