Lesté
d'une réputation épouvantable consécutive au bide au box-office américain (38
millions de dollars de recette contre 175 millions de budget, d'après l'imdb), 47 rônin commence avec une voix off
caverneuse et sentencieuse qui nous affirme que « connaître l'histoire des 47
rônin, c'est connaître l'histoire du Japon ». La promesse éventuelle de
découvrir un Japon authentique est immédiatement écartée dès que les
personnages ouvrent la bouche : tout le monde s'exprime en anglais. A priori,
faire parler les personnages en anglais quand un film se déroule en Asie n'est
pas rédhibitoire. D’autres l'ont fait avec succès. Mais ici le résultat est
désastreux car les acteurs japonais ont beaucoup de mal à dire leur dialogues
qu'ils balbutient tant bien que mal. De plus, cela va à contre-courant de la
tendance actuelle qui apportait un peu de réalisme alors que le film se vante
d'être inspiré de faits réels.
Cette
version des 47 rônin, très loin de
celle de Kenji Mizoguchi de 1941, table sur un Japon féodal où les monstres et
les démons peuplent les forêts. La scène d'ouverture montre Kai (Keanu Reeves,
bien trop âgé pour ce rôle) chasser à cheval une énorme bête sauvage et
chimérique, qui plus est entièrement composé en effets numériques (est-donc là
que serait passé tout l'argent, difficile de la croire). Oishi (Hiroyuki
Sanada), le bras droit du seigneur Asano (Min Tanaka) est sauvé par Kai qui
manquait de se faire défoncer par ce monstre. Mais, fort peu reconnaissant,
Oishi considère Kai comme un être inférieur. Des années auparavant, ce dernier
a été sauvé d'une mort certaine par Asano mais Oishi demeure jaloux du garçon
qui s'est entiché de Mika (Kô Shibasaki), la fille du seigneur. Le clan d'Asano
est banni par le shogun après un complot ourdi par le seigneur Kira (Tadanobu
Asano, désormais abonné aux navets après Battleship
et Thor 2, le pauvre!).
Après
un an d'exil (Oishi est enfermé dans un trou, Kai vendu comme gladiateur), les
deux hommes vont s'unir pour combattre les traîtres et les démons avec 45
autres samourais déclassés. Hormis le belliqueux Yasuno (Masayoshi Haneda, le
bras droit d'Oishi, aucun personnage ne parvient à exister parmi les 47 rônins,
révélant l'incapacité du film à sortir de l'imagerie du Japon de pacotille
qu'on veut vendre au spectateur. Rien ne manque, de jolis costumes bien
repassé, des décors gigantesques, des cerisiers en fleur, de la neige qui
tombe. Mais c'est un Japon sans villageois qu'on découvre, seulement peuplé de
samouraïs qui luttent pour leur propre cause, pour sauver leur honneur et
vanter la loyauté, sans doute le plus gros cliché du film qui n'émet aucune
réserve ou critique sur l'absurdité de ce Japon féodal.
47 rônin ambitionne d’être un grand récit épique avec son
histoire d’amour contrarié entre Kai et Mika. Cette dernière a été enlevée par
Asano qui l’a prise comme trophée et qu’il se jure d’épouser. Pour retrouver sa
bien-aimée, Kai affronte les démons dont la sorcière (Rinko Kikuchi) aux yeux
vairons qui jette des sorts et peut se transformer à sa guise, en renard blanc
(trop kawaï !!!), en serpent ou en vapeur (mais ça fait même pas peur). Il
va demander pour cela de l’aide à son ancien mentor, un moine qui ressemble à
Voldemort. Les effets spéciaux sont tout juste corrects et le combat final est
à peine chorégraphié. La musique, horrible, ne s’arrête jamais. Mais ce qui
finit de plonger le film dans l’ennui total est le sérieux constant et
l’absence totale d’humour ou d’un personnage secondaire qui apporterait un peu
de légereté au milieu de toute cette lourdeur.
47
rônin (Etats-Unis, 2013) Un film de Carl Rinsch avec Keanu Reeves, Hiroyuki
Sanada, Kô Shibasaki, Tadanobu Asano, Min Tanaka, Jin Akanishi, Masayoshi
Haneda, Hiroshi Sogabe, Takato Yonemoto, Hiroshi Yamada, Shû Nakajima, Cary-Hiroyuki
Tagawa, Rinko Kikuchi, Natsuki Kunimoto.
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