Avec
Happy together de Wong Kar-wai,
multi-primé, Lan Yu était alors l’un
des rares films sino-hongkongais à ne pas présenter l’homosexualité comme un
sujet de société. Stanley Kwan, habitué aux romances compliquées, se concentre
sur l’histoire d’amour entre Chen Handong (Hu Jun) et Lan Yu (Liu Ye), d’âge
différent. Lan Yu est étudiant en architecture quand il rencontre Handong,
homme d’affaires. Ce dernier fait, avec ses collègues et son patron un billard.
D’habitude, c’est Liu Zheng (Liu Hua-tong), ce patron quinquagénaire, qui
profite contre une belle somme d’argent des avantages de l’étudiant. Handong se
dit qu’il pourrait essayer. Les deux hommes se retrouvent et font,
maladroitement, l’amour. Le lendemain matin, Lan Yu se fait payer et Handong
lui donne son numéro de téléphone.
Des
semaines plus tard, ils se rencontrent par hasard. Le papier sur lequel était
inscrit le téléphone est passé à la machine à laver. Mais pas le billet,
précise avec malice Lan Yu. Avec un grand sourire, Handong lui propose de dîner
avec lui et plus si affinités. Leur aventure amoureuse se poursuit. C’est
ensuite la visite d’une maison cossue en banlieue et la proposition de
s’installer ensemble. Ce qu’ils font. Lan Yu poursuit ses études et va
manifester lors du printemps chinois de la place Tian An Men. Affolé, Handong
traverse la ville pour le ramener, prévenu que l’armée va intervenir. Au diable
les considérations politiques, ce qui compte c’est l’amour. Les événements de
1989 sont à peine évoqués, le nom de la place jamais prononcés, mais on
comprend de quoi il s’agit. A l’image, on voit quelques manifestants se presser
puis la rue vide.
Tout
dans Lan Yu passe par l’ellipse.
Handong décide de se marier pour avoir une normalité qui est la règle en Chine,
pour se conformer aux standards. On n’en verra que les préparatifs, la future
mariée en robe blanche, la mère de Handong qui règle les derniers préparatifs.
Et c’est tout. Dans la séquence suivante, on apprendra par les dialogues qu’il
a divorcé et que plusieurs années se sont écoulées sans que les deux hommes ne
se voient, mais l’histoire d’amour va reprendre. Lan Yu est pourtant plusieurs
fois mis à rude épreuve quand il rentre chez eux avant l’heure prévue et que
son amant a invité un jeune gars musclé qui déambule en maillot de bain dans
les couloirs. C’est toujours Handong qui menace le couple et Lan Yu qui le
quitte. Ça sera toujours Handong qui cherchera la réconciliation. Les deux
amoureux ont beau discuter de leur situation, rien ne se résout dans la
simplicité. La seule chose sur laquelle ils sont d’accord, c’est qu’ils
s’aiment. Les années passent, la Chine change, leur passion demeure.
Comme
souvent dans les films de Stanley Kwan, les discussions prennent le dessus sur
l’action. L’idée géniale du film est d’enfermer les deux personnages dans cette
maison qui est leur refuge face aux adversités extérieures ; la politique,
le mariage, l’accusation d’escroquerie que subit Handong. Le cinéaste se
concentre sur leur histoire d’amour et n’en sortira pas. Les plans sont truffés
de miroir où leur intimité est démultipliée, où elle peut s’épanouir. Les corps
sont nus (ce qui valut au film d’être classé Catégorie III à Hong Kong) et
leurs sentiments sont à fleur de peau. Logiquement, après plusieurs ruptures, Lan Yu se termine dans un drame aussi
abrupt que poignant.
Lan
Yu (藍宇, Hong
Kong – Chine, 2001) Un film de Stanley Kwan avec Hu Jun, Liu Ye, CoCo Su Jin, Zhang
Yong-ning, Li Hua-tong, Lo Fong, Li Shuang, Zhao Min-fen, Zhang Fan, Chow Ngai,
Zhang Shaohua.
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