vendredi 15 juin 2007

Forbidden City cop


Pour s'assurer un nouveau succès au box office, Stephen Chow aurait pu se contenter pour Forbidden City cop de réaliser une suite des aventures de son espion de Bons baisers de Pékin. Après tout, c'est une chose courante dans le cinéma de Hong Kong de décliner un personnage apprécié du public. Chow décide de faire se dérouler son film dans la Chine impériale. Le seul lien réel entre Forbidden City cop et Bons baisers de Pékin est la parodie du générique à la James Bond.

La nuit sur les toits de la Cité Interdite, des maîtres se rencontrent pour préparer un combat. Tout commence comme un wu xia pian classique : costumes, formules magiques, shaolin etc. Tout est prêt pour le spectacle habituel jusqu'à ce Stephen Chow arrive et vienne tout foutre le bazar et dynamiter un terrain a priori connu. Ling Ling Fat (Chow) insulte ces quatre pauvres maîtres shaolin, les traite de ringards et fait son crâneur. Chow est coutumier du genre. Dans les deux Royal tramp de Wong Jing en 1992, il testait son humour sur le film de sabre chinois. Avec parfois beaucoup de vulgarités. Dans Forbidden City cop, il réitère son œuvre de désintégration du wu xia pian.

Il faut bien le dire, le scénario de Forbidden City cop est assez flottant, pour utiliser un euphémisme. Ling Ling Fat est un des quatre membres du service secret de l'Empereur. Canard boiteux de ce quarteron, il s'avère incompétent, vaniteux et obsédé sexuel. Certaines scènes dans la première partie du film sont très drôles. Pur burlesque visuel, gags visuels ou verbaux qui s'enchaînent rapidement sans se soucier réellement de faire avancer une intrigue qui de toute manière n'a guère d'importance. Cette intrigue, protéger l'Empereur d'un complot, sans en révéler l'issue que l'on peut deviner, n'est qu'un moyen pour Stephen Chow et son scénariste Vincent Kok, de montrer la palette comique de la star hongkongaise.

Clairement divisé en deux parties égales, Forbidden City cop se poursuit par une comédie de mœurs où Ling Ling Fat est en proie à sa libido dévastatrice. Ce que ne pourrait apparaître que comme une énième variation sur l'épouse trompée, le mari volage et la croqueuse d'homme, devient un vaudeville où la confusion des sexes règne.

Gum Tso, la belle maîtresse de Ling Ling Fat, se déguise en homme et tente de séduire l'épouse de l'espion. Lui, jaloux, essaie à son tour de séduire Gum Tso (déguisée en homme) en mettant des vêtements féminins. Or, Ling Ling Fat sous son apparence féminine est tout particulièrement apprécié par l'Empereur qui désire en faire sa nouvelle concubine. Si l'on ajoute à cela des sous-entendus graveleux (une des marques de fabrique de Wong Jing, producteur du film), on constate avec jubilation que Stephen Chow déploie un humour extrêmement sexualisé, voire homosexualisé (ce qui était déjà la cas dans Curry and Pepper de Blacky Ko en 1990 ou de Tricky brains de Wong Jing en 1991). Tout ça pour terminer sur des retournements de situations ironiques particulièrement jouissifs.

Forbidden City cop a été un des plus grands succès de Stephen Chow. Un de plus. Mais bientôt, ses films intégreront une plus grande finesse psychologique pour ses personnages et des scénarios plus développés. Il n'empêche que Forbidden City cop est un bon moment de comédie.

Jean Dorel
Forbidden City cop (大內密探零零發, Hong Kong, 1996) Un film de Stephen Chow & Vincent Kok avec Stephen Chow, Carina Lau, Carman Lee, Law Kar-ying, Cheung Tat-ming, Lee Lik-chi, Tats Lau, Kingdom Yuen.

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