Au
générique, le mot voyage s’inscrit dans une bonne dizaine de langues, chinois,
français, hindi, allemand et anglais, comme la promesse d’un long périple à
travers le monde où un jeune écrivain nommé Ryo (Ryo van Kooten) part en bateau
pour soigner sa dépression. Voyage,
cinquième film de Scud (et jamais sorti à Hong Kong) est composé de petites
histoires qu’écrit le jeune homme et qui vont d’un pays à un autre, d’une ville
à une autre mais où pratiquement tout le monde parle anglais avec application
mais peu de conviction.
D’abord
en Malaysie avec Siu Yam-yam en diseuse de bonne aventure qui pressent la mort
de son fils. Puis direction Hanovre avec Leni Speidel qui prend des cours de
dessin de nu et rencontre Sebastian (Sebastian Castro, jeune chanteur gay très
à la mode en Philippines). On poursuit à Amesterdam avec Ryo et son jeune amant
Adrian qui courent tout nu dans les rues. A Hong Kong, un jeune autiste vit
avec sa maman qui le lave et le masturbe pour le soulager. Enfin, en Mongolie
intérieure, un jeune chinois est envoyé en rééducation dans la steppe.
Chacune
de ces minuscules tranches de vie se solde par la mort de l’un des
protagonistes. Celle de Sebastian est peut-être la plus risible. Nu, il
s’allonge sur une fontaine et il est élevé dans les airs par le jet avant de
s’écraser dans l’eau. Sans doute faut-il y voir une métaphore sexuelle, celui
d’une éjaculation énorme et d’une petite mort qui s’en suit. L’eau est en tout
cas l’un des motifs récurrents du film. L’océan sur lequel navigue Ryo, la mer
où les cendres sont jetées, celle où un cortège de fantôme se rend.
L’opposé
de la mer est le désert. Celui de l’Australie où Adrian et Ryo rêvent d’aller
pour se recueillir au pied de l’inselberg d’Uluru (le monument des morts des
Aborigènes). Bref, la mort règne dans toutes les histoires et sous toutes ses
formes. Désert également en Mongolie avec le récit le plus convaincant,
d’autant qu’il ne s’y entend aucun mot. Un Chinois rencontre un Mongole et il
va s’établir entre eux une relation secrète presque magique. C’est le seul
moment où l’échange entre les personnages ne semble pas forcé par le scénario.
Car
de toute façon, ce qui intéresse Scud, c’est essentiellement de montrer des
corps dénudés. Et il ne s’en prive pas, ne cherchant même plus de raison
valable pour montrer ses acteurs (et quelques actrices plus rarement) se
balader à poil devant sa caméra. De manière grotesque (la branlette par maman,
le suicide de l’artiste, la farandole des fantômes, les poses suggestives de
Sebastian) et parfois plus subtilement (la lutte en Mongolie). Ceci étant, Scud
est le seul cinéaste de Hong Kong à montrer de la nudité intégrale.
Mais
le vrai problème du film est son sérieux absolu sur des sujets difficiles,
l’amour, la vie, la mort. Scud est l’inverse même de la finesse dans son propos
qui se voudrait philosophique et profond. D’une certaine manière, il se prend
pour le Kim Ki-duk du cinéma gay de Hong Kong et tente, avec maladresse, de
créer de la poésie. Voyage est donc
souvent très pénible à regarder et à entendre (ah, cet anglais balbutiant et ânonné,
ces dialogues aberrants et creux) mais il s’améliore par rapport à ses
précédents délires cinématographiques.
Voyage
(遊, Hong
Kong, 2013) Un film de Scud avec Debra Baker, Sebastian Castro, Adrian Ron Heung, Leon
Hill, Haze Leung, Byron Pang, Jason Poon, Siu Yam-yam, Linda So, Leni Speidel,
Ryo van Kooten.
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