Quelques
mois après avoir perdu son mari et son fils, Rika (Kinuyo Tanaka) part à Tokyo pour se faire embaucher comme
bonne par Madame Tsuta (Isuzu Yamada), patronne d’une maison de geishas. Très
affable, Rika se voit immédiatement renommer par sa patronne Oharu et commence
à travailler : ménage, repas, linge. Elle s’aperçoit vite en allant chez
les commerçants du quartier que la maison Tsuta a tant que dettes qu’on lui
refuse de faire crédit pour les produits qu’elle veut acheter. Elle comprend
aussi que l’une des geishas, mal payée, quitte la maison en colère. De plus,
Otoyo (Natsuko Kahara), sœur de Tsuta vient chaque moi réclamer l’argent prêté.
C’est la faillite et Rika découvre en même temps que le spectateur l’état de la
maison. L’argent sera l’un des sujets majeurs du film, Tsuta, dans sa sourde
fierté, préfère s’endetter plutôt que de suivre les conseils d’une autre geisha
et de rencontrer un homme d’affaires qui semble avoir de l’affection pour elle.
Au gré du courant suit la vie de toutes les femmes de la maison, toutes
aux caractères différents. D’abord la famille de Tsuta. Sa fille, Katsuya (Hideko
Takamine) qui ne sait pas de quoi son avenir sera fait. Elle ne veut pas
devenir geisha, cherche en vain du travail et finira par apprendre la couture,
ce qui ne plait pas à sa mère qui voit une déchéance sociale. Elle va
rencontrer le fils d’un riche homme d’affaires mais ne se sent pas prête à se
marier. L’amour semble impossible pour elle compte tenu de la situation. Ensuite
la deuxième sœur de Tsuta, Yoneko (Chieko Nakakita) qui habite au rez-de-chaussée
de la maison, qui ne travaille pas mais qui a une fille de six ans, la petite
Fujiko pour qui Rika va se prendre d’affection sans doute pour compenser la
perte de son propre fils. Yoneko a été quittée par son époux et quand l’enfant
tombe malade, son beau-frère viendra apporter un peu d’argent pour la faire
soigner. Ensuite, les autres geishas vivant là, la vieille Someka (Haruko Sugimura) et la jeune Nanako (Mariko Okada), qui finira à
partir de la maison pour trouver des clients.
Loin
d’être un drame continu, le film trouve parfois le ton de la comédie sous un
mode ironique. Le personnage de Someka, geisha cinquantenaire sans client est pince sans rire, se
moquant de la radinerie d’Otoyo quand elle vient quémander son argent. Someka
et Rika partagent beaucoup de secrets, se racontent tout et deviennent
complices tandis que la Maison de geishas n’en finit pas tomber dans la
déchéance. Au gré du courant est un
film essentiellement féminin, les hommes sont rares et souvent lâches ou
antipathiques, comme l’oncle de la geisha qui a quitté la maison et qui vient,
lui aussi, réclamer l’argent de sa nièce. Le film quitte rarement la maison
créant de plus en plus une atmosphère étouffante au fur et à mesure que les
tensions entre ses occupantes s’accentuent. La fierté et l’inconséquence de la
patronne finira par causer la perte de sa maison, car comme le dit un des
personnages en début de film « madame Tsuta préfère s’occuper de ses chats
que de ses filles », ce à quoi elle rétorque qu’une maison de geishas peut
paraître enivrante vue de l’extérieur mais elle est horrible vue de l’intérieur
et c’est ce point de vue intérieur que Mikio Naruse montre dans Au gré du courant.
Au
gré du courant (流れる, Japon, 1956) Un film de Mikio Naruse avec Kinuyo Tanaka,
Isuzu Yamada, Hideko Takamine, Mariko Okada, Haruko Sugimura, Sumiko Kurishima,
Chieko Nakakita, Natsuko Kahara, Seiji Miyaguchi, Daisuke Katō, Nobuo Nakamura,
Kumeko Otowa.
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