Avec Le Moine d’acier, Sammo Hung passe enfin à la réalisation après une décennie d’apprentissage au sein de la Golden Harvest (il se bat contre Bruce Lee dans Opération dragon) ou pour King Hu (dont il signe les chorégraphies). Le studio lui fait confiance et il en profite pour faire exactement ce qu’il envie. Le scénario s’applique à suivre une histoire de vengeance très basique en mêlant les styles, un peu de comédie, beaucoup de violence et de nombreux combats réglés à sa manière.
Après la mort de son oncle tué par des Mandchous au beau milieu de son magasin de nouilles, le jeune Chong Mai-long (Sammo Hung) a été recueilli dans une école de kung-fu. Son espièglerie fait qu’il reçoit souvent quelques punitions de la part du sifu. Son appétit énorme ne correspond pas non plus au régime auquel sont astreints les autres élèves. Bref, il veut s’en aller, vivre sa vie et surtout venger son oncle. Il estime avoir suffisamment appris le kung-fu de Shaolin pour se débrouiller tout seul et affronter les vicieux Mandchous. Cela différencie beaucoup d’autres films de kung-fu où l’apprentissage était le moteur du récit.
Les Mandchous sont cruels et sans pitié, dit un dialogue du film et effectivement, on les voit dans leurs basses œuvres. Ils ont envahi cette région peuplée de Hans dans l’espoir d’accaparer leurs terres. Le Moine d’acier reprend de manière transparente la problématique de la colonisation qui était au centre du récit de la Fureur de vaincre. Le chef (Fung Hak-on) a un regard cruel et tient, dans sa main, un éventail. Dans la rue, ils embêtent des enfants et leur coupent les nattes. Mais, ils s’attaquent aussi aux femmes et violent la sœur de Liang (Lo Hoi-pang), un ouvrier de l’usine de tissus qu’il aimerait acquérir. Le film montre donc des hommes qui ne s’attaquent qu’aux plus faibles qu’eux.
La première moitié du film est consacrée à la montée de la lassitude des habitants face à l’arrogance des Mandchous. Liang et Chong vont se rencontrer au milieu du village où Liang, fou de colère, poignarde un Mandchou. Ensemble, ils vont chercher à assouvir leur vengeance. Pour cela, Chong va demander l’aide d’un moine Tak (Chan Sing) qu’il va ramener en ville. Parce que Chong et Liang aiment les plaisirs simples, ils vont dans une maison de plaisirs. Les Mandchous sont persuadés que Chong est celui qui a tué l’un des leurs et ils vont l’humilier devant tous les clients. Mais Chong va à son tour les battre et cette fois ce seront les ennemis qui seront ridiculisés.
Devant la force et la témérité de Chong, le chef va engager deux mercenaires pour les piéger. Tout ne se passe pas comme prévu et Liang parvient à contrer l’escroquerie montée contre son patron de l’usine de tissus. Pour l’anecdote, l’un des ouvriers est interprété par Eric Tsang dans un de ses premiers rôles. Mais les mercenaires ne supportent pas cette humiliation et décident de tuer tous les ouvriers. Le film plonge alors dans une noirceur et expose des combats de plus en plus violents. Les morts des adversaires sont scandées par une prière du moine Tak, qui apporte d’abord un peu d’humour noir. Cela se transforme en chant funèbre laissant découvrir un aspect sombre de la personnalité de Sammo Hung, considéré surtout comme un gentil comique. Le combat final dure un bon quart d’heure et les chutes sont filmées en courts plans séquence et non plus en montage champ-contrechamp. D’une certaine manière, c’est en cela que le cinéma de Sammo Hung est moderne.
Le Moine d’acier (The Iron fisted monk, 三德和尚與舂米六, Hong Kong, 1977) Un film de Sammo Hung avec Sammo Hung, Chan Sing, Lo Hoi-pang, Chu Ching, Wang Hsieh, Fung Hak-on, Wu Ma, Lam Ching-ying, Casanova Wong, Yeung Wai, Dean Shek, James Tin, Eric Tsang.
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