mercredi 19 mai 2010

My name is Khan


Il faut d’abord commencer par dire ce que n’est pas My name is Khan. On n’y chante pas, on n’y danse pas, ce n’est pas une comédie musicale en hindi, ou comme on dit un Bollywood. Le film dure pourtant 2 h 40 et étire sa fiction sur une trentaine d’années, du début des années 1980 à aujourd’hui, soit l’élection de Barack Obama, dont un mauvais sosie apparaît en fin pour rencontrer notre héros, Rizwan Khan (Shah Rukh Khan).


« My name is Khan and I’m not a terrorist » est la phrase leitmotiv qu’il prononce dès le début du film quand il se fait suspecter par les douanes américaines. Karan Johar filme sa première séquence comme une séquence de suspense, comme sir Khan pouvait être un terroriste avec une grosse musique bien basique à l’appui de ses images. Khan semble inquiétant, son regard est fuyant, il ne regarde pas les gens dans les yeux et ses propos sont incohérents. Khan est le suspect idéal pour commettre un attentat. Ce que l’on ne sait pas encore c’est que Khan est autiste et qu’il ne supporte pas qu’on le touche. Et on ne sait pas non plus pourquoi, il veut rencontrer le président des Etats-Unis, c'est-à-dire au moment de l’action, George W. Bush.


Gros flash-back. Inde, Bombay, quartier musulman. Le film nous plonge en 1983 dans l’enfance de Rizwan alors que les affrontements entre musulmans et hindous font rage. Rizwan ne supporte pas le bruit, ni le jaune, et sa mère entend lui faire comprendre qu’un homme est bon quelle que soit sa religion. Il retiendra toute sa vie. L’enfant qui joue Rizwan fait bien l’autiste. Son petit frère vient de naître. Rizwan, à cause de sa maladie mal diagnostiquée, retient toute l’attention de sa mère au détriment du frère, qui lui en voudra très longtemps.


Justement Zakir le petit frère (Jimmy Shergill) émigre aux Etats-Unis, y travaille, épouse Hassena (Sonya Jehan), une musulmane qui porte le voile. Tous deux sont très bien intégrés et Zakir a sa propre entreprise de vente de cosmétiques. Rizwan, à la mort de leur mère, part en Californie où il se met à travailler avec son frère. Lors d’une de ses tournées dans les salons de beauté, il ne peut pas traverser la rue à cause des lignes piétons qui sont jaunes. Il manque de se faire écraser par un trolley (on est à San Francisco). Là, une jeune femme le sauve. C’est Mandira (Kajol) et Rizwan va tomber amoureux d’elle.


On n’en est pas encore à une demi-heure de film. Il en faudra autant à Rizwan pour séduire Mandira. Tout cela se fait sur le mode comique puisqu’en tant qu’autiste, Rizwan est maladroit, balourd et bien peu romantique. Il ne peut s’empêcher de dire la vérité. C’est la seule partie de My name is Khan qui est plaisante. On découvre que Mandira a un fils, adolescent. Il aura d’abord du mal à apprécier Rizwan, mais ça viendra. Puis, le mariage vient mais le frère ne peut accepter que Rizwan épouse une hindoue. Seule Hassena viendra au mariage. Tout va bien dans le meilleur des mondes, les affaires marchent, ils sont amoureux, le fiston est dans une bonne école et a des super potes.


Et là c’est le drame. Le drame s’appelle 11 septembre. Karan Johar filme la mise au ban de la société des musulmans de manière si caricaturale que ça en devient assez abject. Il commet l’irréparable en faisant mourir le fils de Mandira sous les coups de ses camarades de classe et de son meilleur ami Jesse. En conséquence de quoi, Mandira reproche avec véhémence à son époux la responsabilité de la mort de son fils. Elle le chasse de sa vie en lui demandant d’aller dire au Président des Etats-Unis qu’il n’est pas un terroriste. D’où la phrase leitmotiv que je rappelle « My name is Khan and I’m not a terrorist », avec une grosse insistance sur la manière de prononcer Khan, RRRRRRRRRRRRRRRAAAAAAN, en remuant l’épiglotte.


Le voyage en solitaire de Khan durera donc sept ans ou presque. Il sera accusé d’être un terroriste, emprisonné pour cela à cause de sa phrase que les gardes du corps de Bush avaient mal interprétée. Une psychiatre va le comprendre. Et des étudiants en journalisme indiens également. Il sera libéré. Dans son périple, il part aussi en Géorgie où il se lie d’amitié avec un village d’Américains-Africains. Il deviendra un héros national quand il leur portera secours au moment d'un ouragan. On s’en doute, Mandira reviendra vers lui, l’ingrate et Obama le rencontrera.


My name is Khan veut critiquer le racisme et notamment la vague d’islamophobie qui a envahit les Etats-Unis après le 11 septembre. Mais tout cela est fait à grand renforts mélodramatiques qui tourne à l’obscénité. Pour ainsi dire, le film perd toute crédibilité dans sa deuxième moitié dès que le périple commence. Bien sûr, parler de crédibilité dans un film en hindi est un peu forcé, mais l’absence de chansons et de danse pouvait faire basculer le film vers le champ de la fiction politique à thèse. Ce qu’a voulu faire Karan Johar et le studio Dharma, c’est produire une réplique à Slumdog millionaire, déjà bien chargé, en reproduisant les méthodes de Danny Boyle et rafler la mise. Effectivement, My name is Khan est le plus gros succès commercial de tous les temps en Inde. Mais il est encore plus démagogique, caricatural et médiocre.


My name is Khan (माय नेम इज़ ख़ान, Inde, 2009) Un film de Karan Johar avec Shah Rukh Khan, Kajol, Yuvaan Makaar, Zarina Wahab, Tanay Chheda, Jimmy Shergill, Sonya Jehan, Parvin Dabas, Arjun Mathur, Sugandha Garg, Sheetal Menon, Christopher B. Duncan, Kenton Duty, Michael Arnold, Umesh Tonpe, Dominic Renda, Katie A. Keane, Harmony Blossom, Arif Zakaria, Vinay Pathak, Jennifer Echols, Adrian Kali Turner, Benny Nieves.

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