mercredi 11 août 2010

The Way we are


C’est l’été dans le quartier populaire de Tin Shui Wai, l’un des lieux les moins sûrs de Hong Kong où les immeubles HLM ont beaucoup poussé depuis quelques décennies et qui est parfois le décor du désespoir de la jeunesse comme dans Besieged city de Lawrence Ah Mon. Et effectivement, les cinq premières de The Way we are pourraient laisser penser qu’Ann Hui veut également faire son film social sur le quartier. Kwai (Bau Hei-jing), la cinquantaine travaille au rayon légumes d’un supermarché. Quand elle rentre chez elle le soir, Cheung Ka-on (Juno Leung), son fils, ne lui dit pas un mot. On l’a vu auparavant glander dans le canapé et ne rien faire.


Cheung Ka-on, comme l’appelle sa mère, nom de famille et prénom, ne sera pas un voyou, ce ne sera pas un fils à problème. Personne dans le film n’aura de vrai problème qu’il ne voudra surmonter qu’avec la violence. Pour Ka-on, ce sont les vacances d’été. L’anniversaire de sa grand-mère ne présente aucun intérêt. Ses cousins vivent aux Etats-Unis quand lui reste dans ce quartier où il joue parfois au mahjong ou aux jeux vidéo avec ses potes du lycée. Pas de flirt en vue, Ka-on est un ado calme, posé et qui aide son prochain. Tout juste remarque t-il Miss Tsui du centre chrétien qui aimerait bien qu’il soit animateur pour les autres lycéens.


Au supermarché, Kwai range les durians. Une vieille dame (Chan Lai-wun) demande s’il y a un peu de boulot pour elle. Elle a l’âge de la retraite mais la vie est dure à Hong Kong. Granny, comme l’appellera Kwai, vit seule dans le même immeuble. Et les deux femmes vont devenir amies en plus d’être collègues. Elles vont commencer à acheter les mêmes produits pour les payer moins chers. Elles vont partager leurs solitudes. Granny vit seule, elle est veuve, son unique fille est décédée. Son petit-fils habite en Chine. Kwai est veuve aussi et n’est pas très famille-famille, tout simplement.


Ainsi quand la mère de Kwai fait un malaise et qu’elle est conduite à l’hôpital, Kwai ne se presse pas pour aller la voir. C’est Ka-on et une de ses cousines qui vient lui apporter de la soupe. Kwai se repose de la famille. Sa mère raconte à son petit fils, qu’elle s’est entièrement concentrée sur son travail pour aider tout le monde, son grand frère puis son petit frère et qu’elle n’a jamais consacré du temps pour elle. Aujourd’hui, les deux oncles de Kwai ont une belle vie, mais Kwai continue de vivre chichement.


Le film d’Ann Hui est d’une grande douceur qui propose une radicalité dans le cinéma de Hong Kong. La délicatesse avec laquelle elle filme ses personnages en ne montrant que les moments creux, notamment les repas où les personnages ne parlent que des choses banales est très rares. Alors que l’on pourrait attendre des crises entre les personnages, des engueulades, des crises de nerfs, cela n’arrive jamais. Ann Hui filme les femmes et elle a choisi une actrice, excellente d’ailleurs comme tous les interprètes, qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau. Il doit bien y avoir quelque chose d’autobiographie dans The Way we are.


The Way we are (天水圍的日與夜, Hong Kong, 2008) Un film d’Ann Hui avec Bau Hei-jing, Chan Lai-wun, Juno Leung, Idy Chan, Clifton Ko.

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