La
cinquième et avant-dernière aventure du loup solitaire à l’enfant voit le
retour à la mise en scène de Kenji Misumi pour un récit entièrement tourné
autour d’un complot lâchement ourdi par l’ignoble Retusdo Yagyu, désormais
borgne depuis qu’Itto Ogami lui a crevé l’œil droit dans leur précédent
affrontement. Baby Cart : Le territoire
des démons déploie une histoire un peu complexe (parfois un peu trop) où
chaque personnage rencontré et combattu apportera un nouvel indice sur la
mission de l’ancien bourreau du shogun.
Le
film s’ouvre sur une séquence en montage alterné. D’un côté le calme d’avant la
bataille de Ogami poussant Daigoro dans son landau. De l’autre, des cavaliers
sur leur monture au galop. Chacun de ces cavaliers et un membre du clan Kuroda.
Ils portent un masque sur lequel est dessiné un bœuf. C’est ainsi qu’Ogami les
reconnait. Ce dernier devra les affronter et chaque adversaire donnera un
indice sur la mission juste avant de trépasser. Par cette mise en scène, Baby Cart : Le territoire des démons
trouve un moyen astucieux de prolonger le suspense du but de la mission. Chaque
indice est amené sous la forme d’un court flashback aux couleurs sépia. Une
fois le cinquième cavalier mort, Itto Ogami, comme le spectateur, connait le
fin mot de l’histoire. Un seigneur local a décidé de faire de sa fille
illégitime, née de sa maîtresse, son héritière au trône, déchant son fils
naturel. Un décret est signé qu’un prêtre félon et allié du clan Yagyu doit
délivrer au shogun. L’objectif d’Ogami est simple : supprimer le prêtre
pour que le parchemin n’arrive jamais à bon port et que la supercherie ne
s’accomplisse pas.
Sans
pourtant pousser trop loin le côté gore, Baby
Cart : Le territoire des démons est l’un des épisodes les plus
violents où la couleur rouge est le fil conducteur. Des baies que cueille
Daigoro en ouverture du film jusqu’à l’eau du lac qui se remplit du sang sous
les coups du sabre d’Ogami en passant par la robe rouge du prêtre et les
colliers rubigineux des cavaliers. Moins de sang gicle que dans les autres
épisodes, mais les gros plans sur les plaies sont fréquents. Kenji Misumi va
jusqu’au grotesque en montrant un corps d’homme tranché à la taille. Ce qui
compte, ce sont moins les combats courts et abrupts que leur mise en place et
le cérémonial qui s’y attache. Cette couleur rouge vif tranche d’autant plus
qu’il est complémentaire de la teinte glauque (glauque étant une couleur tirant
entre le bleu et le verdâtre) sur laquelle il se place.
Comme
dans Baby Cart : L’âme d’un père,
le cœur d’un fils, Daigoro a ses propres péripéties. Tandis que son père
combat un cavalier, l’enfant part regarder des bateleurs au village. Là sévit
une voleuse de portefeuille qui, poursuivie par un officier, met dans les mains
du petit son butin. Elle lui demande de ne rien dire. Arrêté, le gamin sera
torturé nu en place publique sous les yeux de son père silencieux mais
admiratif que son fils respecte la parole donnée. Cette scène où un enfant est
battu est à mettre en parallèle avec le sort que va réserver Ogami à la jeune
héritière illégitime du seigneur local. Parce que le code d’honneur n’a pas été
respecté, il sera sans pitié. Cette intransigeance du samouraï n’est pas la
moindre des violences de Baby Cart :
Le territoire des démons.
Baby
Cart : Le territoire des démons (子連れ狼 冥府魔道, Japon, 1973) Un film de Kenji Misumi avec
Tomisaburo Wakayama, Akihiro Tomikawa, Akira Yamauchi, Hideji Otaki, Taketoshi
Naitô, Fujio Suga, Rokko Toura, Shingo Yamashiroas, Tomomi Sato, Michiyo
Ookusu, Koji Fujiyama, Sumida Kazuyo, Bin Amatsu, Taizen Shishido, Eiji Okada, Minoru
Ohki.
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