mercredi 3 novembre 2010

Dream home


Avec Dream home, Pang Ho-cheung décale légèrement son cinéma pour arriver vers un terrain balisé mais où la plupart des films de Hong Kong ont échoué. La facilité avec laquelle le cinéaste parvient à remodeler. Il procède de la même manière que dans Men suddenly in black, glisser vers la comédie avec un film de triades. Ici, il invite le gore le plus sanglant dans un drame social. C’est ce mélange entre deux identités opposées qui crée l’étincelle qui fait fonctionner Dream home.
Sheung (Josie Ho) a une vie médiocre. Elle travaille dans un centre de télémarketing où elle doit contacter les clients d’une banque. Souvent dérangés, les clients lui répondent mal, l’insultent et Sheung doit garder le sourire. Sa vie amoureuse n’est pas non plus des plus heureuses. Elle couche avec un homme marié (Eason Chan) qui la rencontre de temps en temps dans une chambre d’hôtel puis uniquement dans sa voiture pour une simple fellation. Elle se rend compte qu’il ne quittera jamais sa femme pour elle.
La vie de Sheung est faite de déception mais Pang Ho-cheung nous suggère qu’elle est en train de tuer des gens. On semble bien la reconnaitre dans cette silhouette qui est en train de massacrer un homme de la sécurité. Il est un peu plus de 23 heures et le film va suivre la mort d’une douzaine de personnes en quasi direct. Sheung va assassiner une maman, son mari et la bonne philippine dans un appartement. Puis, l’étage en dessous, elle tue deux amis (Derek Tsang et Lawrence Chou) qui sont en train de baiser deux putes. Pui, un autre ami qui arrive et finalement deux policiers venus calmer cette jeunesse qui fait trop de bruit.
Le film est classé Catégorie III pour ses scènes gore qui sont effectivement costaudes. Cette imagination débridée pour faire mourir les personnages est jouissive. Sheung n’est pas une professionnelle du meurtre et va jusqu’au bout avec les armes qu’elle possède. Une planche de lit dans la gorge d’une fille, un couteau dans le ventre d’un gars d’où sortent ses viscères et d’autres choses rarement vues dans un film de Hong Kong. Cela n’est pas le seul attrait du film même si ça ne serait pas mal. Dans ces séquences, Pang Ho-cheung soigne à la fois le suspense et la matière visuelle.
Ce que réussit à faire Pang Ho-cheung est de nous rendre Sheung extrêmement sympathique. Le récit en continu est interrompu par la vie sociale et amoureuse de notre héroïne : vie médiocre et répétitive. On découvre également dans ce puzzle qu’elle a une obsession qui tourne à la maladie, comme ses interlocuteurs veulent lui faire entendre. Sheung cherche à tout prix à acheter un appartement qui donne sur la mer. Cette quête est menée comme un film à suspense. Sheung ne gagne pas beaucoup d’argent mais elle tient à avoir un appartement avec vue sur la mer.
De longs flash backs scandent le film où l’on retourne dans l’enfance de Sheung puis dans son adolescence. C’était alors le grand boum immobilier à Hong Kong avec ses quartiers populaires et vétustes. Et surtout l’abandon de la population par le gouvernement face aux triades qui cherchaient à acquérir ses logements pour une bouchée de pain. C’est dans ces espaces de récit entremêlés que Pang Ho-cheung montre sa facilité à tenir un récit et ce talent produit grâce à quelques uns des meilleurs techniciens de Hong Kong (Yu Lik-wai à l’image, Wenders Lee au montage) d’offrir l’un des meilleurs films de l’années.
Dream home (多利一号, Hong Kong, 2010) Un film de Pang Ho-cheung avec Josie Ho, Eason Chan, Michelle Ye, Norman Chu, Lawrence Chou, Derek Tsang, Sin Lap-man, Paw Hee-ching, Ching Wong, Lo Hoi-pang, Juno Mak, Lok Ying-kwan, Zhou Chu-chu, Chan Wai-hung, Juan Song.

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