Vingt ans de cinéma déjà et plus de quatre vingt films. Lau Ching-wan est l’un des acteurs de Hong Kong les plus respectés depuis quelques années. Pourtant qui aurait cru qu’il devienne à la fois aussi populaire et aussi talentueux avec un physique aussi atypique hors de canons de beauté des stars masculines de Hong Kong. En gros, Lau Ching-wan a un visage de poupon (nez en trompette, visage joufflu) sur un corps d’adulte (forte corpulence). Il sera donc l’acteur de toutes les contradictions.
Comme beaucoup, il commence à la télévision au début des années 1980. Puis, il fait logiquement des petits rôles. On peut l’apercevoir dans Police story 2 dans la peau d’un flic lors d’une courte scène. Il enchaîne les films et se retrouve en tête d’affiche de C’est la vie, mon chéri de Derek Yee en 1993 (avec qui il tournera aussi Viva erotica, Lost in time et Le Grand magicien). C’est son premier grand rôle dramatique, personnage à la fois bougon et romantique. Le premier d’une longue série de films romantiques, de mélodrames où on lui demande sans cesse de rejouer la même partition. Il ne chôme pas, c’est la période qui veut cela. 1993 : 6 films, 1994 : 15 films, 1995 : 11 films, 1996 : 6 films. Puis, la rétrocession arrive et l’industrie s’effondre.
Lau Ching-wan aura eu la chance de rencontrer Johnnie To en 1993 pour un second rôle dans le blockbuster The Heroic trio 2 Executioners. Le cinéaste va faire de l’acteur son interprète fétiche jusqu’à aujourd’hui. Il va lui permettre de montrer toute l’étendue de sa gamme qui va se révéler assez phénoménale. La transformation se produit dans Loving you en 1995 où le titre est romantique mais le personnage est torturé. Le film met en scène l’angoisse de la rétrocession, la fin d’une époque et le renouveau tant attendu. C’est un polar peu abouti, mais Johnnie To va travailler sa forme et sans cesse refaire ce film.
Lau Ching-wan n’arrive pas à rentrer dans l’univers de Tsui Hark (Tri-star puis Black mask), il va donc forger celui de la Milkyway de Johnnie To. Il fait des merveilles dans Beyond hypothermia de Patrick Leung et plus encore dans The Longest nite de Patrick Yau, sans doute son premier grand film où Lau Ching-wan, crâne rasé face à Tony Leung Chiu-wai. Il y est un personnage traqué qui joue de son visage impassible. Dans Too many ways to be N°1 de Wai Ka-fai, il est complètement déjanté dans un film pas franchement calme. Il tourne ainsi dans une demi douzaine de polars de la compagnie (Lifeline, A hero never dies, Where a good man goes, Running out of time 1 et 2) mais aussi pour Ringo Lam dans deux films, l'excellent Full alert et le raté Victim.
Se balader en slip bleu et faire des conneries est une chose qu’il fait avec génie, mais Lau Ching-wan sait aussi très bien porter le costume croisé et jouer les flics obstinés. Face à Andy Lau dans Running out of time, il devient celui qui traque dans un film labyrinthe retors. La suite déçoit mais pas l’acteur qui parvient toujours à faire donner le meilleur des ses partenaires. Quand Johnnie To et Wai Ka-fai s’associent, ils offrent à Lau Ching-wan deux comédies loufoques. Fat choi spirit, une comédie sur le mahjong avec la crème du cinéma de Hong Kong puis My left eye sees ghosts, où il est un gentil fantôme face à Sammi Cheng, dans une parodie burlesque du film des frères Pang. Il y déploie un grand talent comique.
Après ce film, Lau Ching-wan quitte la Milkyway et ne participera pas, hélas, à la vague du néo polar lancé par Johnnie To. En revanche, il reste fidèle à Wai Ka-fai avec qui il tourne trois films, trois énormes succès au box-office. Si Himalayah Singh est nul, les deux films qui l’entourent sont très bien. Fantasia est une parodie d’un film des frères Hui. Lau Ching-wan permet d’y développer un personnage méchant, irresponsable et catastrophique. C’est un râleur né. Dans The Shopaholics, il y est un psy déprimé face à une Cecilia Cheung en grande forme. Les trois films sont des comédies du Nouvel An Lunaire. Il retrouve Johnnie To, encore avec Wai Ka-fai, dans le génial Mad detective, puis dans Written by et La Vie sans principe.
L’acteur renoue avec Patrick Leung, affranchi du label Milyway et accoquiné avec Chan Hing-kai. Trois films ensemble et avec Louis Koo en co-star. La Brassière , Mighty baby et Good times bed times explorent la libido masculine de manière certes divertissante mais vaguement superficielle. Leung y montrent des hommes lâches et vulnérables en lutte contre les femmes. Il revient ainsi à ces premiers films romantiques où tout est bien qui se finit bien.
Lau Ching-wan est l’un des rares acteurs, avec Chow Yun-fat, à ne pas avoir mis un prénom occidental devant son nom de famille. Il s’est fait ainsi un pur produit de la culture cantonaise, il est devenu le symbole du cinéma, comme l’a montré My name is fame, qui met en abyme l’industrie du cinéma de Hong Kong. Il a reçu pour ce rôle le Hong Kong Film Awards du meilleur acteur après six autres nominations infructueuses, la première fois étant en 1993. Lau Ching-wan est un acteur majeur et c'est un acteur fidèle à ses cinéastes de prédilection.
1 commentaire:
Bientôt une rétrospective à la Cinémathèque ?
...de Grenoble ?
Seb.
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