Chris
Marker est largement dans l’actualité cinématographique cette semaine avec la
sortie de plusieurs de ses films. Largement veut dire ici par le nombre de
films : un programme de courts-métrages : La Jetée (1962), Junkopia
(1981), Dimanche à Pékin (1956) et Vive la baleine (1972) ; Lettre de Sibérie (1957), précieux
documentaire tout en ironie sur l’URSS, invisible depuis des décennies ; Sans soleil (1983) ; Level five (1997) que l’on peut éviter
et la semaine prochaine Le Fond de l’air
est rouge (1976), sans oublier une expo au Centre Pompidou. Peu de copies
existent en première semaine, mais les films vont tourner dans toute la France.
Dimanche à Pékin dure 20 minutes. Son générique est à la fois en
chinois et en français. On remarque qu’Agnès Varda est créditée comme
conseiller sinologique. L’idée du film est filmer des souvenirs de Pékin et,
effectivement, ce sont des bribes d’images touristiques et typiques que l’on
voit à l’image. « Un spectacle si joliment conventionnel », comme le
dit le commentaire en voix off. Le film commence avec l’entrée du temple Ming
(le plus vieux passé) pour finir avec le défilé de l’armée chinoise (la Chine
de Mao Tsé-toung). Son regard est souvent celui d’un touriste un peu candide qui
écarquille les yeux pour pouvoir tout découvrir.
Entre
les deux, Chris Marker et son équipe observe la population dans ce qu’elle a de
plus pittoresque. Cela va de deux hommes qui s’entrainent à la boxe chinoise au
tireur de « pedicab » en passant par les écolières modèles. Le
commentaire est encore sérieux, loin de l’ironie de Lettre de Sibérie et tente
de se raccrocher à des comparaisons compréhensibles pour le spectateur
français. Le cinéaste cherche dans Pékin des traces de Jules Verne ou de Marco
Polo, compare les vieilles demeures aux décors de cinéma d’où Humphrey Bogart
pourrait sortir d’une fumerie d’opium (bien que les films américains étaient
censés se situer à Shanghai). On ne trouve aucun chat à Pékin. L’animal fétiche
du cinéaste est cependant dessiné dans le générique et cité dans le
commentaire.
Sans soleil n’est pas un film rare. Le regard du cinéaste est
tout autre que dans Dimanche à Pékin,
moins touristique et plus expérimental, de manière aujourd’hui souvent très
désuète avec sa musique électronique et les images d’archives déformées.
L’actrice Florence Delay lit des lettres de Sandor Krasna, un voyageur inventé
qui n’est autre que Chris Marker, sur des images filmés en Afrique, en Islande,
en Californie et au Japon. Toutes les lettres sont à la première personne du
singulier. Ce « Je » qui s’adresse au spectateur propose de rentrer
dans la mémoire du cinéaste globe-trotter. Le film est un montage d’images
diverses non narratives où aucune des personnes filmées ne s’expriment devant
la caméra, comme si il s’agissait d’une promenade.
Les
parties les plus intéressantes sont filmées au Japon où l’on découvre la vie
banale et quotidienne des habitants. Chris Marker filme les pieds des
habitants, leurs mains, leurs visages, dans des plans très courts assimilables
à des photographies, voire des clichés. Il filme surtout leurs rituels
ancestraux, notamment ceux qui n’ont pas cours en France : la cérémonie
des 20 ans des jeunes femmes où des cadeaux sont offerts pour devenir une bonne
mère et épouse, l’arrivée de l’année du chien et les prières dans les temples.
Ces rituels ancestraux, Chris Marker les confronte avec le trivial du présent.
Il filme aussi au Japon beaucoup les chats sous toutes leurs formes, ceux qui
se promènent dans les rues en toute liberté, comme les figurines qui
accueillent le client dans les boutiques.
Dimanche
à Pékin (France, 1956) Un film de Chris Marker.
Sans
soleil (France, 1983) Un film de Chris Marker.
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