mardi 10 juin 2014

L'Impitoyable (Shaolin wooden men)


Les titres français des premiers Jackie Chan étaient souvent composés d’un unique adjectif. Le Vengeur, Le Magnifique, L’Irrésistible ou L’Impitoyable. Le titre chinois et anglais se traduit par les hommes de bois de Shaolin. Ces féroces combattants sont les gardiens d’une allée qu’un apprenti doit affronter pour pouvoir quitter le monastère. Ces hommes de bois sont des pantins articulés dans un long couloir qui donnent mécaniquement des coups de poings ou de pieds. Peu parviennent à les vaincre mais c’est le rêve du personnage de muet qu’incarne Jackie Chan.

Ce rêve de redevenir un laïc et retourner dans le monde profane, le muet l’a depuis dix ans. Il revoit les images d’un homme qui tue son père devant ses yeux. Le muet veut se venger et pour cela doit quitter le monastère. Pour l’instant, il subit l’apprentissage du vénérable Fa-tsi (Chang I-fei). Porter des seaux d’eau de la rivière jusqu’au sommet d’une colline les pieds dans des sandales en fer. Couper des buches avec une serpette. Et surtout, se contenter de deux maigres repas quotidiens. Le muet ne supporte plus cette discipline mais il se rend bien compte qu’il n’a pas la technique pour se rendre dans le couloir des hommes de bois.

Son salut viendra de sa curiosité qui le pousse à se rendre dans une grotte pourtant interdite dans laquelle est enfermé un prisonnier. L’homme, les mains enchainées aux parois, ne cesse de crier contre les moines et de les insulter qui viennent lui apporter à manger. Cet homme (Kam Kong) dont on ne connaitra pas immédiatement le nom, ni la raison de son enfermement, éructe d’abord contre le muet. Puis, voyant l’obstination avec laquelle il lui procure des brioches ou du vin, il décide d’en faire son disciple et de lui enseigner son kung-fu. Le jeune homme accepte sans rechigner.

L’impitoyable du titre français, c’est donc ce prisonnier qui prétend pratiquer le kung-fu du rugissement. Au monastère, certains moines comprennent bien que le muet est en train de muer, de passer d’un homme frêle et timide à un combattant fort et expert. Le moine ivre (Miu Tak-san) lui enseigne la confiance en soi en le nommant commis à la cuisine. La nonne bouddhiste (Cheung Bing-yuk) cherche à lui apprendre l’art de l’esquive et du respect de l’adversaire pour ne pas faire couler le sang. Le muet apprendra autant de chacun de ces maîtres en kung-fu que du prisonnier.

La soif de vengeance est plus forte que l’art de l’esquive, se dit en substance le muet, qui choisit de rester loyal à l’impitoyable Fa-ju (car tel est son nom). Sorti vainqueur du couloir des hommes de bois, il peut enfin accomplir son dessein. C’est sans compter sur le destin qui va lui mettre bien des bâtons dans les roues. Les complots contre ceux qui avaient enfermé Fa-ju, contre les moines ou contre un aimable aubergiste et sa jolie fille se fomentent. Chaque fois, le muet se trompe de camp jusqu’à ce qu’il comprenne que l’homme qu’il défendait était son premier ennemi.

Jackie Chan fait son apprentissage d’acteur vedette en cumulant ici avec la charge de chorégraphe des combats qui sont nombreux et très inégaux en qualité. On remarquera l’utilisation qu’il fait des bancs et qui deviendra l’une de ses marques de fabrique. Jackie Chan ne dit pas un mot de tout le film, vu qu’il incarne un muet, mais il joue de ses mimiques pour s’exprimer. C’est au personnage du moine ivre qu’est dévolue la fonction comique sans que cela n’atteigne la splendeur de Drunken master, dont L’Impitoyable est un brouillon acceptable.

L’Impitoyable (Shaolin wooden men (少林木人巷, Hong Kong, 1976) Un film de Lo Wei avec Jackie Chan, Kam Kong, Doris Lung, Chang I-fei, Chiang Kam, Cheung Bing-yuk, Miu Tak-san, Liu Ping, Li Min-lang, Weng Hsiao-hu, To Wai-wo, Yuen Biao, Miao Tian, Lee Siu-chung.

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