Sandra Ng fume sa cigarette, entourée de jeunes femmes court vêtues qui apparaissent comme ses maîtresses et qui constituent sa cour. Sandra Ng a les cheveux courts avec une légère banane sur le dessus. Elle est habillée en costume noir et porte une cravate. Elle s’habille comme un homme et dirige son quartier comme un parrain de triade. Sandra Ng est la 13ème sœur et contrôle Portland Street, rue dévouée entre autres à la prostitution. Et quand une de ses filles fait un écart, la 13ème sœur n’a pas d’état d’âme. Elle la fait battre par ses femmes de main prouvant qu’elle est impitoyable. Portland Street blues est l’histoire de la 13ème sœur.
Le cœur du récit du film est constitué d’un long flash-back que la 13ème sœur raconte à un homme qui ne connait pas son parcours. Portland Street blues est une suite officielle de la série des Young and dangerous produite par Wong Jing, série qui a tant de succès à Hong Kong que la production décide de mettre ce personnage au premier plan et de raconter son passé et les raisons qui l’ont menés jusqu’au sommet. Si le personnage qu’incarne Sandra Ng avec force et justesses est intéressant, c’est que les personnages féminins de chefs de triade sont rares. Qui plus est, la 13ème sœur est lesbienne. Cela est montré comme un fait et non comme un handicap, or on sait que l’homosexualité dans le cinéma cantonais est régulièrement montrée comme une curiosité.
On retrouve Sandra Ng en lycéenne avec son amie Yun (Kristy Yeung) en train de faire les 400 coups. Elle n’est pas encore la 13ème sœur, elle est seulement Tsui Siu-siu, un nom mignon, pas celui d’un future chef de triade. Leur premier coup fumant est d’escroquer leur prof d’anglais en l’appâtant dans une chambre d’hôtel où il pourrait baiser Yun. Mais les filles, après lui avoir pris son argent, appellent la police. Elles se disent que gagner de l’argent aussi facilement, c’est agréable et envisagent de continuer dans cette voie avec un plus gros poisson. Ce sera Frère SOB, un homme des triades, grand amateur de femmes. Elles le rencontrent lors d’un combat de boxe qui oppose Coke (Alex Fong Chun-sun) et un Thaïlandais. Coke n’est pas donné gagnant mais Tat (Ng Man-tat) le père de Siu-siu parie sur lui et gagne gros.
Coke représente la force et la beauté incarnée. Et la liberté également. Les deux filles vont tomber amoureuses de lui. Elles se font prendre en photo avec lui torse nu. La rivalité s’installe entre les filles et Siu-siu devient jalouse de Yun et se persuade qu’elle a couché avec lui. Tout s’enchaîne dès lors. Tat doit de l’argent à SOB et ce dernier lui vole un ticket gagnant au loto. Siu-siu retente avec Yun le coup du prof d’anglais sur SOB, mais il n’est pas né de la dernière pluie et veut tuer Siu-siu. Il est arrêté dans son geste par Kei (Shu Qi), une jeune toxico à qui il doit beaucoup. Elle se fait appeler Scarface à cause d’une large cicatrice sur le visage.
Scarface raconte son histoire dans un nouveau flashback. Sa vie est misérable. Elle est tombée amoureuse d’un jeune flic James (Jimmy Wong) qui va la mener en bateau. Enceinte, il va la rejeter. Les deux filles se lient et Siu-siu va tuer James. Puis, c’est la fuite en Chine avec Coke où ils travaillent dans un garage automobile. Siu-siu commence à l’aimer profondément mais ne couche pas avec lui. Elle ne pense qu’à Yun qui lui manque. Quand il s’enfuie sans dire un mot, elle rentre à Hong Kong. Elle revient aux affaires et parvient à tuer un homme. Comme récompense, elle reçoit Portland Street et deviendra la 13ème sœur.
Le scénario de Portland Street blues est somme toute classique d’un film de triade où l’honneur et la loyauté sont les maîtres mots. On ne rencontre jamais un seul flic pendant tout le récit qui nous plonge au cœur de la faune mafieuse. Le film abuse parfois de ralentis dans les scènes de violence et de meurtre. Mais ce qui plait dans le film sont les personnages de la 13ème sœur et de Coke. Alex Fong Chun-sun joue de sa grande beauté et reste taciturne pendant tout le film. C’est un homme calme et posé qui contraste avec le caractère éruptif du personnage de Sandra Ng. Mais il va inspirer la jeune femme qui deviendra comme lui quand elle parviendra au sommet. Leurs retrouvailles à Hong Kong sont l’objet de quelques explications sur leurs rapports mutuels dans une ville nocturne.
L’attrait majeur de Portland Street blues est évidemment Sandra Ng. L’actrice, jusque là cantonnée à des seconds rôles dans des comédies non-sensiques avec Stephen Chow notamment, explose. Elle montre toutes les facettes de son jeu dans des scènes pas faciles. Elle se met en danger en jouant une lesbienne sans caricature. Elle montre les clichés de la lesbienne masculine telle que les hommes l’imaginent. C’est là l’un des grands intérêts du film. Elle parvient à rendre sensible Coke, le boxeur, et leur amitié amoureuse est extrêmement touchante. Ce qui, au milieu d’un film de triade violent, est d’une grande rareté.
Portland Street blues (古惑仔情義篇之洪興十三妹, Hong Kong, 1998) Un film de Yip Wai-man avec Sandra Ng, Kristy Yeung, Alex Fong Chun-sun, Ng Man-tat, Shu Qi, Ken Lo, John Ching, Francis Ng, Ekin Cheng, Jimmy Wong.
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