lundi 18 juin 2012

Purgatoire eroïca



Après l’énigmatique Eros + massacre, Yoshishige Yoshida poursuit son exploration du Japon politique avec Purgatoire eroïca, titre qui répond comme un miroir au film précédent : Eros / eroïca. On retrouve immédiatement cette image surexposée, très blanche, des personnages qui passent dans le cadre dans des plans d’ensemble extrêmement larges, des regards caméra troublants qui, encore une fois, évoquent le cinéma stylisé d’Ingmar Bergman de la même époque et celui de Jean-Luc Godard. Le parti communiste japonais est au centre de cette exploration politique. On le sait maintenant, notamment grâce aux films de Koji Wakamatsu, que le PC était puissamment stalinien, malade de son propre pouvoir.

Dans Purgatoire eroïca, il y est vaguement question d’un ingénieur qui travaille à l’élaboration d’un laser, considéré comme une arme technologique très avancée, qui, comme la bombe atomique, peut être très destructrice. On y rencontre un jeune femme qui se réfugie chez cet ingénieur, accueillie par son épouse (l’actrice Mariko Okada) après qu’elle l’a découvertes étendue comme morte. Puis, le soi-disant père de cette jeune femme vient sonner à l’appartement du couple, rentre et annonce qu’il vient reprendre sa fille qui refuse de s’en aller. Yoshida filme comme une farce les rapports entre les personnages, enfin, il ne s’agit pas vraiment de personnages mais plutôt de figures strictement dans l’action et dénuées de psychologie.

Toute la première heure se déroule dans des lieux fermés, appartement, hangar, couloir, escalier. Il y est surtout question de trahison, de procès politique et de la visite d’un ambassadeur qui devra être kidnappé. La deuxième heure est en extérieur. La temporalité est mise à mal. Les personnages portent des perruques blanches, indiquent être dans le futur (en 1980) ou dans le passé (en 1952), retirant alors leur perruque. Les interprètes intervertissent leur rôle. Des scènes vues précédemment sont rejouées avec des variations comme pour illustrer que l’histoire se répète mais sur deux modes différents, le tragique puis le comique. Il faut bien avouer que tout cela est assez confus, souvent abscons et complexe à souhait. Il ne reste aujourd’hui que de superbes plans composés avec grâce et esthétisme. Le  message politique apparait trop métaphorique et amphigourique comme chez la plupart des cinéastes politisés de cette époque : Glauber Rocha, Bernardo Bertolucci ou les Straub.

Purgatoire eroïca (煉獄エロイカ, Japon, 1970) Un film de Yoshishige Yoshida avec Mariko Okada, Kaizo Kamoda, Naho Kimura, Yoshiaki Makita, Kaneko Iwasaki, Toru Takeuchi, Kazumi Tsutsui.

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