Avec
sa petite barbe grise, ses modestes vêtements et sa sacoche en bandoulière, Lu
Ban (Wei Heling) passe pour un voyageur bien ordinaire. Il est pourtant le
vénéré patron des artisans et, comme le précise le générique de La Légende de Lu Ban, de nouvelles
anecdotes édifient son histoire depuis 2000 ans. Ce sont trois récits dans
trois régions de la Chine antique qui composent le film.
Chacun
des trois épisodes commence de la même manière. Lu Ban traverse des paysages,
rencontrent des gens qui parlent de lui en termes très élogieux – et il prend
bien soin de seulement écouter et rester incognito – puis arrive dans un lieu
où une énigme d’artisan est à résoudre. Ici on construit un pont, là un temple
imposant, plus loin des tours de garde.
Chaque
fois, l’architecte ne parvient pas à trouver la solution idéale pour achever
ses travaux. Le seigneur local le presse trop pour construire un pont en
pierres que devra emprunter la procession pour le Nouvel An. Le dôme du temple
est trop lourd à porter. L’exigence architectural pour les tours de garde est
importante, soit neuf poutres, 18 colonnes et 72 toits.
Arrivé
sans donner son nom, Lu Ban s’approche des ouvrages pour se faire engager. Aucun
ouvrier ne comprend vraiment ce qu’il fabrique. Sa méthode n’est pas d’expliquer
en long en large et en travers comment résoudre l’énigme architecturale, mais
de pratiquer un approche décalée pour trouver la solution. Puis, il quitte les
lieux sans demander son reste. C’est là que les ouvriers comprennent qui il
est.
Le
personnage de l’artisan ne se montre ainsi pas plus malin que les ouvriers ou
les maîtres d’ouvrage, il cherche plutôt des solutions pratiques venues de la
vie de tous les jours, comme le montre une séquence intermédiaire de son passé
où sa mère et son épouse l’aident à inventer une cale pour mieux raboter. Il
s’agit de montrer qu’on est plus fort à plusieurs que seul.
Lu
Ban pratiquera les mêmes méthodes avec ces architectes peu inspirés : un
bol de riz et deux poissons feront comprendre au maitre d’ouvrage comment
monter son dôme, une cage à grillon inspirera celui qui est menacé de mort par
l’empereur comment construire sa tour de garde. Le film résout avec une pointe
d’ironie tous ses problèmes, provoquant chez le spectateur un enthousiasme non
dénué de plaisir.
La Légende de Lu Ban n’est sans doute pas non plus dépourvue d’une idée
d’édification des masses laborieuses de la Chine de 1958, mais sur un mode
ludique pas encore gangréné par la propagande. L’image et l’histoire de Lu Ban
sont vénérées et le personnage est ici représenté comme un ouvrier lambda dont
la modestie n’a d’égale que l’habileté au travail. Bref, un exemple de
travailleur modèle à suivre.
La
Légende de Lu Ban (鲁班的传说, Chine, 1958) Un film de
Sun Yu avec Wei Heling, Li Wei, Zhong Shuhuang, Guan Hongda, Wang Hanlun, Li
baoluo.
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