Très vite, les souvenirs reviennent à la mémoire quand elle vivait à Canton avec ses grands parents qui s’occupent de la petite. Le père (Waise Lee) travaille à Hong Kong et a laissé fille et mère chez ses parents. La mère passe son temps à travailler sans enthousiasme. Elle vit mal l’absence de son époux et demeure silencieuse et triste. Du coup, la petit Yin passe tout son temps avec ses grands parents et quand le père vient chercher la famille, la gamine ne veut pas partir et les grands parents vont la garder avec eux.
En 1963, Yin va à Hong Kong parce que les grands parents commencent à vieillir. C’est une ville qu’elle ne connait pas. Elle ne connait d’ailleurs pas plus sa famille. Ses parents ont eu une autre fille qui est déjà grande. Le père de Yin trouve qu’elle est bien ingrate. Une dispute s’en suit et le père lui annonce que sa mère est Japonaise. Yin l’ignorait. C’est tout un pan de l’histoire de sa famille et d’elle-même qu’elle apprend. Elle comprend qu’elles se ressemblent, qu’elles sont toutes deux des exilées.
Ann Hui mêle dans Song of the exile les époques à coup de longs flash backs qui exposent un moment marquant du passé. On passe d’une décennie à une autre pour reconstituer le puzzle de cette famille où les choses ne sont pas dites, où les secrets restent lourds à porter et où l’amour manque autant qu’il est demandé. Le passage d’une période à une autre se fait sans heurt, tout en douceur au gré des souvenirs de Yin. Elle va au coiffeur pour le mariage et cela lui rappelle son premier jour d’école où sa mère lui coupe les cheveux, drame dont elle ne s’est jamais remise.
Ces souvenirs amènent la mère à penser à son avenir. Et cet avenir la pousse à vouloir rentrer au Japon, à retrouver sa famille et terre natale. Point de nostalgie dans le film d’Ann Hui, pas plus d’idée de nationalisme, mais un sentiment de bien être à recouvrer. Yin suit sa mère au Japon. Son frère est toujours vivant et l’accueille volontiers, mais sa vieille institutrice lui reproche son départ. Yin va à la rencontre du passé de sa mère, elle se promène en vélo dans la campagne, créant quelques incidents à une ferme parce qu’elle ne parle pas la langue. Et surtout, elle apprend comment ses parents se sont rencontrés.
De manière un peu maladroite, Ann Hui filme les fêtes traditionnelles japonaises comme une touriste le ferait. Cela n’apporte pas grand-chose à l’histoire de Song of the exile. Il semble bien évident que la cinéaste a mis beaucoup d’elle-même dans son film, qu’elle parle de son propre parcours, de sa propre vie. Tout est conté avec une grande délicatesse qui dénote une grande tendresse pour tous les personnages et Maggie Cheung, dans le rôle de la cinéaste, atteint une grande justesse.
Song of the exile (客途秋恨, Hong Kong – Taiwan, 1990) Un film d’Ann Hui avec Maggie Cheung, Luk Siu-fan, Waise Lee, Siu Seung, Tien Feng, Yeung Ting-yan, Kaji Kentaro.
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