Dans une vente aux enchères de prostituées,
l’ancienne épouse d’un vassal du shogun est vendue très cher à un marchand
prétentieux et libidineux. Zatoichi (Shintaro Katsu), qui est là à le masser
est dégouté par cet homme et pris de pitié par cette femme, décide de la
délivrer sur le chemin qui la mène dans la maison de son maitre. Zatoichi et
elle s’enfuient dans la forêt. Quelques instants plus tard, un samouraï (Tastuya
Nakadai), l’époux de cette femme, sort son sabre et tue le marchand ainsi que
les deux porteurs du palanquin. Zatoichi vient de se faire son premier ennemi.
La présence de Tatsuya Nakadai, après celles de
Takashi Shimura et de Toshiro Mifune, décèle l’envie de Shintaro Katsu,
producteur de la série depuis quelques films, d’inviter des grandes pointures
du chambara. L’acteur fétiche de
Masaki Kobayashi s’en sort beaucoup mieux que ses illustres prédécesseurs.
Kenji Misumi le filme tel un fantôme, en clair obscur, le laissant apparaitre
furtivement derrière Zatoichi, ne lui donnant aucun nom et menaçant le masseur.
Le samouraï est persuadé qu’il est responsable de la mort de son épouse.
Innocent, Zatoichi est désarmé face à lui.
Un ennemi, c’est bien, deux ennemis, ça corse
l’enjeu. Il débarque dans une ville tenue par Yamikubo (Masaki Kobayashi),
parrain des parrains qui lèvent des impôts sur les paysans et les taxe en les
menaçant. Il tire son surnom de shogun de l’ombre de sa cécité. Comme Zatoichi,
il est aveugle et c’est aveuglément qu’il fait régner la terreur dans son
shogunat, tout aussi aveuglément qu’il décide de la mort de Zatoichi, sans
raison valable. Les deux hommes sont à l’opposé l’un de l’autre et Kenji Misumi
illustre cet antagonisme de nombreuses fois, notamment dans un jeu de go où ils
s’affrontent.
Pour se débarrasser de lui, le shogun de l’ombre
envoie la belle et jeune Okiyo (Reiko Ôhara), fille de l’un de ses chefs de
clan, séduire Zatoichi puis le tuer. Mais, elle s’éprend réellement de lui et
refuse d’accomplir sa tâche. Ensuite, il engage Umijé (Peter, vu dans Les
Funérailles des roses), apprenti yakuza à la mèche de cheveux sur les
yeux maquillés. Umijé se prétend proxénète mais tombe lui aussi amoureux de
Zatoichi. Ils partageront un lit ensemble, laissant la confusion au spectateur
sur ce qui a pu se passer sous la couverture.
Pour la première fois, une aventure de Zatoichi
aborde frontalement la sexualité. La vente aux enchères montre un maître des
cérémonies obsédé sexuel qui déshabille les femmes et, par ses dialogues,
érotise les futurs rapports sexuels. Plus tard, Zatoichi se battra nu dans un
bain de thermes face à une demie douzaine d’assaillants nus également. Chacun
protégera son sexe avec un baquet. Enfin, Umijé dont Zatoichi met à l’épreuve
la virilité et vice-versa dans un jeu de séduction troublant et Okiyo qui tient
la canne du masseur dans laquelle il enfonce son épée.
Dans Le
Shogun de l’ombre, sixième et dernière réalisation de Kenji Misumi pour la
série, le cinéaste s’amuse comme un petit fou. Les scènes de pur comique
burlesque abondent : le masseur aveugle pratique l’ironie comme jamais, se
moque des gens qu’il rencontre et il joue de ses mimiques. La scène la plus
drôle est ce combat dans les thermes. Kenji Misumi expérimente aussi ses
images, souvent très funestes, met en scène un flashback halluciné du samouraï
sans nom. Il se prépare aux délires formels des Baby
Cart et de son Hanzo
the razor.
La Légende de Zatoichi 21 : Le Shogun de l'ombre (座頭市あばれ火祭, Japon, 1970) Un film de
Kenji Misumi avec Shintaro Katsu, Tatsuya Nakadai, Peter, Masayuki Mori, Reiko
Ôhara, Kô Nishimura, Ryûnosuke Kaneda, Osamu Ôkawa, Takumi Shinjo, Yasuhiro
Mizukami, Ryûtarô Gomi, Kazuko Yoshiyuki.
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