Hideko receveuse d’autobus déploie son ton comédie dès le générique
d’ouverture avec une musique joyeuse. Puis c’est le visage souriant d’Okoma
(Hideko Takamine) qui accueille le spectateur dans le bus dans lequel elle
travaille aux côtés du chauffeur Sonoda (Keita Fujiwara). On remarquera que le
titre du film prend celui de l’actrice principale comme une franchise. Hideko
Takamine, qui avait débuté au cinéma dès l’âge de cinq ans, était une vedette
populaire du cinéma commercial japonais. Elle tournera, après guerre pour
Yasujiro Ozu, dans d’autres films de Mikio Naruse et sera la Carmen du premier
film en couleurs japonais Carmen revient
au pays.
Le
bus traverse la campagne pour prendre ses passagers. Okoma annonce les arrêts,
le chauffeur se retourne, le bus est vide. Les clients manquent préférant au
bus sale et vétuste qu’ils conduisent celui neuf et rapide de la compagnie
concurrente. Les seuls usagers sont un paysan avec ses poules et ses paquets ou
une dame avec ces nombreux enfants, justement parce que le bus est souvent
vide. Au fil du trajet, la receveuse s’arrête pour saluer sa maman et lui
offrir un kimono bon marché, appeler son petit frère qui joue et lui donner un
paquet de biscuits. En situant son récit à la campagne, loin du tumulte de la
guerre, Mikio Naruse en profite pour filmer la nature.
Cette
absence de client n’entame pas l’enthousiasme d’Okoma et Sonoda. Au contraire,
elle a l’idée de faire la bonimenteuse en décrivant le paysage traversé par le
bus. Elle est persuadée que cela fera venir les usagers. Elle demande à Igawa (Daijirô
Natsukawa) un écrivain, en vacances dans le village, d’écrire un texte qu’elle
déclamera. L’écrivain n’est pas connu et Okoma ironise sur son oisiveté. On le
voit prendre un bain, se promener en peignoir et surtout s’émoustiller devant
la femme qui tient l’hôtel où il réside. Le film ne s’attarde guère sur cette
intrigue secondaire, comme si le cinéaste s’était censuré devant cette romance
qui aurait pu naître entre l’écrivain et la responsable de l’hôtel. D’ailleurs,
il renonce également à imaginer une aventure amoureuse entre le chauffeur et la
receveuse.
En
revanche, le personnage du patron de la compagnie de bus (Yotaro Katsumi) est
plutôt chargé. Ce personnage négatif est non seulement montré comme oisif (il
mange de la glace au bureau un éventail à la main) mais également malhonnête.
Dans un des mouvements du récit, le bus a un accident. Sonoda tellement pris par
la description d’Okoma qu’il ne fait plus attention à sa conduite, rate des
passagers qui voulaient prendre le bus et plante son véhicule dans un fossé.
Pour toucher l’assurance, son patron lui demande de mentir. Mais l’honnêteté du
chauffeur, soutenu par l’écrivain, ramènera le patron à la raison, même si
celui-ci n’a pas dit son dernier. Gentille comédie, Hideko receveuse d’autobus évoque, mine de rien, le sort des masses
laborieuses, l’un des sujets favoris du cinéaste.
Hideko
receveuse d’autobus (秀子の車掌さん, Japon, 1941) Un film de Mikio Naruse avec Hideko
Takamine, Kamatari Fujiwara, Daijirô Natsukawa, Yotaro Katsumi.
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