dimanche 24 février 2013

Femmes en miroir


Ultime film de Yoshishige Yoshida, Femmes en miroir voit le retour, après 20 ans d’absence, de Mariko Okada devant la caméra de son époux. Elle y incarne Ai Kawase, une vieille femme de fière allure qui se rend avec son ombrelle pour la protéger du soleil aux services sociaux où elle apprend qu’on aurait retrouvé sa fille disparue depuis 24 ans. Cette fille prénommée Miwa (Yoshiko Tanaka), elle va chez elle pour la rencontrer avec son fidèle aide de vie Gôda (Hideo Murota). Cette fille prodigue ne reconnait absolument pas cette mère putative. Elle a perdu la mémoire depuis des années. Madame Kawase va tout faire pour tenter de lui faire se rappeler des souvenirs de cette vie enfouie au plus profond d’elle. L’indice qui a permis de retrouver Miwa est la date du 11 où elle se retrouve chaque moi dans un parc en train d’approcher des enfants. Pour Ai, c’est une première preuve car sa fille a eu un grand traumatisme un 11 juillet.

Il faut maintenant que Miwa rencontre Natsuki (Issiki Sae), 20 ans, sa fille qu’elle aurait abandonnée à la maternité et que Ai a élevée. La jeune femme, étudiante aux Etats-Unis, est perturbée par cette nouvelle. Pour elle, seule Ai est sa vraie mère, elle l’appelle d’ailleurs « maman ». Natsuki n’a pas vraiment envie de découvrir qui est Miwa mais au fil des discussions, toutes les trois partent pour Hiroshima. C’est dans cette ville, là où est née Madame Kawase, que se trouve le nœud du problème de la famille. Miwa s’est souvenu d’une scène primitive où elle est devant une fenêtre, aperçoit l’océan et des iles éparses. Chaque personnage répétera cette information primordiale dans de nouvelles discussions, qu’il faut honnêtement juger un peu longues et redondantes, d’autant que les actrices débitent leur dialogue dans un hiératisme qui les fait ressembler à des zombies.

A Hiroshima, les trois femmes rencontrent une journaliste qui enquête sur l’époux de Madame Kawase et sur un soldat américain irradié. Au fil des dialogues, le spectateur est informé d’un secret autour de ce soldat et de l’interprète qui traduisait ce que disait Kawase, médecin pendant la guerre. Dans un long flash back immobile (comme dans un Straub-Huillet), Ai raconte la vérité, en tout cas, celle qui remonte à sa mémoire. L’idée de ne pas reconstituer ce passé est bonne et certainement morale. En conséquence, il est plutôt incongru de découvrir d’autres scènes de flashback, présentées presque comme des moments d’angoisse, lourdement appuyés par un musique aux violons grinçants. Là, on ne sait pas qui a vécu cet abandon d’une petite fille au bord d’une falaise devant une mer en fureur.

Ai, Miwa et Natsuki doivent reconstituer ce souvenir pour aller vers l’avenir, pour vivre, pour oblitérer ce passé. Chacune d’elle renvoie une image à l’autre et bien entendu, compte tenu de son titre, les miroirs et reflets sont très présents à l’écran. L’un d’eux, dans le salon de Madame Kawase, est brisé. Sa fille avait donné un coup avant de disparaitre. Lors d’une visite chez sa fille, Ai constate qu’elle également un miroir brisé avec le même impact. Là encore, ce symbolisme est trop appuyé pour ne pas éviter les lourdeurs d’un film qui dure plus de deux heures. Femmes en miroir n’est pas mauvais en soi, on comprend que Yoshida souhaite revenir sur les fondements du Japon actuel (Hiroshima donc), il donne plutôt l’impression de venir d’une autre époque dans cette mise en scène minimaliste mais amorphe.

Femmes en miroir (鏡の女たち, Japon – France, 2002) Un film de Yoshishige Yoshida avec Mariko Okada, Yoshiko Tanaka, Issiki Sae, Hideo Murota, Tokuma Nishioka, Mirai Yamamoto, Miki Sanjô, Hinoshi Inuzuka.

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