lundi 10 janvier 2011

July rhapsody


Monsieur Lam (Jacky Cheung) est ce que l’on appelle un homme sans qualités, un homme passe-partout. La seule chose qui le passionne est la poésie qu’il enseigne dans ses cours de littérature. Il aime par-dessus tout les vers de Li Bai qui évoquent le fleuve Yangtse, la destination qu’il rêve de visiter depuis toujours. Ann Hui nous montre un prof qui donne son cours avec ferveur mais le contre-champ dévoile une salle de classe qui n’en a rien à fiche, à l’exception de Wu (Karena Lam) qui note scrupuleusement tout ce qui son prof.

Wu veut séduire son prof même si elle n’est qu’une lycéenne avec son petit uniforme, sans doute mineure. Lam ne veut voir en elle qu’une étudiante qui s’intéresse à la poésie. Wu lui fait du rentre-dedans, elle l’aguiche avec sa voix très douce et son regard direct. Lam ne veut pas céder à la tentation, il semble pourtant y penser, mais il résiste quand bien même Wu l’assure qu’il est aussi amoureux d’elle qu’elle de lui. Elle le sent, elle lui en fait part. Les dialogues qu’elle lui donne sont directs, donnant ses sentiments comme s’ils n’étaient jamais censurés.

Lam continue sa petite vie de famille bien tranquille. Il est marié à Ching (Anita Mui) et a deux fils. L’aîné Ang (Shaun Tam) est très sérieux, studieux et prêt à faire plaisir à ses parents. Le cadet Lui (Jin Hui) est plus libre, il désespère son père en écoutant du rap en faisant ses devoirs du soir. Les seules distractions que s’accorde Lam sont les études des poèmes de Li Bai en regardant des documentaires sur le Yangtse et les sorties avec Wong (Eric Kot) qui tient un bar à Hong Kong et qui compte s’installer à Shenzhen pour y ouvrir une discothèque.

Ang, un été, va demander à son père de lui raconter l’histoire de sa vie. Le fils n’a jamais eu l’impression de connaître son père. Il fait cette requête parce qu’un élément du passé de ses parents vient de réapparaitre. Monsieur Sheng (Tou Chung-wa) était l’ancien professeur de littérature de Lam et Ching. Sheng a un cancer et Ching va régulièrement veiller sur lui. Le fils demande une explication et le père commence à raconter les débuts de sa relation avec son épouse, qu’il ne voyait jamais que sa queue de cheval parce qu’elle était juste devant lui. Mais ce passé cache un lourd secret et Lam demande à son fils que ce soit sa mère qui lui raconte la fin de l’histoire.

Ces souvenirs attisent la possibilité d’un avenir différent pour Lam. Il envisage soudain l’adultère et se rend compte que la lycéenne qui le drague ne le rend pas insensible. C’est tout en douceur qu’Ann Hui nous amène vers la révélation de ce couple qui pourrait se former sur les bases du couple de Lam et Ching qui vécurent une histoire similaire. Il n’y aura pas d’éclats, de jalousie destructrice ou de séparation définitive. On est dans July rhapsody bien loin des canons habituels des films hongkongais où les couples ne se comprennent jamais pour, à la fin du film, se retrouver en dépit du réalisme.

Ann Hui est une conteuse de premier ordre et son thème de prédilection est la famille. L’élément perturbateur est toujours un morceau du passé qu’il faut adopter, dans lequel se lover est le moyen d’y mettre fin. Au fil des films, l’analyse de la société basée sur la famille se fait plus fine, le poids que les parents ont sur la vie de leur enfants n’est pas critiqué, il est montré comme un fait, comme un destin auquel on ne peut jamais échapper quelles que soient les faits et actes des personnages. Ann Hui est une grande cinéaste des mœurs familiaux.

July rhapsody (男人四十, Hong Kong, 2002) Un film d’Ann Hui avec Jacky Cheung, Anita Mui, Karena Lam, Tou Chung-wa, Shaun Tam, Jin Hui, Eric Kot, Leung Tin, Race Wong, Roddy Wong, Courtney Wu.

1 commentaire:

I.D. a dit…

Très beau film. Qui n'a pas craqué devant le joli minois de Karena Lam. On pense à Lolita de Kubrick. Et surtout touchant dans le sens que c'était l'une des dernières apparitions de Anita Mui sur grand écran.