lundi 2 juillet 2007

New York Masala


Comment font-ils ? Comment font les Indiens pour produire des films où l’humour potache se mêle au romantisme le plus exacerbé ? Comment réussissent-ils à remplir pendant plus de trois heures l’écran avec des chorégraphies chantées avec plus de 50 danseurs, avec des larmes plus larges que les rives du Gange et des histoires d’amour tourmentées comme il n’en existe plus qu’au cinéma ? Oui, comment fait Bollywood pour exister ?

Le cinéma en langue hindi fait quelques pas timides dans les salles françaises et dans les sorties DVD. Timides certes, mais les aficionados de Bollywood sont là, en témoigne le week-end du 30 avril au Trianon où les salles étaient remplies. Les sorties dans les salles de cinéma de New York Masala et de Sholay se sont faites en catimini : le 27 avril, 5 salles parisiennes et une à Strasbourg pour le premier et une seule pour le second. La presse, dans son ensemble, évoque régulièrement le vocable de kitsch, balayant le travail critique d’un revers de stylo. Les films sont commentés de manière assez condescendante, pour ne pas dire fallacieuse : ce cinéma n’est qu’exotique (le terme Masala dans le titre français encourage cette vision des choses).

La durée de ces longs métrages, comme de Kuch Kuch Hota Hai (réalisé par Karan Johar en 1998) sorti récemment en DVD, qui avoisine chaque fois les trois heures, n’aide pas les gérants de salle à se lancer dans l’aventure. Long comme un film de Rivette, ou comme Titanic d’ailleurs, mais avec un scénario digne d’un soap opéra, le film hindi souffre également de la part de la presse cinéma d’un grave défaut : celui de recopier les canons du cinéma hollywoodien le plus commercial. Certes les films sont des blockbusters en Inde, mais ils sont aussi des films d’auteur et surtout d’acteurs que le spectateur peut prendre plaisir à retrouver au long des rares sorties de films Bollywood.

New York Masala (Kal Ho Naa Ho) a été réalisé par Nikhil Advani en 2003 d’après un scénario de Karan Johar, le réalisateur de la Famille indienne, sorti en mai 2004 en France. C’est l’habituelle histoire de couples qui sont mal assortis alors même qu’en face d’eux se trouvent celui ou celle qui lui convient.

Comme son titre l’indique clairement, l’action se déroule à New York, où Naina (Preity Zinta, une des étoiles montantes du cinéma hindi) réside. Elle s’ennuie dans la vie et sa rencontre avec Aman (Shahrukh Khan) va la changer. Aman, qui est atteint d’une grave maladie, ne veut pas avouer son amour pour Naina et va donc tout faire pour qu’elle tombe dans les bras de Rohit (Saif Ali Khan, le beau gosse de service). S’ajoute à cela, le restaurant indien qui ne marche pas, une petite fille née d’une liaison illégitime et quelques autres sous intrigues.

Disons-le tout net : New York Masala n’est pas un grand film mais quelques séquences sont très réussies. Tout d’abord, une scène chant-danse dans les rues de new York où Shahrukh Khan fait une reprise irrésistible du Pretty Woman de Roy Orbisson en hindi. On remarquera que l’interprète de Naina se prénomme Preity. Mais, hélas, la majorité des chansons et des chorégraphies sont un peu molles et manquent d’originalité.

Il y a aussi une running gag dans le film concernant les deux personnages masculins de Rohit et Aman. Comme indiqué plus haut, Aman cherche à unir Rohit et Naina. Régulièrement, ils se retrouvent dans l’appartement d’Aman et ce dernier lui prodigue des conseils pour séduire la jeune fille : tel Cyrano de Bergerac, il lui souffle son texte. C’est alors qu’entre la femme de ménage qui croit que Aman déclare sa flamme à Rohit. Ce quiproquo, répété à l’envi, fonctionne, en dépit ou grâce à sa balourdise.

Les Bollywood sont souvent en deux parties, la première est une comédie, la deuxième un drame. Un interlude (intermission en anglais) vient séparer ces deux parties. Tandis que l’habitude veut que ce soit un simple carton, ici l’écran est composé de trois photos des personnages en pleurs. Le film se poursuit avec quelques coups de théâtre auxquels il est difficile de résister pour retenir son émotion et ses larmes.

New York Masala est clairement destiné à un public occidental. Ou plutôt, aux Indiens qui se sont installés en Occident. Les phrases en anglais ponctuent régulièrement les dialogues. Mais le cinéma hindi est coutumier du fait que ses films se déroulent en partie à l’étranger. Chori Chori Chupke Chupke de Abbas et Mastan Burmawalla se déroule pratiquement tout en Suisse : c’est là-bas l’exotisme pour les Indiens.

Shahrukh Khan est une star en Inde. Son visage poupon détonne avec celui de ses partenaires masculins dont on dirait souvent qu’ils sortent de la salle de gym. Son jeu est également assez étonnant : composé d’hésitation, voire de bégayement, les borborygmes remplacent parfois les mots. Il arrive à jouer le jeune homme timide qui hésite à ouvrir son cœur aux jeunes filles. Et c’est sans doute précisément ce qui rend les personnages de Shahrukh Khan si charmants et touchants. Il est Bollywood !

New York Masala (Kal ho naa ho, Inde, 2003) Un film de Nikhil Advani avec Shahrukh Khan, Preity Zinta, Saif Ali Khan

1 commentaire:

Rom a dit…

Pour ma part, j'adore le cinéma indien que j'ai découvert depuis peu. J'adore particulièrement New York Masala et surtout Mohabbatein avec mon acteur-désormais-préféré : Shah Rukh Khan. Sa composition dans NY Masala est fabuleuse. La séquence culte : lorsqu'il maltraite la grand-mère dite Vieille sorcière qu'il surnomme Jennifer Lopez ou Spice Girl. Et la séquence chantée et dansée Maahi Ve est également merveilleuse.
Bravo pour ton blog, jolis textes, jolie mise en forme, et le(s) cinéma(s) asiatique (japonais et indien surtout) est mon préféré.