Ce qui m’avait frappé à la vision du Repas était cette manière qu’avait Mikio Naruse de filmer la ville d’Osaka et qui en faisait un document sur son état en 1951. On retrouve cette idée dans L’Eclair tourné un an plus tard à Tokyo et encore une fois adapté d’un roman de Fumiko Hayashi.
Ce que j’aime dans cette idée de filmer une ville telle qu’elle existait à l’époque et qui produit du réalisme, c’est que cela ancre l’histoire dans le présent, un peu à la manière des cinéastes italiens de la même période, surtout Vittorio De Sica avec lequel il a, à mon avis, beaucoup de points communs, dans sa manière de décrire les rapports familiaux. Il fait de son héroïne une guide touristique et peut ainsi montrer la ville.
L’Eclair est l’histoire de la famille Komori. Une mère qui a eu de quatre maris quatre enfants : trois filles et un garçon. C’est Kyoko qui intéresse particulièrement Naruse, la plus jeune qui a une haute conscience de se qui est en train de se passer dans sa vie. Elle est célibataire et le garçon qui voudrait bien se marier avec elle ne l’intéresse pas.
Naruse ne montre pas la différence de génération entre la mère et ses filles. La mère a beau dire que le bonheur est une idée moderne, entendant par là la même chose que sa fille aînée Mitsuko qui déclare le mariage fait le malheur des femmes. Elles disent juste la même chose mais de manière différence, par la litote.
Et Mitsuko sait de quoi elle parle puisque le jour du décès de son mari, elle rencontre la maîtresse de ce dernier qui vient réclamer une pension. Puis comprend ensuite qu’il avait une deuxième concubine. Quant à la troisième sœur, Nuiko, elle ne supporte plus son mari. Elle vit comme elle l’entend, dit ce qu’elle veut, fume des cigarettes et s’habille comme les putes qui peuplent les films de Mizoguchi. On comprend qu’avec de tels exemples la volonté de Kyoko soit d’être libre.
Montrer Tokyo en 1952 n’est pas une facétie de Naruse. Pas plus que de faire de Kyoko un guide touristique. Cela permet de comprendre pourquoi elle désire échapper à la stagnation de sa vie, pour ne pas parler de muséification. Elle va déménager en banlieue dans un quartier moderne. Là-bas, sa vie va enfin commencer. Un éclair une nuit d’orage l’annonce.
L’Eclair (Japon, 1952) Un film de Mikio Naruse avec Hideko Takamine, Mitsuko Miura, Jun Negami, Kyoko Kagawa, Chieko Murata
1 commentaire:
C'est mon Naruse préféré. J'allais justement en faire un papier. Sans doute son plus mélancolique.
Enregistrer un commentaire